sommeil

sommeil, état physiologique, survenant périodiquement, caractérisé par la réduction de l’activité, le relâchement du tonus musculaire et la suspension de la conscience. W. Dement et N. Kleitman ont décrit deux types de sommeil, objectivés par les tracés électroencéphalographiques (E.E.G.) : le sommeil à ondes lentes (ou « sommeil lent ») et le sommeil à ondes rapides, encore appelé « sommeil paradoxal » (M. Jouvet) ou « phase de mouvements oculaires rapides » (P.M.O). Le sommeil lent se divise en 4 stades : l’endormissement ; le sommeil léger ; le sommeil moyen ; le sommeil profond (tracé continu d’ondes delta). Le sommeil rapide est dit « paradoxal » parce que le tracé EEG est proche de celui de l’éveil, bien que le sommeil soit profond (des stimulations très fortes sont nécessaires pour réveiller le dormeur à ce moment). Les périodes de rêve sont concentrées essentiellement en P.M.O. La première phase de sommeil paradoxal dure environ 15 minutes et marque l’achèvement du premier cycle du sommeil. Au cours d’une nuit, chez l’homme normal, on observe de 4 à 6 cycles successifs de sommeil lent et de sommeil rapide. Chaque cycle dure en moyenne de 90 à 120 minutes. Le besoin de dormir est vital : un animal qui en est empêché meurt. La privation de sommeil rapide entraîne des troubles psychiques pouvant aller jusqu’à la psychose. Chez l'enfant, un manque de sommeil répété est la cause de l’instabilité du comportement et de troubles caractériels tels que des accès d’agressivité alternant avec des périodes d’isolement (H. Monta-gner, 1988). D’autre part, il existe une corrélation, sinon un lien causal, entre la durée du sommeil et les résultats scolaires : 61 % des enfants qui dorment moins de huit heures ont un retard d'au moins un an (H. Poulignac, 1979).

SOMMEIL. Servant au repos et à ta détente, le sommeil obéit à un mécanisme d’autorégulation imposé à l’être par l’évolution. Il rapproche de l’état de repos toutes les activités corporelles et psychiques. Ce qui distingue le dormeur du sujet éveillé est sa distance concrète qui le sépare des problèmes du jour de la réalité. C’est ainsi que la fonction onirique peut se donner libre cours. Par ces productions, les rêves, le sujet trahit sa prise de position vis-à-vis d’un problème présent ou futur. La ligne dynamique de la personnalité s’y retrouve aussi bien que dans les manifestations de l’état de veille. Les neurophysiologues distinguent différentes phases dans l’évolution du sommeil. Les enregistrements électroencéphalographiques décèlent des modifications des ondes suivant ces phases et aussi au moment de l’activité du rêve.

SOMMEIL (Psychophysiologie du sommeil et du rêve). Etat physiologique de repos particulier, caractérisé notamment par la perte de la « réactivité critique », c’est-à-dire de la « capacité d’élaborer des réactions appropriées à un complexus donné de circonstances » (Pieron). La réversibilité immédiate du sommeil le différencie radicalement des états de syncope, de narcose ou de coma. Le développement des techniques électrophysiologiques a permis d’objectiver différents niveaux ou stades au cours du sommeil, et plus récemment, de mettre en évidence des critères objectifs de l’activité « onirique ».

I. Phénoménologie des états de sommeil.

A. Le sommeil à ondes lentes ou sommeil classique.

Cet état est essentiellement caractérisé par l’immobilité relative du dormeur, la relaxation musculaire, l’installation de rythmes cardiaque et respiratoire lents et réguliers et la diminution de la pression artérielle. Des mouvements pendulaires lents des globes oculaires peuvent apparaître. Une certaine tonicité musculaire est conservée, autorisant le développement d’épisodes moteurs tels que les changements de position du corps, les automatismes gestuels (jac-tatio capitis), verbaux (somniloquie) et ambulatoires (somnambulisme). C’est également pendant le sommeil classique que survient l’énurésie. Du point de vue neuro-électrique, on assiste à l’envahissement progressif de l’électroencéphalogramme par des ondes lentes de grande amplitude, permettant de définir un certain nombre de stades de profondeur croissante (notés chez l’homme de I à IV) objectivée notamment par l’augmentation parallèle des seuils d’éveil, l’augmentation de la résistance électrique de la peau et la diminution de l’activité unitaire des neurones. On voit qu’il s’agit là d’un tableau correspondant à l’idée classique que chacun se fait du sommeil : un état de relaxation profonde durant lequel l’ensemble des systèmes organiques fonctionne au ralenti.

