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Stade (du développement) / STADE ORAL / GÉNITAL / STADE DU MIROIR / STADE ANAL / STADE PHALLIQUE

stade, période du développement. La croissance intellectuelle et affective de l’être humain ne se fait pas régulièrement, selon un modèle linéaire, mais passe par certains stades qui, chaque fois, impliquent un progrès et une réorganisation de l’ensemble. Le développement intellectuel de l’enfant passe selon J. Piaget par cinq étapes bien définies : 1. une période sensori-motrice (qui va de la naissance à deux ans), au cours de laquelle l’enfant forme le concept d’objet à partir de perceptions fragmentaires et son moi, distinct de l’image des autres ; 2. un stade préopératoire (de deux à quatre ans), dominé par une pensée essentiellement égocentrique et anthropomorphique ; 3. une époque intuitive (de quatre à sept ans), de réalisation intellectuelle sans raisonnement : l’enfant exécute des actions qu’il est incapable de se représenter clairement en pensée ; par exemple, lorsqu’il transvase un liquide dans un récipient de forme différente, il croit que le volume change avec la forme ; 4. un stade des opérations concrètes (huit à onze ans), où, malgré l’acquisition de certaines notions (classe, série, nombre, causalité), la pensée reste liée au concret ; 5. une période des opérations formelles (qui apparaît aux environs de la puberté) ; la pensée opère dans l’abstrait, forme des hypothèses et les vérifie. Les psychanalystes décrivent aussi cinq stades fondamentaux dans le développement affectif de l’enfant, qui se rapportent aux zones érogènes sur lesquelles se fixe successivement l'énergie sexuelle avant d’arriver à maturité : 1. le stade oral (première année de la vie, où la grande volupté naît de la bouche) ; 2. le stade sadique-anal (deuxième et troisième année), où l’intérêt se déplace sur les fonctions d'excrétion ; 3. le stade phallique (quatrième et cinquième année) : les parties génitales deviennent prévalentes ; 4. la période de latence (de la sixième année à la puberté), où l’on assiste à un assoupissement de la pulsion sexuelle sous l’effet des instances socioculturelles ; 5. le stade génital (qui correspond à la puberté), où la sexualité apparaît sous sa forme adulte. Ces différents stades ne sont pas rigides ; ils se chevauchent et n’apparaissent pas chez tous les sujets à des dates précises. D’un individu à l’autre, on observe des différences, parfois importantes, qui sont dues aux conditions héréditaires et à celles du milieu (climat, culture...)

développement, série d’étapes par lesquelles passe l’être vivant pour atteindre son plein épanouissement. Chez l’homme, le développement n’est pas réductible à la seule croissance. Sous l’influence des conditions physiologiques et socio-affectives, de nouvelles formes de fonctionnement apparaissent qui conduisent le nourrisson soumis au principe de plaisir (enfermé dans la seule recherche de la satisfaction de ses besoins) à l’état d’adulte aux prises avec la réalité. Progressivement, le comportement se différencie et l’être humain devient plus indépendant des contingences extérieures. Par exemple, le bébé réagit à la douleur par l’agitation de son corps tout entier, alors que l’enfant plus âgé se contente de soustraire le segment du corps affecté par l’excitation. Chaque être humain a un rythme de croissance qui lui est propre ; on y remarque des poussées rapides, des paliers, des retours en arrière, mais pratiquement jamais un développement linéaire. Cependant, il existe un certain nombre de lois valables pour tous. Par exemple, il a été établi que le développement psychomoteur suit un axe « tête-pied » (encore appelé axe céphalo-caudal), c’est-à-dire que la maturation du système nerveux se réalise de telle façon que l’enfant acquiert d’abord le contrôle de la tête, puis des membres supérieurs, enfin celui des membres inférieurs. L’utilisation des baby-tests permet aux psychologues de savoir si le développement des bébés s’effectue normalement Les meilleures conditions pour que celui-ci se déroule harmonieusement sont : une bonne hygiène, une ambiance stable et chaleureuse, et des soins affectueux.

