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Thucydide, historien

Thucydide, historien (Athènes v. 470 - 460-395 env.).

Sa vie est intimement liée à la guerre du Péloponnèse dont il nous a laissé l’histoire. D’une famille aristocratique, il fut peut-être l’élève d’Anaxagore et de l’orateur Antiphon. En 424, élu stratège, il prit le commandement d’une expédition navale envoyée en Thrace par Athènes, mais il ne put empêcher la prise d’Amphipolis par le Spartiate Brasidas. Accusé de trahison, il fut jugé et ostraciser. C’est au cours de ces vingt années d’exil qu’il rédigea son Histoire de la guerre du Péloponnèse; grâce aux mines d’or de Thrace que possédait sa famille, il put voyager, enquêter sur les deux forces en présence. On ne sait s’il mourut à Athènes. Son récit s’achève en 411, mais il assista à la fin de la guerre en 404.

THUCYDIDE. Né à Athènes, dans le dème d’Halimunte, entre 465 et 460 av. J.-C., d’une des plus nobles familles de l’Attique, mort entre 404 et 400. Son père s’appelait Oloros, et il est démontré qu’il descendait de son homonyme, le prince thrace Oloros, dont Miltiade avait autrefois épousé la fille, Hegésipyle. Comme la mère de Thucydide portait le nom d’Hegésipyle, il est évident qu’à dessein les parents avaient repris les noms de leurs ancêtres royaux. Outre les liens qu’elle avait avec Miltiade, la famille de Thucydide était apparentée à Cimon, et peut-être à Pisistrate. La jeunesse de Thucydide coïncida avec l’époque de Périclès; Athènes était alors à l’apogée de sa puissance dans le domaine de la politique, et de sa splendeur dans le domaine des arts. Il eut sans doute une éducation des plus raffinées, conforme à sa position sociale. La tradition rapporte qu’il fut le disciple de l’orateur Antiphon de Rhamnonte, et celui du philosophe Anaxagore de Clazomènes; mais on n’a là-dessus aucune certitude. Lorsque, en 431 av. J.-C., éclata la guerre entre Sparte et Athènes, Thucydide avait probablement un peu plus de trente ans. Si l’on en croit la Vie de Thucydide écrite par Marcellinus, l’historien n’aurait pas participé au gouvernement de la cité avant 424. Au contraire, d’autres biographes, comme Denys d’Halicamasse, affirment que Thucydide aurait été pourvu de nombreuses charges avant cette date. Cette année 424 marque, dans la vie de Thucydide, des changements très importants. Comme il le dit dans son œuvre (IV, 104), il fut alors nommé stratège et préposé au commandement de la flotte athénienne, dans le nord de la mer Egée; il avait pour mission de protéger les côtes de la Thrace, et surtout la place forte d’Amphipolis, centre d’éventuelles attaques venues de Sparte. Néanmoins, lorsque le général Spartiate Brasidas investit Amphipolis, pendant la campagne qu’il fit dans la péninsule de la Chalcide, Thucydide n’arriva pas à temps pour empêcher que les Spartiates ne s’introduisent dans la ville. Euklès, l’autre stratège athénien qui commandait les forces de terre préposées à la défense d’Amphipolis, lui envoya un message pour lui demander des secours; mais Thucydide était en train de croiser avec sa flotte dans les eaux de Thasos, petite île de la mer Égée située en face du littoral thrace.

