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SYMBOLE

SYMBOLE. n. m. (du grec "sumbolon", «signe de reconnaissance» : il s'agissait d'un objet partagé en deux moitiés, ce qui permettait aux personnes possédant chacune un morceau de l'ensemble de se reconnaître).
1° Dans le langage scientifique : signe conventionnel correspondant à une réalité abstraite, à une opération mentale, à un élément du monde physique, etc. Le signe « + » symbolise l'addition ; le signe «H» est le symbole de l'hydrogène ; la lettre «x» symbolise l'inconnue dans une équation. La capacité de symbolisation est liée, chez l'être humain, à la capacité d'abstraction.
2° Dans le langage littéraire ou esthétique : représentation concrète (par un objet, une image, un personnage, un récit) d'une réalité morale, invisible, abstraite, conceptuelle, en vertu d'un lien de nature métaphorique ou métonymique entre la chose représentée et le signe concret qui la représente. Ainsi, le drapeau est le symbole de la patrie ; la colombe, le symbole de la paix ; le serpent, le symbole de la tentation ; le récit de "La Peste" (Camus), le symbole du mal collectif et contagieux dans la cité ; un squelette tenant une faux, le symbole de la mort.
La genèse des symboles est semblable à la genèse du signe linguistique. Elle peut être purement conventionnelle, même si cette convention peut s'expliquer : le rouge symbolise l'interdiction par exemple (mais c'est peut-être qu'à l'origine, le rouge est la couleur du feu, qui brûle). Le symbole est souvent d'origine analogique (c'est-à-dire métaphorique) : c'est parce que la mort «fauche» les âmes qu'elle est représentée comme une faucheuse (cette personnification est une allégorie ; le processus d'élaboration est bien métaphorique). Mais le symbole peut aussi être le résultat d'une association d'idées ou d'images de nature métonymique : par exemple, le trône symbolise le pouvoir royal, l'autel symbolise le pouvoir de l'Église (un élément du tout suffit à désigner la réalité globale). L'emblème est un symbole en général collectif (voir ce mot : tous les emblèmes sont des symboles, mais la réciproque n'est pas vraie).
Voir: Métaphore et Métonymie.

Le symbole, quoi qu'il en soit, renvoie toujours à une autre réalité que lui-même : il figure, il représente. C'est ce qui permet d'élargir le sens du mot aux récits, aux scènes, aux évocations concrètes qui, en poésie, au théâtre, dans le roman, dans diverses productions esthétiques, ont une portée qui dépasse la seule lecture réaliste de ce qui est montré ou relaté. « L'Albatros » de Baudelaire, d'abord simple image du poète, prend tout à coup une portée symbolique en ce que l'on n'a plus besoin de la comparaison pour comprendre : l'Albatros devient symbole de la condition du poète. Un meurtre, dans un roman, au-delà de la simple élimination d'un homme, peut devenir le symbole d'une « libération » (comme c'est le cas dans "L'Étranger" de Camus) : un certain nombre de textes peuvent ainsi avoir une double portée à la fois réaliste (psychologique) et symbolique (métaphysique). Il faut souvent interpréter, décoder les signes, pour faire ressortir le sens symbolique de l'oeuvre.
On appelle symbole, en psychanalyse, le rapport constant entre certains éléments « muets » du rêve (c’est-à-dire qui ne donnent pas lieu à associations) et leur « traduction » typique. Le symbolisme est un mode particulier de la figuration indirecte.
Le symbole se donne comme un type de comparaison qui en fait un élément de la pensée inconsciente. Le rêveur ne (re)connaît pas, en effet, cette comparaison comme telle. De plus, le symbole concerne une batterie limitée d’objets (symbolisés) : le corps humain dans son ensemble, les parents, enfants, frères, la naissance, la mort, la nudité.


1. C’est ainsi la « maison » qui symbolise la personne ; les enfants sont symbolisés par de petits animaux, de la « vermine » ; les parents par de hauts personnages (Roi) ; la naissance a une relation avec « l’eau » ; la mort est rendue égale au départ, au « voyage »... Le domaine de la vie sexuelle donne lieu à un symbolisme extraordinairement riche et varié. Dans les deux sexes l’organe génital est symbolisé par le « Petit ». Les organes mâles sont symbolisés par la Trinité (le chiffre 3), la verge par la tige, l’arbre, l’arme, l’oiseau, le serpent, etc. L’organe femelle est la caverne, le vase, la porte, le bateau, le soulier, le bois, la table, le coquillage, la « bouche », le bijou, le paysage, le jardin, etc., etc. Les seins sont des « fruits » (pomme, poire...) ; les poils sont la forêt... La chute (extraction) d’une dent symbolise la masturbation, l’accouchement, la « castration ». Le rapport sexuel est symbolisé par l’équitation, l’ascension, l’écrasement...
Nombre de symboles apparaissent bisexuels et plurivalents. Ces équivalences symboliques ne sont pas le propre du rêveur. On les retrouve pour partie dans les contes, les mythes, le folklore, les proverbes, l’argot, les dérivations linguistiques (mais le rapport symbolique dépasse de loin les limites de la communauté linguistique). La connaissance des symboles prend ici sa valeur anthropologique.