Stade (du développement) Encore dénommé stade libidinal. Étape du développement de l’enfant correspondant à une organisation de la libido caractérisée par la dominance d’une zone érogène et d’un mode de relation d’objet. Au cours de l’évolution de l’enfant, il y a un abandon successif de certaines zones érogènes. Au début de la vie de l’enfant, «l’activité sexuelle s’étaye sur une des fonctions servant à la conservation de la vie et ne s’en affranchit que plus tard». Dès lors, les lèvres, la cavité buccale auront «tenu le rôle d’une zone érogène». Le premier stade est le stade oral ; la pulsion partielle est orale, l’objet le sein. Le but sexuel réside dans l’incorporation de l’objet, ce qui servira de prototype plus tard à l’identification. Le suçotement que l’on observe chez les enfants est un reliquat de ce premier stade. Le stade suivant est le stade anal ; il est comme le précédent le lieu d’une activité auto-érotique. La zone érogène est l’anus et l’objet les fèces. Le stade anal est lié à l’éducation sphinctérienne et correspond à l’opposition entre actif et passif. Enfin, le stade d’objet génital qui se fait en deux temps : une première période entre deux et cinq ans, puis la seconde à la puberté, séparée par la période de latence. Abraham développera cette succession en introduisant de nouvelles subdivisions. Melanie Klein proposera, pour rendre compte des tout premiers temps, de distinguer une position paranoïde-schizoïde et une position dépressive.

GÉNITAL

On appelle stades prégénitaux le stade oral, le stade anal et le stade phallique, et l’on appelle stades génitaux le complexe d’Œdipe, la période de latence, la puberté. Le complexe d’Œdipe marque donc, dans le développement psychosexuel de l’individu, l’entrée dans un mode de sexualité proprement géni­tale, c’est-à-dire où les organes génitaux sont appelés à jouer le rôle principal, par opposition aux stades antérieurs, caractérisés par le primat de la zone buccale ou anale comme sources des pulsions érotiques.

Par extension, on parlera de choix d’objet génital, ou d’amour génital, pour désigner les relations accessibles au sujet parvenu au terme de son développement psychosexuel.

GENITAL (adj .) Qui concerne la fonction ou les organes de la reproduction. En psychan., opposé à sexuel.

génital (stade), dernier stade du développement sexuel de l’être humain, caractérisé par le primat des organes génitaux. On distingue deux phases dans ce stade. La première, précoce, se situe approximativement entre trois et cinq ans ; elle correspond à la phase phallique au cours de laquelle l’enfant, renonçant aux satisfactions des stades précédents (oral et sadique-anal), s’affirme en tant qu’être sexué. La seconde est plus tardive ; elle s’instaure après la période de latence, au moment de la puberté, et correspond à l’organisation définitive de la sexualité, dans sa forme adulte, propre à la génération. Pour certains auteurs, seule cette seconde phase mérite d’être appelée stade génital. Ils considèrent que l’organisation génitale infantile (phase phallique) n’est, en réalité, qu’une organisation prégénitale, au même titre que les phases orale et sadique-anale, car les pulsions partielles ne s’unifient et ne s’organisent définitivement qu’à la période pubertaire.

STADE On appelle stade les différentes phases du développement psychosexuel de l’individu. Chaque stade (stade oral, stade anal, stade phallique) correspond à une certaine période de la vie, mais, en réalité, les différents stades se chevauchent, et certains aspects du développement de la libido peuvent rester fixés à un stade donné, ou même régresser à un stade antérieur, tandis que d’autres éléments évoluent. C’est ainsi que dans chaque personnalité on peut retrouver des traces de l’organisation libidinale propre à un stade donné. La névrose obsessionnelle, par exemple, se définit par un certain nombre de caractéristiques qui relèvent du stade anal.

STADE ANAL Deuxième stade du développement psychosexuel, il intervient au cours de la deuxième année. La pulsion prend naissance dans le besoin physiologique de déféquer. Elle se caractérise par la prévalence du boudin fécal comme objet libidinal, de l’anus et de la zone anale comme zone érogène principale, de l’expulsion et de la rétention comme activités érotiques. Partie de son propre corps, le boudin fécal constitue pour l’enfant une monnaie d’échange avec les autres, d’autant plus que les adultes accordent un intérêt certain aux fèces de l’enfant. C’est lors du stade anal que se structure, dans la vie psychique de l’individu, l’opposition entre tendance active et tendance passive de la pulsion. On parlera d’activité pour décrire la tendance de l’enfant à expulser son boudin fécal, et de passivité dans le cas de la rétention des excréments. Expulser le boudin fécal comporte un aspect sadique dans la mesure où cet acte s’assimile à une destruction, tandis que le retenir peut être assimilé à un comportement masochiste, dans la mesure où le plaisir de la rétention s’accompagne d’une certaine douleur. C’est pourquoi on parle d’ambivalence pour qualifier la libido du stade anal.

