TAILLE
TAILLE Dans le domaine fiscal, le terme désigne un impôt direct perçu par le seigneur foncier. C’est un impôt de répartition qui permet de faire contribuer aux dépenses de la seigneurie ceux qui vivent dessus (exception faite des nobles et des clercs). Source d’inextricables conflits, notamment avec les communautés villageoises, elle touche, suivant les époques et les régions, des hommes libres autant que non libres. Elle est fixée soit au coup par coup et selon le bon vouloir de qui la perçoit (on la dit alors arbitraire), soit par un accord négocié qui établit le montant dû par chacun des assujettis. Dérivant de la taille seigneuriale, il existera à partir du XIIIe siècle une taille royale. Étendue à l’ensemble des sujets et censée être exceptionnelle, elle deviendra, dès le XVe siècle, l’impôt direct par excellence.
Impôt roturier de la France d'Ancien Régime, la taille fut d'abord seigneuriale. À l'origine elle était un substitut au service militaire, destinée à payer la protection du seigneur. Elle était due au seigneur haut justicier par tous ses sujets roturiers, y compris les serfs, hormis les nobles et les clercs. Le seigneur fixait une somme globale par village ou toute autre communauté dépendant de lui, et la répartition se faisait par les « taillables » eux-mêmes. La taille royale ne fut d'abord qu'une taille seigneuriale due au roi dans les lieux où il exerçait sa haute justice. Peu à peu, le roi étendit à tous ses sujets l'obligation financière en échange de sa protection. En 1439, la taille seigneuriale, théoriquement supprimée (en réalité, elle mit longtemps à disparaître), fut remplacée par la taille royale qui était devenue, à la fin du XIVe, l'impôt direct par excellence. Le montant de cet impôt s'accrut considérablement avec le temps : de 1,8 million de livres au XVe s., il passa à 32 millions sous Henri III et 64 millions vers 1780. Impôt de répartition, la taille devait être payée solidairement par les communautés (généralités, élections, paroisses). Dans chaque paroisse, la répartition et le recouvrement étaient faits par des habitants (les asséeurs), élus et responsables financièrement. Les « pays d'états » (Artois, Bourgogne, Bretagne, Hainaut, Languedoc, Provence) votaient et répartissaient la taille réelle, plus juste puisqu'elle frappait tous les biens roturiers même si leurs propriétaires étaient des nobles ou des clercs. En revanche, dans les « pays d'élections » (les plus anciennement réunis au royaume), la taille personnelle portait sur le revenu global de chaque roturier. L'estimation de ce revenu relevant de l'asséeur, celui-ci pouvait faire l'objet de pressions de la part des contribuables les plus riches, lesquels avaient par ailleurs les moyens d'acheter une exemption de taille. Alors que le montant de la taille ne cessait de croître et le nombre d'assujettis de diminuer, cet impôt finit par ne plus peser que sur les roturiers les plus pauvres. L'injustice du système, dénoncée par Vauban au XVIIe s., suscita d'appréciables tentatives de réformes sous Louis XV, mais ne disparut qu'à la Révolution.
TAILLE. En France, à partir du XIVe siècle et sous l'Ancien Régime, impôt direct payé par les roturiers (et notamment les paysans), la noblesse et le clergé en étant dispensés. La taille fut d'abord exigée du seigneur pour prix de sa protection (taille seigneuriale, XIe XIIIe siècle). À partir de 1439, elle devint un impôt royal permanent et annuel destiné à entretenir l'armée. La taille était calculée en fonction des biens et des revenus présumés d'une personne (taille personnelle) ou en fonction des terres que cette personne possédait (taille réelle). Impôt injuste, différent selon les provinces et de plus en plus lourd, la taille était mal supportée et ses collecteurs haïs. Sa suppression fut demandée en priorité dans les cahiers de doléances en 1789. Voir Aides, Ferme générale, Révolution française, Seigneurie.