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TYRANNIE

Du grec turannos, « celui qui s'empare du pouvoir », « maître absolu ». - Tyran : dans l’Antiquité grecque, celui qui s’arroge l’autorité royale par la violence. - Tyrannie : régime politique dans lequel le pouvoir est exercé de façon despotique, arbitraire et oppressive. • Pour Aristote, la tyrannie est une forme dégénérée de la royauté, qui n’a en vue que l'intérêt du monarque, et non celui de la collectivité.

TYRANNIE, n. f 1° Sens large. Pouvoir absolu et arbitraire, fondé sur la force et l’oppression, en général cruel et injuste. D’où, autorité abusive, pouvoir oppressif exercé par un chef, un père, un roi, un président, etc. La tyrannie du monarque. La tyrannie de Néron. La tyrannie d'un instituteur qui fait trembler les petits. Par extension, oppression quelle qu’elle soit. La tyrannie du conformisme ambiant, des modes musicales, du système publicitaire. 2° Sens précis (notamment dans la typologie des gouvernements, selon Montesquieu). Régime politique dans lequel un seul homme concentre tous les pouvoirs : l’exécutif, le législatif, le judiciaire (auxquels il faudrait ajouter, au XXe siècle, le pouvoir de propagande et d’information). Synonymes : despotisme, dictature, autocratie. Dans ce sens, la tyrannie se distingue en principe de la monarchie, dans laquelle le pouvoir royal est équilibré par d’autres forces dans la nation (un parlement; une catégorie sociale, la noblesse par exemple). Malgré leur forme extérieure dictatoriale apparemment identique, la tyrannie et le régime totalitaire se distinguent radicalement. Le tyran se moque en général de ce que pensent ses sujets (Oderint dum metuant, «qu’ils me haïssent pourvu qu’ils me craignent») : il lui suffit de régner en inspirant de la crainte. Le pouvoir totalitaire a une autre dimension. D’une part, parce qu’il est souvent de nature oligarchique (c’est une petite classe d’hommes, érigée en système, qui gouverne). D’autre part, et surtout, parce qu’il veut opprimer l’esprit même des citoyens, normaliser la pensée collective, c’est-à-dire jouir de la totalité même du pouvoir de l’homme sur l’homme. Orwell illustre formidablement cet aspect dans son roman 1984 : «Le pouvoir est le pouvoir sur d'autres êtres humains : sur les corps, mais surtout sur les esprits. »

tyrannie. Les jugements des Anciens sur la tyrannie sont des plus défavorables et c’est d’eux que nous avons hérité ce sens péjoratif du mot. Il faut cependant considérer que ces jugements sont issus de l’aristocratie ou de démocrates athéniens qui ont souffert des excès d’une tyrannie ombrageuse ; or l’essence de la tyrannie est de combattre l’oligarchie. Les tyrans ne sont venus au pouvoir que contre un régime oligarchique, appuyés par le peuple, mécontent de la domination de la noblesse. C’est au VIIe s. av. J.-C. qu’apparaissent les premières tyrannies à Corinthe et à Sicyône. Elles sont contemporaines des législateurs dont les Anciens nous ont gardé le souvenir. La tyrannie, à l'époque archaïque, apparaît en effet toujours comme la conséquence des crises économiques qui sévirent à la fin de la période dite géométrique, aux VIIIe et VIIe s. ; la cause de ces crises fut la croissance du nombre de pauvres qui se trouvaient en opposition avec les riches propriétaires terriens. Lorsque ceux-ci restèrent assez puissants, comme à Sparte, la tyrannie ne put s’établir. Mais lorsque le nombre des pauvres et des déshérités fut devenu suffisamment important, un homme, en général issu des rangs de la noblesse, profita du mécontentement populaire pour se mettre à la tête du peuple et pour renverser à son profit le gouvernement oligarchique. La plupart des cités de la Grèce, de l’Égée et des colonies occidentales passèrent par le stade de la tyrannie avant de revenir à une oligarchie de caractère démocratique ou de se donner un régime démocratique. Ce qui opposait la tyrannie à la monarchie, c’est que cette dernière était d’origine divine, tandis que la première était une institution humaine. Cependant, rarement les tyrans renversèrent les institutions et les lois pour gouverner selon leur caprice. Il est remarquable que les tyrans furent, en règle générale, des politiques habiles, qui surent enrichir leur patrie, procédèrent à des réformes nécessaires à l’avantage de l’ensemble du peuple et que les aristocraties n’auraient jamais effectuées. Ils entreprirent encore des travaux d’art de la plus haute utilité et s’entourèrent d’artistes et de poètes afin de donner le plus vif éclat à leur cour. Les principales tyrannies furent celles des Cypsélides à Corinthe, des Orthagorides à Sicyône, des Pisistratides à Athènes. Le fait que ces tyrannies purent devenir héréditaires montre leur faveur auprès du peuple. À côté de ces dynasties, des tyrans brillèrent par leur éclat : Polycrate de Samos, Théagène de Mégare, Lygdamis de Naxos, Thrasyboulos de Milet. Alors que les tyrannies s’éteignirent au vie s. av. J.-C. en Grèce, elles subsistèrent sporadiquement en Sicile et en Grande-Grèce. Si Phalaris laissa à Agrigente un triste souvenir, Gélon, à Géla et à Syracuse, Théron, à Agrigente, et Anaxilas, à Rhégion, donnèrent une impression de grandeur, alors que, en pleine époque classique, Denys l'Ancien, Agathocle et Hiéron firent la puissance de Syracuse. À côté des tyrans établis par la force, les aisymnètes étaient des tyrans élus d’un consentement unanime.

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