Anal (stade) : Seconde étape de l’organisation sexuelle infantile (voir oral, œdipe, phallique, urétral). Selon la psychanalyse, entre 2 et 4 ans, correspond à l’acquisition de la maîtrise musculaire et au contrôle du sphincter anal. Le plaisir est lié à l’activité d’expulsion et de rétention des matières. L’agressivité et la culpabilité dépendent de l’affrontement au dressage à la propreté et à ses échecs. Les difficultés de cette période pourraient modeler la personnalité en lui imposant des schémas rigides et obsessionnels concernant la saleté et la propreté, la souillure, l’ordre et la méticulosité, ou en orientant la sensualité dans le sens sadomasochiste.

Sadique-anal (stade), dans la théorie psychanalytique, deuxième stade du développement sexuel de l'enfant, s'étendant aux deuxième et troisième années. La satisfaction de la poussée libidinale est conditionnée par l’évacuation intestinale : la muqueuse anale est devenue zone érogène ; l’enfant s’intéresse à ses matières sous l’incitation de ses parents, impatients de le voir devenir propre. La maîtrise de ses sphincters lui donne un nouveau pouvoir, celui de satisfaire les adultes ou, au contraire, de manifester son agressivité à leur égard. L’acquisition de la propreté est le premier cadeau que l’enfant fait à sa mère, mais il est toujours prêt à le reprendre s’il se trouve frustré (à la naissance d’un petit frère ou d’une petite sœur, par exemple, il recommence à se salir).

STADE DU MIROIR Ce concept célèbre formé par Lacan en 1936 intervient dans l’explication de la formation du moi, du narcissisme primaire et des identifications secondaires. Le stade du miroir correspond, dans le développement psychique de l’enfant, à la période comprise entre six et dix-huit mois. Il se manifeste par une jubilation de l’enfant à se reconnaître au milieu des autres (dans les bras de la mère), et comme distinct (avant le stade du miroir, l’enfant ne fait pas de distinction entre son corps et le corps de sa mère). Sorte d’identification de l’enfant à sa propre image, mais par le relais nécessaire du regard d’un autre (que Lacan appelle le grand Autre, en l’occurrence la mère) qui, par ses mots (« c’est toi », « c’est Laurent » ou « c’est Sarah »), réalisera l’identification du sujet à l’image regardée. Le stade du miroir joue un rôle important dans la formation de l’identité, qui est fondamentalement aliénée, dans l’agressivité (nécessité de gagner sa place au milieu des autres), dans le désir, puisque l’objet du désir y est toujours l’objet du désir de l’autre.

STADE ORAL Premier stade du développement psychosexuel, il intervient environ la première année, de la naissance jusqu’au sevrage. Le stade oral, où la pulsion prend naissance dans le besoin physiologique de se nourrir, se caractérise par la prévalence du sein comme objet libidinal, des lèvres et de la zone buccale au sens large comme zone érogène principale, et de la succion comme activité érotique. Le but de la pulsion est l’incorporation, et les objets du monde extérieur ne se distinguent pas encore du moi. La satisfaction libidinale étayée par le besoin d’être nourri va progressivement s’en détacher, et va pouvoir être obtenue indépendamment du processus de la nutrition, par exemple par le suçage du pouce. L’objet de la pulsion est naturellement le sein maternel, objet originel, prototype de tous les objets de désir à venir.

oral (stade), première phase du développement de la sexualité infantile (première année de la vie environ), où le plaisir essentiel est procuré par la tétée, associée à l’incorporation sensorielle (visuelle, auditive, cutanée) de l’image maternelle. La présence de la mère, source de satiété et de quiétude, s’accompagne d’une intense satisfaction. Son absence est frustrante. Le nourrisson, dans cet état de tension, recherche la détente dans la succion des doigts.

STADE PHALLIQUE Troisième stade du développement psychosexuel, il intervient après la troisième année et représente la résolution des stades oral et anal. Le stade phallique se définit par l’unification relative des pulsions et leur organisation sous le primat des organes génitaux, à savoir le phallus. A ce stade, en effet, il apparaît que le phallus est le seul représentant sexuel pour les individus des deux sexes (ce référent unique du phallus pour les deux sexes est contesté par certains auteurs. Cette phase se caractérise par l’apparition de la masturbation (ce en quoi certains auteurs voient une des causes de l’amnésie infantile), par l’apparition du fantasme de la scène primitive et de l’instinct de voyeurisme, et enfin par la découverte de la différence des sexes, entraînant le complexe de castration. C’est au terme de la phase phallique que survient, selon Freud, le complexe d’Œdipe.

phallique (Stade), période du développement psychosexuel de l’enfant succédant aux phases orale et sadique-anale. Elle se situe entre 3 et 5 ans et se caractérise, dans les deux sexes, par la prédominance du phallus. À ce stade, les parties génitales deviennent la principale zone érogène et mobilisent l’attention de l’enfant. Celui-ci, voulant retrouver les stimulations agréables provoquées par les soins physiques donnés par sa mère, touche à son tour, pour le plaisir, ces parties de son corps (masturbation). À cette même époque s’édifient les relations décrites par S. Freud sous le nom de complexe d’Œdipe, et naît l’angoisse de castration.