Dès qu’il eut reçu le message, Thucydide se hâta de faire voile, avec sept navires, vers la place forte défendue par les Athéniens. Il était déjà trop tard, et Brasidas occupait Amphipolis. Thucydide dut se contenter d’occuper Eion, afin de pouvoir surveiller l’ennemi. Les Athéniens trouvèrent plus efficace d’accuser Thucydide de trahison plutôt que d’incapacité et, après l’avoir rappelé, le condamnèrent à mort par contumace (424-423). Fort heureusement pour lui, Thucydide ne regagna point Athènes et évita la condamnation formelle en choisissant l’exil. Pendant les longues années de cet exil, il vécut presque continuellement à Skaptè-Hylè, en Thrace, où, comme il le rapporte lui-même (IV, 105), « il avait le droit d’exploiter les mines d’or de la région ». C’est encore Thucydide qui nous renseigne avec exactitude sur la durée de cet exil ; dans le livre V (chap. 26) de son Histoire, il dit qu’il resta loin d’Athènes pendant vingt ans, exactement jusqu’en 404, lorsque Lysandre occupa les Longs Murs et le port du Pirée, et que Sparte, avec ses alliés, détruisit l’empire athénien après une lutte qui avait duré vingt-sept ans. Mais de 424 à 404, Thucydide ne resta pas continuellement à Skaptè-Hylè. Il s’en éloigna de temps à autre pour accomplir de longs voyages, au cours desquels il recueillit des informations précieuses pour son Histoire, s’adressant pour ce faire aux combattants de l’un et l'autre camp, mais surtout aux Spartiates, afin d’avoir des points de vue opposés. La manière scrupuleuse dont il procédé, son désir d'être précis qui le distinguent de tous les historiens occidentaux, anciens et modernes, antérieurs au XVIe siècle, l’incitèrent souvent à se rendre sur le théâtre des combats, pour que les descriptions fussent plus exactes et pour que les informations lui vinssent de ceux qui avaient assisté aux événements. C’est certainement pour cela que Thucydide se rendit à plusieurs reprises dans le Péloponnèse, et il est presque certain, si l’on s’en remet à la tradition, qu’il a visité aussi la Sicile, et peut-être la Grande Grèce. Comme Thucydide le mande lui-même dans la préface de son Histoire, il commença à en préparer les matériaux alors que la guerre entre Sparte et Athènes venait à peine de commencer, c’est-à-dire vers 431 av. J.-C. Il se flatte d’en avoir immédiatement prévu l’importance, les développements et les conséquences. Mais il semble certain que Thucydide n’eut point une claire vision des choses avant 424. Au début, il fut porté à rédiger des notes, à faire des observations, parce que cela servait sa grande passion : la politique. L’amertume que provoqua son échec et sa condamnation l'aurait contraint, dans la solitude de l’exil, à se replier sur lui-même, et à voir les événements avec plus de recul. Thucydide resta toujours fidèle à son grand désir d’impartialité, c’est ainsi qu’il rappelle avec indifférence sa malchance et parle avec une admiration évidente de Brasidas, le général Spartiate qui l’avait battu à Amphipolis. Mais il ne faudrait pas s’imaginer pour autant que Thucydide était un historien capable de froideur, que son détachement résultait d’une sécheresse naturelle, que la sévérité des jugements qu'il porte sur la majorité des hommes provenait de quelque rancœur provoquée par son exil. L’équilibre de Thucydide est fait de passion, et ne l’empêche nullement d’aimer avec intensité, même s’il en est loin, sa patrie qui Pavait condamné cependant, ou d’admirer ouvertement Péricles, ou encore de s’attaquer à Cléon. Car Thucydide n’est pas le plus grand historien de l’Antiquité seulement parce qu’il a inventé la critique historique ou parce qu’il a découvert, vingt siècles avant Machiavel, l’indépendance absolue de la politique par rapport à la morale, ou enfin parce qu’il a proclamé, vingt-quatre siècles avant Nietzsche, que le véritable ressort de l’histoire et de la vie humaine est la volonté de puissance des individus et des États. Thucydide est le premier historien du monde occidental qui ait conçu une histoire vécue et faite entièrement par des hommes, le premier qui ait découvert ce qu’il y a d’enthousiasmant dans l’effort que l’homme accomplit journellement pour donner une unité à son existence, dans l’héroïsme et dans la foi dont l’homme fait preuve chaque jour en tentant d’atteindre à l’idéal le plus haut, en dépit de la cruauté de l’histoire qui ne respecte ni la vertu des individus ni la civilisation des États, mais qui conduit les uns et les autres à leur ruine, afin que cette mort soit la source de nouvelles formes vivantes, dans un afflux intarissable et incompréhensible. Par là, Thucydide est vraiment imprégné de l’enseignement des sophistes qu'il fréquenta dans sa jeunesse et son œuvre en apparaît comme le fruit le plus achevé. Car, s'il est vrai qu’elle marque le triomphe de la raison humaine sur l’absurdité des événements, elle ne laisse point cependant de célébrer les autres possibilités infinies et les ressources secrètes de l’esprit humain. Selon la tradition, Thucydide aurait été assassiné par ses ennemis politiques, et son corps aurait été enseveli, ensuite à Athènes, près de la porte Mélitide, à l’endroit où se trouvent les tombeaux de la famille de Cimon.

