variété
La variété peut être considérée comme la qualité essentielle du style. Le point a l’air techniquement simple : pour ne pas ennuyer l’auditeur par l’usage constant des mêmes termes, des mêmes tournures et des mêmes procédés, pour ne donc point le lasser ni l’endormir, il faut varier son style, ce qui est aussi un moyen de fuir le vice de languissant. Sous cet angle, la variété s’appréhende évidemment du côté de l’élocution. Elle contribue donc aux moyens de plaire, ce qui conditionne l’une des visées de l’efficacité oratoire. L’exigence, traditionnelle, de variété s’explique ainsi par la pragmatique propre à toute la rhétorique : plaire pour persuader. Sans doute y a-t-il d’autres matières à variété que celles de l’élocution. On peut penser d’abord justement aux matières mêmes du discours et à ses arguments, ce qui pose le grand problème des lieux. Surtout, on est vite confronté à la question des genres et des niveaux, qui verrouillent d’une certaine façon les possibilités de variété. On en arrive alors à l’un des points sensibles de toute réflexion sur la rhétorique, c’est-à-dire à une limite ou à une articulation. D’une certaine façon, c’est incontestable, l’exigence de variété s’inscrit, comme outil forcément ancillaire, à l’intérieur d’une codification générale qui interdit toute novation et dans laquelle la variété ne peut être qu’une virtuosité mise à gérer la répétition. On reproduit indéfiniment les modèles topiques, avec simplement une plus ou moins heureuse adaptation aux besoins de son propos. La variété vient d’un jeu approprié et techniquement toujours bien, ou de mieux en mieux, convenant de la panoplie répertoriée au sujet traité et aux circonstances singulières de l’interprétation. Mais on peut aussi imaginer un autre type de variété, qui s’oriente vers la novation réelle, qui pousse à faire entendre des accents jamais entendus avant la performance particulière, qui libère l’expression d’un génie absolument différent, c’est-à-dire dont le génie soit dans la différence. On risque alors de changer d’idéal. Une telle variété détruit évidemment les cadres et sort des lieux. Son frémissement n’est pas sans rapport avec celui de la fureur poétique ; et le problème ici posé est presque celui des relations du rhétorique et du poétique. Sans doute, cependant, la vraie nature de la rhétorique incline-t-elle à la maîtrise, à la modération, au balisage - à la culture. Il n’empêche que la rhétorique a également intégré dans sa sagesse le besoin, le désir ou le devoir-être d’un sentiment de mouvement, de modification ou de nouveauté, qui marque le signe de la vie, mais de la vie policée.
=> Oratoire, orateur, éloquence; élocution, invention, style; lieu; persuader, plaire, preuve ; genre, niveau; qualités, vices; abondance, grand style, convenant, languissant.
Liens utiles
- La malice joyeuse de nos ancêtres s'exprime aussi dans une grande variété de chansons humoristiques. Robert Léger, la Chanson québécoise en question, Québec Amérique
- Dans l'extrême variété des oeuvres qu'on appelle « romans » que cherchez-vous : des personnages attachants, une histoire passionnante, l'évocation d'un milieu réel ou imaginaire, une incitation à la réflexion ou au rêve ou quelque autre intérêt ?
- variété.
- On rapproche souvent le cinéma de la littérature écrite, et les réalisateurs eux-mêmes ont eu bien des fois recours au roman ou au théâtre, leur empruntant soit des œuvres déjà accomplies, soit une forme familière au public. Cependant, un critique, Jean Limousin, écrivait à propos d'un metteur en scène célèbre : « La justesse des notations, leur portée sur le public, tiennent à ce qu'elles sont pensées directement « en cinéma» par un homme intelligent qui découvre aussitôt l'équivalent
- Après avoir écrit : « Au même Baudelaire appartient une autre initiative. Le premier parmi nos poètes, il subit, il invoque, il interroge la Musique... », Paul Valéry affirme : « Ce fut baptisé : le Symbolisme, se résume très simplement dans l'intention commune à plusieurs familles de poètes (d'ailleurs ennemies entre elles) de reprendre à la Musique leur bien. » (Variété I, Avant-propos à « La connaissance de la Déesse », pp. 95 et 97. Valéry pense à la phrase où Mallarmé parle d'un a