2. Les études psychanalytiques post-freudiennes se sont essayées, avec un bonheur variable, à préciser la nature de l’identité conceptuelle qui est à la base de la pensée symbolique. Les rapports avec l’allégorie, la métaphore, l’emblème, etc., restent complexes et imprécis. Le symbole n’est pas seulement une représentation indirecte, mais une représentation indirecte dont l’un des termes est généralement inconscient (en ce sens, d’ailleurs, on peut élargir la notion du symbole et dire que le symptôme est « symbole » du désir, le contenu manifeste, le symbole du contenu latent du rêve, etc.).
Pour expliquer le symbole, on admet qu’il y a d’abord (principe du plaisir) une assimilation (identification ou projection) entre un élément de la réalité (étrangère, inquiétante, pénible, mais que l’on est contraint d’accepter) et une image libidinale avec laquelle peut exister une analogie formelle, aussi lâche soit-elle. Ceci rendrait les symboles potentiellement universels et subculturels. Dans un second temps le symbole est mis au service de la signification indirecte. La fonction défensive (inconsciente) serait donc subordonnée au « support » de la réalité permis par le symbolisme et ses usages (G. Röheim).

3. Dans la psychanalyse contemporaine, on appelle souvent « symbolique » le passage du système du plaisir/déplaisir (angoisse), caractéristique de la relation « duelle » à la mère et à son « imago » imaginaire, à un système où le désir est soumis à la loi (de l’interdiction de l’inceste) et à la « médiation » paternelle. Certains, après Lacan, évoquent ici l’« ordre » du langage et ses « signifiants-clés » : le phallus et le « nom-du-père ». Reprenant des considérations anciennes de Freud sur « l’appareil de langage », certains auteurs (R. Major) qualifient de « symboliques » les pensées intermédiaires (qui joignent la réalité externe et la « réalité psychique ») et de « connexions symboliques » ce qui garantit une partie préservée du Sujet contre la perte de l’objet.


SYMBOLE (n. m.) 1. — Étym. : objet coupé en deux, et permettant, par le rapprochement des deux moitiés, à des personnes qui en possèdent chacune une, de se reconnaître. 2. — Formulaire contenant les dogmes fondamentaux du christianisme. 3. — Tout ce qui représente ou qui signifie autre chose en vertu d’une analogie : « Intuition dont la détermination concrète propre est [...] plus ou moins le contenu qu’il exprime comme symbole » (Hegel) ; en ce sens, souv. opposé au signe ling. qui est arbitraire. 4. — Signe algébrique, c.-à-d. lettre ou figure représentant une chose, une qualité, une opération, un élément quelconque d’une classe déterminée, en vertu d’une convention arbitraire. 5. — Substitut du réel ne signifiant rien en lui-même : « La science positive travaille avant tout sur des symboles [...] la métaphysique est la science qui prétend se passer de symboles » (Bergson). 6. — Syn. signe. 7. — Symbolique : a) Qui utilise des symboles, en part, au sens 3 (une pensée symbolique, c.-à-d.- qui procède par images et analogies) ou au sens 4 (la logique symbolique), b) Qui n’a pas de valeur en soi-même : un geste symbolique, c) (Auj.) Qualifie tout ce dont la structure est du même type que celle du langage (caractère collectif et inconscient, préexistence de la totalité aux éléments, fonction de communication) : « Toute culture peut être considérée comme un ensemble de systèmes symboliques au premier rang desquels se placent le langage, les règles matrimoniales les rapports économiques, l’art, la science, la religion » (Lévi-Strauss). d) (n. m.) Terme introduit par Lacan pour désigner en gén. l’ordre des phénomènes inconscients en tant qu’ils sont structurés comme un langage, et en part, la loi qui fonde cet ordre : opposé à imaginaire, réel, e) (n. f. / class.) Etude des symboles au sens 4 ; pour Leibniz, Syn. de caractéristique univer selle ; (psychan.) ensemble des symboles (au sens 3) à signification constante qui peuvent être retrouvés dans toutes les productions de l’inconscient. Rem. : en gén., Syn. de symbolisme, excepté au sens a de ce mot. 8. — Symbolisme : a) Caractère de ce qui est symbole au sens 3. b) Emploi de symboles aux sens 3 ou 4. c) Etude des symboles au sens 3. d) École artistique et littéraire de la fin du XIXe siècle qui donnait pour but à l’art non de représenter mais de suggérer des sentiments, des états d’âme, e) Système de symboles au sens 3. f) Tout système conventionnel de notations algébriques (dont les interprétations restent indéterminées quoiqu’on fixe le domaine auquel elles appartiennent : par ex., les nombres, les propositions) ; (en part.) système utilisé pour formaliser les théories et qu’on s’astreint à manier conformément à des règles préétablies, c.-à-d. indépendamment de toute interprétation intuitive que les symboles sont susceptibles de recevoir.


[…] pas fait pour un métier comme un marteau est fait pour planter un clou. Si la main est le symbole de l’homme, c’est précisément qu’elle n’est pas un outil, mais un organe […]


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