Thucydide (v. 460-après 400 av. J.-C.) ; historien athénien. Le peu que l’on sait du plus important historien grec se tire de son oeuvre elle-même, ce grand récit inachevé, La Guerre du Péloponnèse, cette lutte pour le pouvoir entre les Péloponnésiens et les Athéniens qui dura vingt-sept ans (431-404 ; avec une interruption en l’an 411). Citoyen athénien, issu d’une famille aristocratique et fortunée (propriété de mines d’or en Thrace), le jeune T. profite de tous les avantages et de toutes les stimulations qu’offre la vie intellectuelle et culturelle de la capitale au temps de Périclès. Lorsqu’en 431 la guerre est déclarée, l’adulte qu’il est ne tarde pas à déceler derrière les causes apparentes les véritables forces qui, par le déchaînement d’une passion et d’une violence jusque-là inconnues, devaient faire de ce combat fratricide la lutte la plus longue et la plus terrible que le monde grec ait vue jusqu’alors. Il consacra sa vie à décrire de manière exacte et chronologique, année par année, cette lutte qui influença également son propre destin. Il est en effet atteint par la grande peste qui, peu après le début de la guerre, frappe l’Attique et fauche Périclès (429), le seul, aux yeux de T., en mesure d’exiger du peuple les sacrifices nécessaires à la victoire. Abandonnées à elles-mêmes, les masses se tournent vers les démocrates extrémistes, vers un Cléon, dont l’échec devant Amphipolis sur le Stry-mon (Thrace) en 424 touche également T. Stationné à Thasos, en qualité de stratège, celui-ci ne semble pas avoir répondu à temps à l’appel au secours de Cléon que harcelait le Spartiate Brasidas, ce qui lui vaut vingt ans d’exil. Lui-même se borne à remarquer qu’il eut alors l’occasion de procéder à des recherches également du côté adverse. Il se peut qu’il ait visité Sparte et les champs de bataille siciliens, et qu’il ait séjourné dans ses propriétés de Thrace. Ce n’est qu’à la fin de la guerre, en 404, dont il conçoit les trois phases (guerre Archidamienne 431-421 ; paix apparente, 421-415 ; guerre sicilienne, ionienne et dekeleienne 415-401), comme un ensemble, qu’il est autorisé à revenir à Athènes. On ignore s’il y vint et on ne sait où et quand il mourut. En fait, sa vie est dominée par son oeuvre : il dit que dès le début de cette guerre, il se mit au travail. Mais on ne sait comment il travaillait et quand il écrivit. T. a poursuivi l’oeuvre d’Hérodote, mais avec beaucoup plus d’esprit scientifique : précision incomparable, rigueur de la méthode, objectivité, ambition intellectuelle. Ses successeurs (Xénophon. Théopompe, Cratippe) prirent comme point de départ de leur récit les événements sur lesquels devait se conclure celui de T. En se servant des méthodes critiques de toutes les disciplines de la culture de son époque et en recourant délibérément à une langue recherchée, dense, qui tend à l’abstrait, T. cherche « à faire qu’une histoire particulière devienne exemplaire et riche d’enseignements pour tous ». Bibliographie : J. de Romilly, Thucydide et l’impérialisme athénien, la pensée de l’historien et la genèse de l’oeuvre, 1947 ; id., La Construction de la vérité chez Thucydide, 1990 ; id., Traduction, introduction, notes de l’Histoire de la guerre du Péloponnèse, 1990.