STASE LIBIDINALE Expression employée par Freud pour désigner l’état de la libido quand elle ne peut plus se décharger et qu’elle s’accumule sur des formations intrapsychiques.


Le stade anal représente, avec le stade oral, l’une des deux grandes organisations prégénitales de la libido. En marge de l’activité d’excrétion, et en corollaire de la sensibilité de la muqueuse, se développe une frange érotique qui donne lieu à des fantasmes de rétention/expulsion. Ceux-ci sont au cœur des représentations d'activité et de passivité (prenant une coloration sado-masochique). Ces représentations apparaissent fondatrices, en fonction des contraintes de l’apprentissage de la propreté, d’une « relation d’objet partiel » sur laquelle s’appuient les pulsions de maîtrise, de domination, et les conflits d'indépendance/soumission et d’ambivalence.

1. Dans le cadre de l’érotisme anal, les selles sont considérées non point comme un objet de dégoût, mais comme une possession hautement valorisée narcissiquement et dont on entend disposer « souverainement » (l’enfant sur le « trône »). Les produire à la demande, pour l’amour d’un autre, est le prototype inattendu de tout « cadeau », comme le symbole des « échanges » ultérieurs (l’« argent n’a pas d’odeur »...). La maîtrise du contenu intestinal est à l’origine de toute représentation de « compétence » et fournit l’énergie des « productions » consécutives. Il n’est jusqu’aux aspects formels de l’apprentissage sphinctérien (isolement, délai) qui ne serve, avec le couple retenir/rejeter, de modèle au fonctionnement intellectuel comme aux mécanismes de la défense contre les pulsions. On en retrouve des indices dans le langage (arbitraire/ code, négation et... contrepèteries). Les selles, ou leurs représentants fantasmatiques, peuvent encore être mises au service de l’opposition et de l’attaque : la scatologie agressive de l’adulte courroucé en porte témoignage (mot de Cambronne).

2. Le mélange contradictoire d’obéissance/révolte, d’égocentrisme narcissique (bouderie, volontarisme autarcique) et d’ouverture à l’échange (don) de cette phase est propice à engendrer de nombreux effets. Par exemple, la tendance au doute (que l’on retrouvera régressivement dans l’obsession, où l’on voit d’ailleurs la défense contre les représentations sadiques destructrices issues de la régression du sexuel vers l’anal). L’érotisation excessive d’une zone (anale) commune aux deux sexes est encore l’une des conditions de l’homosexualité. Le surinvestissement de l’activité est, quant à lui, une origine du sadisme clinique (indifférence au traitement de l’objet « fécalisé »), tandis que, dans la soumission à la demande, s’instaure la composante masochique. Ces plaisirs et angoisses d’agir et d’être agi sont une des bases de nombreux conflits psychiques et culturels à variante persécutive, mais aussi à investissements rituels et « magiques ». Certains auteurs (K. Abraham) tracent la limite de l’organisation psychotique dans une première phase anale expulsive (« destructrice » « projective »), tandis qu’avec la seconde phase anale (« rétentive ») prendrait place un début de considération objectale, de « conservation » des investissements, de « retenue » des représentations. La prise en chaîne symbolique de l’« objet partiel » anal conservé (puis échangé) entre dans la première imagination d’une relation sexuelle (selon les équations durables : rectum = vagin, fèces = pénis, contenu intestinal = enfant) et supporte, avec une tonalité sadique, les premiers fantasmes de « Scène Primitive » (relations sexuelles parentales)...