B. Le sommeil « paradoxal » ou « rêve ».

L’enchaînement harmonieux des différents stades du sommeil à ondes lentes conduit normalement à l’apparition d’un état psychophysiologique radicalement différent de ce qui vient d’être décrit. Cet état se caractérise notamment par la résolution complète du tonus musculaire, l’apparition phasique de clonies des extrémités, une grande instabilité des rythmes cardiaque et respiratoire et de la tension artérielle, le déclenchement phasique de mouvements oculaires rapides généralement groupés en bouffées et, chez l’homme, l’installation d’une érection pénienne tonique caractérisée. Du point de vue neuro-électrique, le sommeil paradoxal se manifeste par l’apparition d’un tracé électroencéphalographique rapide et de faible amplitude, souvent paradoxalement proche du tracé d’éveil, témoignant d’une activation quasi généralisée de l’encéphale, objectivée en outre par l’augmentation de l’activité unitaire des neurones, l’accroissement de la consommation cérébrale en oxygène et en glucose, l’augmentation de la température cérébrale et la diminution de la résistance de la peau. On comprend aisément qu’un tel « orage cérébral », survenant au cœur d’un sommeil considéré jusque-là par tous comme un état homogène de repos, ait semblé paradoxal à ceux qui l’ont découvert. La phase paradoxale du sommeil, ou sommeil paradoxal, est encore dénommée Phase des Mouvements Oculaires (P.M.O.) ou Rapid Eye Movement Sleep (R.E.M.S.). Contrairement à ce qui a été décrit pour le sommeil classique, on a ici le tableau d’une intense activation neurobiologique dont l’expression comportementale est interdite par le blocage du système moteur. La question de la profondeur de cet état de sommeil par rapport aux différents stades du sommeil classique n’a pu recevoir de réponse univoque, compte tenu du caractère même « d’éveil intérieur » de la phase paradoxale.

C. Sommeil paradoxal et rêve.

S'il est vrai que statistiquement un plus grand nombre de sujets affirment avoir rêvé lorsqu’ils sont réveillés pendant ou immédiatement après un épisode de sommeil paradoxal que lorsqu’ils sont réveillés en sommeil classique, il ne faudrait pas en conclure que le sommeil paradoxal intègre la totalité de l’activité mentale ou psychique du sommeil, ou qu’il en a l’exclusivité. Une certaine activité mentale se rencontre tout au long des différents stades du sommeil lent, mais son contenu et sa dynamique interne sont différents de ceux qui caractérisent l’activité de l’appareil psychique durant la phase « paradoxale », dont on peut dire qu’elle est, à ce moment, plus proche de ce qu’il est convenu d’appeler < rêve >. Virel et Fretigny (1968) ont émis des réserves sur les déductions faites à partir de la relation établie entre la fréquence des rêves et la phase paradoxale : « L’ensemble des recherches physiologiques sur le sommeil a laissé penser que la phase dite paradoxale serait spécifique du rêve. Cette équivoque vient du fait que les chercheurs n’ont pas pris la précaution de définir ce qu’ils entendaient par “ rêve ” ou “ activité onirique En fait, l’activité onirique généralement observée au cours de la phase dite paradoxale serait peut-être plus apte à la mémorisation parce qu’elle serait plus structurée, plus soutenue par une trame dramatique, et peut-être aussi plus fréquemment visuelle (?). L’hypothèse d’une activité onirique constante durant le sommeil n’est pas à rejeter pour autant. Mais il s’agirait déjà de préciser une terminologie. ». Le rêve visuel ne serait, selon Virel, qu’un aspect de la fonction onirique polysensorielle permanente et les mouvements oculaires l’accompagneraient préférentiellement. Sans vouloir en tirer de conclusion, cet auteur, au cours d’un enregistrement de globes oculaires sur un sujet en cours d’imagerie Mentale, note que « le tracé montre sans interruption des mouvements de globes oculaires durant toute la séance d’imagerie Mentale. Ce fait peut être rapproché des observations de Kleitman selon lesquelles la présence de séries de secousses oculaires constituerait un test objectif, bien que non infaillible, du rêve hypnique ». Ceci bien que « l’E.E.G. de la pensée onirique de veille et de la pensée onirique hypnique ne [soient] pas superposables ».

