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syllepse

La syllepse est un trope, qu’il est aisé de décrire rigoureusement. Elle consiste en ce qu’un terme, dans un discours, apparaissant dans le segment une seule fois, est pris en plusieurs sens, deux au moins, l’un tropique et l’autre pas, ou les deux tropiques mais différemment, de manière que l’on puisse suivre précisément dans le texte la relation que dessine l’un de ces sens avec tel ou tels mots particuliers du développement et celle que dessine par ailleurs l’autre de ces sens avec tel ou tels autres mots du développement. La syllepse diffère donc de l’antanaclase en ceci que le terme figuré n’est pas répété, et de l’allusion en ceci que l’on peut suivre en chaque cas les circuits sémantiques concrètement empruntés entre les mots du texte.
Ex. :
Figurez-vous qu ’elle était debout leur ville, absolument droite. New York c’est une ville debout. [...] Mais chez nous, n’est-ce pas, elles sont couchées les villes, [...] elles s’allongent sur le paysage, elles attendent le voyageur, tandis que celle-là l’Américaine, elle ne se pâmait pas, non, elle se tenait bien raide, là, pas baisante du tout, raide à faire peur.
Ce passage célèbre du Voyage au bout de la nuit de Céline est bâti sur une figure centrale : la métaphore de la femme pour la ville, qui se continue sur couchées - s’allongent sur- attendent le voyageur - se pâmait - raide - pas baisante. Mais si couchées fonctionne bien ainsi, selon la métaphore érotique de la femme prête à l’amour, par rapport à tous les termes que l’on a énumérés, le même mot est également lié, dans la syntaxe de la phrase et dans la cohérence du développement descriptif, à l’ensemble des occurrences et des constructions de debout, qui renvoie au simple sens de vertical dans le début de la phrase, sans connotation sexuelle. Deux circuits de significations sont donc dessinables très clairement, dans la géographie textuelle, à propos de couchées : il y a syllepse sur ce terme (si l’on se livrait à une lecture plus totalement sexuelle du texte, on aurait un troisième niveau de sens). La syllepse est le trope le plus puissant dans la mise en oeuvre poétique des images.
=> Figure, microstructurale, trope; continuée; métaphore, image; antanaclase, allusion.


SYLLEPSE nom fém. - 1. Syllepse grammaticale : procédé qui consiste, dans une phrase, à ne pas réaliser l’accord en fonction des règles strictes de la grammaire, mais en fonction du sens des termes. 2. Syllepse de sens : procédé qui consiste à employer un mot simultanément au sens propre et au sens figuré. ÉTYM. : du grec sullêpsis = « compréhension ». Au premier sens, la syllepse peut consister à mettre au masculin un adjectif qualifiant un mot de genre féminin, mais désignant une personne de sexe masculin. Exemple : « Cette sentinelle est courageux. » Au second sens, la syllepse est une forme du jeu de mots. Exemple : « Le comble pour un horloger, c’est de reculer devant une horloge qui avance. »

syllepse. Figure de style consistant à employer un mot simultanément au sens propre et au figuré ; comme dans cet exemple de Tacite (Annales, II, 29) : manus ac supplices voces... ten-dens (élevant les mains et la voix en geste de supplication). Cette figure est parfois appelée zeugma.



Syllepse. Trope par lequel un même mot est pris en deux sens différents, l’un propre, et l’autre figuré, dans la même phrase :
Pour couronner ma tête et ma flamme en ce jour. (Racine, La Thébaïde)
(couronner est pris au sens propre avec le premier complément et est métaphorique avec le second).