Spécisme et Antispécisme
SPECISME ET ANTI-SPECISME
LES DUALISTES, PARTISANS DE LA FRONTIERE HOMME-ANIMAL (spécistes)
LA GENESE: C'est dans l' « Ancien Testament » qu'on trouve, avec la Création, le fondement théologique de la séparation entre l'homme et l'animal. Au quatrième jour. Dieu crée les animaux aquatiques et les oiseaux ; au cinquième jour, les animaux terrestres. Le lendemain, « Dieu dit: Faisons l'homme à notre Image, selon notre ressemblance, et qu'il domine sur les poissons de la mer; sur les oiseaux du ciel sur le bétail sur toute la terre et sur tous les reptiles qui rampent sur la terre » (1. 20-27).
LE STOICISME: Pour les stoïciens, l'homme est capable d'actions produites par sa raison et sa volonté, alors que l'animal est toujours contraint par la nécessité naturelle, par l'« instinct ». Certes, capable de sensations, l'animal reste exclu, de Chrysippe à Sénèque, de la société des êtres de raison qui regroupe les hommes et les dieux.
RENE DESCARTES (1596-1650): Jusqu'à Descartes, personne ne nie que les bêtes aient
une âme : la querelle porte sur la faculté de l'âme des bêtes à accéder aux plus hautes fonctions de la raison humaine. Chez Descartes, l'âme n'a plus de fonction vitale, son seul attribut est la pensée. Il assimile donc les animaux à des machines très sophistiquées, produites par Dieu. Seul l'homme est doué d'une raison, dont la parole est la manifestation.
EMMANUEL KANT (1724-1804): Dans la « Critique de la raison pratique », Emmanuel Kant fait de la moralité le critère de la différence radicale qui sépare l'homme de l'animal. L'homme, contrairement l’animal, est capable de choix rationnel et d'action morale. Kant fonde l'humanité sur la loi morale, qui est comme la marque de Dieu en l'homme et lui confère sa dignité.
MARTIN HEIDEGGER (1889-1976):
L'homme n'est pas un animal « plus » (langage, raison…), c'est un existant, « toujours déjà » projeté dans un monde. L'animal reste « pauvre en monde », qui ne se représente pas le monde dans son ensemble, mais évolue dans un « environnement ». « La pierre est sans monde, l'animal est pauvre en monde, l'homme est configurateur de monde » (« Les Concepts fondamentaux de la métaphysique »).
LES CONTINUISTES, OPPOSANTS À LA FRONTIERE HOMME-ANIMAL (anti-spécistes)
ARISTOTE (384-322 av. J.-C.): Pour les Grecs antiques, tout ce qui vit est pourvu d'un principe vital, la « psyché », terme que nous traduisons par « âme », du latin anima, d'où dérive « animal ». Dans le « Traité de l’âme », Aristote explique que la plante, qui n'est capable que de se nourrir et de se reproduire, est douée d'une lime végétative; l'animal, qui possède sensation, désir et mouvement, a une âme sensitive; l'homme, enfin, a une pensée, donc une âme intellective. De la plante à l'animal et à l'homme, il y a à la fois continuité et hiérarchie. De plus, l'homme appartient aux espèces grégaires et se donne une organisation sociale, c'est pourquoi il est un « animal politique » (« Politique »).
PLUTARQUE (50-125): Il s'est opposé aux théories stoïciennes sur la prééminence de l'homme. D'après ses observations, les animaux font des actions qui témoignent d'une intelligence et d'une réflexion similaires à celles de l'homme. Dans le dialogue « Que les bêtes brutes usent de raison » (Œuvres morales), Il conclut à la supériorité de celles-ci sur le plan de la fidélité, de la tempérance ou encore de l'amour pour leur progéniture.
MONTAIGNE (1533-1592): Dans son « Apologie de Raymond Sebond » (« Essais » Il, 12), Montaigne remet en cause la prétendue supériorité de l'homme sur les animaux et évoque la profonde parenté entre les deux règnes. Il soutient que les bêtes manifestent une certaine capacité à apprendre, à raisonner, et même à discourir. En attestent l'habileté avec laquelle l'araignée tisse sa toile ou l'aisance avec laquelle le merle siffle.
CHARLES DARWIN (1809-1882): Onze ans après De l'origine des espèces (1859), qui fonde
la théorie de l'évolution et de la sélection naturelle, Charles Darwin provoque de vives polémiques en publiant « La Filiation de l'homme ». Il s'appuie sur des comparaisons anatomiques pour démontrer le rattachement généalogique de l'homme à la série animale. et sa filiation à partir d'un ancêtre lié aux singes catarhiniens de l'Ancien Monde.
SIGMUND FREUD (1856-1939): Dans « Malaise dans la civilisation », la séparation de l'homme d'avec son animalité se poursuit encore. Nous sommes toujours, pour Freud, des animaux. Ce processus inachevé de « désanimalisation », ce processus de civilisation, passe par un refoulement de plus en plus fort de nos pulsions. Indispensable à une vie citadine, à la division du travail et à l’économie de marché, ce renforcement du surmoi a son envers : l'intériorisation des contraintes produit culpabilités et névroses.