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Spinoza: Peut-on à la fois obéir et être libre ?

Spinoza: Peut-on à la fois obéir et être libre ?

Traité des autorités théologiques et politiques (1670)

[...] On estime esclave celui qui agit par commandement et libre celui qui gère sa vie à sa guise ; ce qui cependant n'est pas absolument vrai. Car en vérité, celui que son désir entraîne ainsi et qui est incapable de voir ce qui lui est utile et de le faire, est au plus haut point un esclave ; seul est libre celui qui vit de tout cœur uniquement sous la conduite de la raison. Une action faite par commandement, c'est-à-dire l'obéissance, supprime bien la liberté d'une certaine façon, mais elle ne rend pas sur-le-champ esclave : c'est le principe de l'action qui rend tel. Si la fin de l'action n’est pas l’utilité de celui-là même qui agit mais de celui qui commande, alors l'agent est esclave et inutile à soi-même. Mais dans une république et un État où le salut du peuple tout entier, et non pas celui du chef, est la loi suprême, celui qui obéit en tout au pouvoir souverain ne doit pas être appelé un esclave inutile à soi-même, mais un sujet. Donc est la plus libre la république dont les lois sont fondées sur la saine raison car là, chacun peut être libre quand il veut, c’est-à-dire vivre de tout cœur sous la conduite de la raison. Ainsi encore des enfants, même tenus d’obéir à tous les ordres de leurs parents, ne sont pourtant pas esclaves, car les commandements des parents concernent principalement l'utilité des enfants. Nous reconnaissons donc une grande différence entre l'esclave, le fils et le sujet, et nous les définissons ainsi : l'esclave est celui qui est tenu d'obéir aux ordres d'un maître, ordres qui ne concernent que l'utilité de celui qui commande. Le fils est celui qui fait, par ordre de son père, ce qui lui est utile. Le sujet, enfin, est celui qui fait, par ordre du souverain, ce qui est utile à la communauté et, par conséquent, à lui aussi.

Avez-vous compris l'essentiel ?

1 En quoi consiste la liberté pour Spinoza ? 2 Perd-on sa liberté en obéissant ? 3 Pourquoi celui qui est captif de son plaisir n’est-il pas libre ?

1 - À vivre sous la conduite de la raison, sans être esclave de ses plaisirs ni de ses désirs, sans vivre sous la domination d'autrui. 2 - Uniquement si le but de l’action commandée concerne l’intérêt exclusif de celui qui commande, plutôt que l'intérêt de tous ou de celui qui est commandé. 3 - Parce qu’il est incapable de rien comprendre ni de rien accomplir qui lui soit vraiment utile.

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