♦ « Son style est si plein, si nourri, qu’on trouve chez lui presque autant de pensées que de mots; et ses expressions sont si justes, son récit est si serré, qu’on ne sait si les choses sont embellies par le discours, ou si ce sont les pensées qui font valoir les paroles. » Cicéron. ♦ « Les couleurs de son style sont l’acerbe, l’amertume, la concision, la sévérité, la gravité, la véhémence, la terreur, et pardessus tout le pathétique. » Denys d’Halicamasse. ♦ « Au-dessus de Tacite peut-être est Thucydide, le plus étonnant des historiens. Aucun livre ne laisse une impression si accablante et si étrange; on croit voir se dresser devant soi une statue d’airain. Son don particulier est l’amour absolu de la vérité pure. Parmi ce peuple de conteurs et de poètes, il a inventé la critique et la science. » Taine. ♦ « Il possède une plus grande justice pratique que Platon; il ne calomnie et ne rapetisse pas les hommes qui ne lui plaisent pas ou bien qui lui ont fait du mal dans la vie. Au contraire : il ajoute et introduit quelque chose de grand, dans toutes les choses et dans toutes les personnes, en ne voyant partout que des types. » Nietzsche.


Thucydide. 1. Homme politique athénien, né vers 500 av. J.-C., fils de Mé-lésias et parent par alliance de Ci-mon. Homme influent à Athènes et en Grèce en général, il devint le successeur de Cimon comme chef de la puissante faction aristocratique et oligarchique et l'ennemi de Périclès, auquel il reprocha d'utiliser les fonds provenant des tributs de la confédération de Délos pour financer les grands travaux de l'Acropole. Il fut frappé d'ostracisme v. 443 av. J.-C. A la fin de sa vie, il fut traîné en justice ; acte qui fut condamné par Aristophane. Pindare le mentionne en tant que célèbre entraîneur de lutteurs. 2. Historien grec, auteur d'une Histoire (inachevée) de la guerre du Péloponnèse, en huit volumes. Né d'une noble famille d'Athènes entre 460 et 455 av. J.-C., il fut atteint par la peste entre 430 et 427 mais réussit à en guérir. Élu stratège en 424, il fut chargé de surveiller la côte thrace, mais arriva trop tard pour empêcher l'importante colonie athénienne d'Amphipolis de tomber aux mains du général Spartiate Brasidas. Accusé de trahison et condamné à l'exil, il ne revint à Athènes que vingt ans plus tard, à la fin de la guerre, et y mourut quelques années après, vers 399, de mort violente selon certaines sources. Il semble avoir été apparenté à Cimon et à Thucydide (1) mentionnés supra : Oloros, le nom de son père, était également celui du grand-père thrace de Cimon, et il avait hérité de grands domaines et de mines d'or en Thrace. La guerre du Péloponnèse entre Sparte et Athènes, objet du livre de Thucydide, a duré de 431 à 404 av. J.-C. Or, son récit s'interrompt brusquement aux événements de l'hiver 411/410, au milieu d'une phrase. Son intention était probablement de terminer son histoire à la chute d'Athènes, en 404, lorsqu'il fut frappé par la mort. La suite qu'en ont donnée Théopompe et Cratippe a été perdue, avec le reste de leurs oeuvres. Thucydide affirme qu'au début de la guerre du Péloponnèse, comprenant que ce conflit aurait des conséquences plus lourdes pour l'histoire de la Grèce qu'aucun autre (y compris les guerres médiques), il s'attacha à recueillir des documents sur les événements qu'il se proposait de raconter. Il passa la plus grande partie de la guerre en exil, détaché de l'action immédiate, et chercha à obtenir des informations des deux côtés, ce qui lui permit d'avoir une vision plus claire des événements. Son ouvrage devait être «une acquisition pour les générations futures » (ktêma es aiei) et non une distraction passagère. L'une des caractéristiques de son histoire est de rapporter de nombreux discours (39 harangues), qui n'ont cependant pas la même valeur documentaire que le reste du récit. Bien que «s'étant as treint à ne rien faire dire à chacun que ce qu'il aurait dû dire effectivement», Thucydide n'a pas cherché à reproduire exactement les paroles prononcées, (se conformant ainsi à l'usage traditionnel) ; ces discours lui servent à mettre en lumière les mobiles des actions ou les causes des événements et lui permettent de mettre en balance les arguments de deux parties opposées, l'accusation et la justification, l'attaque et la riposte. On a cependant accusé Thucydide d'avoir entièrement composé ces discours, écrits dans son style propre, en utilisant