3. L’érotisme anal laisse de nombreuses traces dans la vie sexuelle adulte, bien que sa reconnaissance soit l’une des sources les plus vives de résistance à la psychanalyse. Outre les pratiques perverses, les « jeux » acceptés, les plaisanteries « osées », il se traduit par la complaisance durable pour les propres fonctions d’excrétions, évidemment inhibées par rapport au plaisir franc chez l’enfant de souiller, d’éclabousser, de manipuler la saleté. Les composantes anales érotico-sadiques sont, il est vrai, surtout à l’origine de formations réactionnelles caractérielles persistantes (ordre, propreté, pitié). Un retour du refoulé se voit dans la « constipation » avaricieuse, dans l’obstination bornée, et (plus gravement) dans les opportunités collectives de satisfaction des pulsions primitives. (Auschwitz : « L’anus du monde »).


Le stade oral représente la première organisation de la sexualité prégénitale infantile, le premier regroupement des autoérotismes partiels sous une « dominante » et un régime fonctionnel : celui d’une sexualité à but incorporatif (dont le « prototype phylogénétique » se trouve chez les protistes). Ce régime restera une composante de la sexualité génitale définitive.

1. La « cavité primitive » (le cavum, la bouche), en ses fonctions de conservation - appuyées de l’œil et de la main qui l’assistent dans les activités d’incorporation (Spitz, Höffer) - est un lieu où s’entrecroisent le circuit vital (manger), le circuit du plaisir (qui en fait une « zone érogène ») et le premier circuit de la relation d’objet (morsures, baisers, sons).

En marge de l’activité orale, se différencie alors un auto-érotisme zonal qui se supporte des fantasmes libidinaux d'introjection d’un objet partiel (le sein, le biberon), puis « total », sur lequel sont (re)projetées des qualités « bonnes » ou « mauvaises » (M. Klein), sur le modèle de l’assimilé/recraché. Il y a là le prototype des futurs jugements de valeur et de la morale (« remords »), comme du jugement d’attribution (moi/non moi) qui peut être ramené ici à sa base érotique. La charge en plaisir (et l’expérience de la frustration) au niveau de l’oralité permet encore d’accéder à la notion de frontières du Moi (intérieur/extérieur), de lieu de passage (mouvement transactionnel), tandis qu’elle prépare l’instauration du langage.

2. Le signe extérieur de l’activité « auto-érotique » orale est le suçotement des lèvres (de la langue, du pouce, etc.), par le nourrisson, dans les intervalles de la satisfaction conservatoire. Cette activité débouche régulièrement sur un premier régime masturbatoire. Ultérieurement, la psychanalyse retrouvera régulièrement les fantasmes d’introjection, les angoisses projetées de dévoration, reliables à ce stade (« cannibalisme »), et aussi la dérivation des fantaisies orales d’objet partiel vers d’autres satisfactions, témoignant ainsi (cunnilingus, fellatio) de l’unité de la sexualité. La pratique persistante de baiser amoureux, la relative sublimation du « gourmet », le plaisir du fumeur, un certain nombre de préliminaires érotiques ou de pratiques sexuelles, qu’on peut à peine dire « perverses », témoignent de la persistance de la sexualité orale dans l’évolution libidinale. Dans les deux sexes, la réunion des « parties » génitales (pénis/vagin) se double toujours de l’ancien vœu d’union totale sein/bouche, témoignant de la valeur de « restauration narcissique » (plénitude prénatale rétro-projetée) que visait déjà à instituer la « libido orale ». Jusque dans « l’introjection » où se répète, au plan psychologique, dans l’assimilation, la « symbiose » mère-enfant.

3. L’introjection (fantasmatique) semble être le support érotique commun de l’identification (similitude). En fait, l’« introjection » représente le mécanisme psycho-sexuel de cet état du Moi : l’identification. Les identifications secondaires, liées à la perte, ou au renoncement, aux objets significatifs investis, passent par la régression vers le mécanisme d’introjection orale. Ce procédé est illustré à la lettre dans les fantasmes propres à certaines conditions pathologiques (mélancolie), mais aussi bien au niveau du rituel symbolique (identité d’essence avec le Christ dans la communion, et sa « transsubstantiation »...).

4. Dans le cadre de la théorie de la libido, K. Abraham a voulu introduire une subdivision dans le stade oral (autour de la poussée dentaire). Il y aurait un stade oral « pré-ambivalent » (celui auquel se rattacheraient les aspirations nirvaniques fusionnelles du... suicide) et un stade sadique oral (dont la conflictualisation serait à la base des fixations prédisposant à la mélancolie).

Quoi qu’il en soit, et pour nous en tenir au niveau de l’expérience relationnelle banale (normale), il reste de la phase orale que, toute la vie, il y a des plaisirs que l’on goûte, des pratiques qui dégoûtent, des gens que l’on vomit... En somme, l’homme a une bouche, mais il ne vit pas que de pain.

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