II. Aperçu sur les mécanismes du sommeil et du rêve.

Les différences radicales qui semblent opposer sommeil classique et sommeil paradoxal ont conduit à penser que ces deux états devaient dépendre de structures et de mécanismes différents (Jouvet, 1972). Il existerait alors trois niveaux de vigilance fondamentaux correspondant chacun à un mode de fonctionnement particulier du cerveau : — l’éveil, qui paraît être sous la dépendance de deux systèmes — dont la formation réticulaire mésencéphalique — contrôlés par les catécholamines, — le sommeil classique, dont on a pu montrer qu’il n’est pas un simple manque d’éveil, mais un état spécifique initié par des structures propres localisées au niveau du tronc cérébral (système du raphé), contrôlées par la sérotonine, — le sommeil paradoxal, dont le déroulement harmonieux met successivement en jeu des mécanismes préparatoires contrôlés par la sérotonine, et des mécanismes effecteurs, de nature catéchola-minergique et certainement cholinergique, correspondant à l’activation de structures spécifiques situées au niveau du pont (locus coeruleus et sub coeruleus).

Il ressort de ces données que les troubles de la vigilance peuvent être de natures très différentes selon qu’ils intéressent l’un ou l’autre de ces systèmes. En ce qui concerne les insomnies, les seuls véritables hypnotiques sont des drogues qui permettent d’intervenir au niveau des structures responsables du sommeil. Les substances qui dépriment, même massivement, le système d’éveil ne permettent généralement pas l’installation d’un sommeil physiologique harmonieux. C’est notamment le cas des hypnotiques barbituriques. Pour d’autres auteurs au contraire, la découverte de la phase paradoxale ne remet aucunement en cause l’unité du sommeil, un mécanisme unique d’inhibition progressive du cerveau pouvant en expliquer les différentes phases (Hernandez-Péon, 1965). Par ailleurs, sans remettre en question l’existence de mécanismes spécifiques à chacun des états de veille et de sommeil, des auteurs contestent, aujourd’hui, très vivement, la notion d’états de vigilance hautement différenciés, dont l’organisation séquentielle obéirait à un déterminisme rigide (Dement, 1974). Dans cette perspective, le phénomène sommeil ou plutôt le phénomène vigilance est à envisager à partir de la notion d’oscillation. Sommeil et éveil ne sont pas des états statiques, mais résultent de la combinaison de nombreuses variables physiologiques soumises chacune à des variations cycliques suivant une rythmicité propre. Les rapports entre ces différents cycles définissent des relations de phase entre les variables. Le passage d’un niveau de vigilance à un autre ne dépendrait donc plus uniquement de la sécrétion de tel neuro-transmetteur, dans telle structure cérébrale, mais aussi de la relation de phase que présente cette sécrétion avec d’autres variables, telles la température corporelle et les secrétions gastriques ou hormonales.

III. Sommeil paradoxal et développement.

Au cours de la phylogenèse, le sommeil paradoxal émerge timidement chez les oiseaux et ne se développe en fait que chez les mammifères. La survenue du sommeil paradoxal est donc à rapprocher de l’apparition de l’homéothermie, et son installation de la différenciation du néo-cortex. Au cours de l’ontogenèse, le sommeil paradoxal est toujours beaucoup plus développé chez le jeune que chez l’adulte, et cela d’autant plus que son immaturité est plus grande. Relativement stable chez l’adulte, le sommeil paradoxal décline progressivement au cours de la sénescence.