des procédés dramatiques pour faire ressortir les enjeux du conflit qui lui paraissaient fondamentaux. Certains critiques ont rapproché sa méthode de recherche des causes premières sous la surface des événements à celle des scientifiques et physiciens de son époque (voir, p. ex., hippocrate). Dans son analyse des causes de la guerre du Péloponnèse, il distingue ainsi les causes immédiates, les prétextes — disputes concernant les alliances de petits Etats, Corcyre et Potidée — des causes profondes : la crainte de Sparte devant l'expansion athénienne. Il est possible que ces dernières aient été ajoutées après une réflexion plus approfondie. Le livre I comprend l'introduction, qu'on intitule «Archéologie» (chap. 1-23), au cours de laquelle Thucydide retrace brièvement l'histoire de l'« ancienne Grèce», l'exposé de sa méthode, le récit des événements de Corcyre et de Potidée et des manoeuvres politiques de 433-432, ainsi que l'histoire de la croissance de la puissance athénienne de 479 à 435 (chap. 89-118, le Pentekontetia). Les livres II à V (chap. 24) décrivent les événements saillants des dix premières années de conflit, la guerre dite d'Archidamos (431-421). On y trouve l'oraison funèbre de Périclès pour les guerriers morts durant la première année de guerre (II, 34-46), le récit de la peste d'Athènes (II, 47-54), la révolte de Mithylène de 428/7 (III, 1-50), la destruction de Platée en 427 (III, 51-68), la guerre civile de 427 à Corcyre (III, 69-86), la prise de Sphactérie par les Athéniens en 425 (IV, 1-42), la prise d'Amphipolis par Brasidas (IV, 102-116), la mort de Cléon et de Brasidas et la paix de Nicias (V, 1-24). La suite du livre V évoque la paix précaire, la campagne de Mantinée en 418-417 (68-83) et s'achève sur la destruction de Mélos en 415. Les livres VI-VII sont consacrés à l'expédition de Sicile. Le livre VIII, inachevé et ne renfermant aucun discours, couvre le début de la « guerre de Décélie» (413-404), la révolte des alliés d'Athènes et la défaite navale au large de l'Asie Mineure, avant de s'interrompre en 411. Thucydide révèle une passion du détail et de l'exactitude jamais égalée par aucun historien antique, fruit de son propre caractère en même temps que de l'influence des sophistes. En outre, il conçoit l'histoire selon des lois strictement humaines sans intervention surnaturelle ; il se raille à maintes reprises des prédictions des devins. Il relate ce qui a pu être observé, ce qui est documenté, sans jamais y faire interférer les dieux. Il fait preuve d'une grande impartialité, bien qu'on lui ait reproché de s'être montré excessivement sévère à l'égard de Cléon et trop indulgent envers Péri-clès. Le sujet est traité avec le plus grand sérieux et une grande hauteur de vue. Il n'y a place chez lui ni pour les anecdotes, scandales ou rumeurs, ni pour le sentimentalisme. Cependant comme le seul récit que nous ayions de la guerre du Péloponnèse est celui de Thucydide, il est difficile de savoir, à de rares exceptions près, ce qu'il a choisi de taire, ou de vérifier l'exactitude de ses informations. C'est donc surtout sa conception rigoureuse de l'histoire qui nous fait accepter son récit et son interprétation des événements. Son style, à la fois brillant et austère, est parfaitement adapté à la narration de grands événements. On y trouve certains archaïsmes voulus, tel le recours au dialecte ionique, alors que l'attique était courant à son époque, la personnalisation poétique de noms abstraits comme «guerre» ou «espoir », ou un ordre inhabituel des mots pour créer une certaine emphase. Il est d'une grande concision, malgré des phrases plutôt longues ; quelques mots suffisent pour rendre une idée et il manie avec une grande habileté les concepts abstraits. L'impression de concision est particulièrement sensible dans les discours ; au cours de la narration, le style apparaît généralement dépouillé.


THUCYDIDE (Athènes, v. 460/455-ap. 395 av. J.-C.). Grand historien grec, Athénien de naissance, issu d'une riche famille aristocratique. Stratège en 424, il est l'auteur de l'Histoire de la guerre du Péloponnèse (opposant Athènes à Sparte). Son récit chronologique rigoureux, la précision de sa documentation, sa volonté de comprendre avec impartialité les événements ont fait de lui un historien, le plus illustre du monde antique. Voir Hérodote, Péloponnèse (Guerre du).

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