IV. Théories du sommeil et signification de la phase paradoxale.

Les théories du sommeil, surtout en ce qui concerne la (ou les) fonction(s) éventuelle(s) du sommeil paradoxal sont aussi nombreuses que variées (régulation des mouvements coordonnés des yeux, rôle de sentinelle au cours du sommeil, participation à la maturation du système nerveux, régulation homéostasique de l’activité corticale). Toutefois, de nombreux travaux semblent indiquer l’existence de rapports privilégiés entre sommeil paradoxal et mémoire. Enfin, selon une conception très globale présentée récemment par Jouvet, à côté de l’éveil proprement dit (éveil épigénétique) et du sommeil classique, le sommeil « paradoxal » correspondrait à un nouvel éveil, radicalement différent, essentiellement génotypique, durant lequel seraient activés les circuits génétiques fondamentalement nécessaires à la survie de l’individu et de l’espèce, sous le contrôle desquels pourraient se dérouler conjointement des processus de sélection et de programmation de l’information. Dans une perspective très différente, des travaux actuels semblent indiquer l’existence d’une corrélation positive entre la quantité et la qualité du rythme alpha durant l’éveil et la facilitation des rêves nocturnes, ou du moins de leur mémoration, chez des sujets soumis à l’alphathérapie. La signification du sommeil paradoxal apparaît étroitement liée à l’activité vigile, comme en témoigne d’ailleurs la relation de proportionnalité directe qui semble exister entre les deux états (Virel). Ce fait vient appuyer la recherche d’une conception unitaire de l’onirisme de veille et de l’onirisme de sommeil. Ils sont, selon Virel, « deux aspects inséparables et complémentaires d’une même fonction biologique de l’imaginaire ». Par ailleurs, pour Laborit (1973) qui est l’auteur d’un modèle neurobiologique d’après lequel le sommeil classique correspondrait à une phase de récupération neuronale (restauration biochimique et protéique, prédominance de l’activité métabolique des cellules gliales) nécessaire à l’apparition du sommeil paradoxal (phase d’activation neuronale), la signification du rêve ne peut se dégager que de la confrontation dialectique entre « l’expérience unique du sujet et son contexte socio-économique et culturel ». Des tentatives ont enfin été faites pour rapprocher les données récentes concernant le sommeil paradoxal et les hypothèses freudiennes concernant le rêve. Bourguignon a notamment montré que les fonctions de stimulation, de décharge, de substitution et de liaison attribuées au rêve nocturne par la métapsychologie freudienne pouvaient être envisagées d’un point de vue neurophysiologique, sans qu’il soit question toutefois de justifier ou de valider l’un de ces points de vue par l’autre. La confrontation de deux discours, étrangers l’un à l’autre, et nécessairement fermés sur eux-mêmes, ne peut porter de fruits que dans le respect de l’identité de chacun d’eux. Une telle confrontation, bien que difficile et parfois hasardeuse, doit être entreprise. Au-delà du sommeil, la connaissance de l’homme est à ce prix.

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Sommeil (gr. Hypnos, lat. Somnus). Personnifié dans la mythologie grecque, frère de Thanatos, la Mort, et fils de Nyx, la Nuit. Dans l'épisode où Sommeil aide Héra à endormir la méfiance de Zeus (L'Iliade, XIV, 225), Homère décrit sa demeure, une caverne sur l'île de Lemnos; Ovide la place dans les sombres brouillards de l'extrême Nord. Songe de Scipion, le (Somnium Scipionis). Partie conservée du livre VI de la République de Cicéron, disparu pour le reste. Le Songe a été conservé dans le commentaire qu'en donne Ma-crobe. Il prend la forme d'un récit placé dans la bouche de Scipion Émi-lien. Scipion raconte la visite qu'il a faite à la cour de Massinissa (voir sophonisbe), roi numide allié de Rome lors de la deuxième guerre punique (218-201 av. J.-C.). Lors de cette visite, on parle beaucoup du premier des grands Scipions, héros de cette guerre, et qui y gagna le cognomen d'Africain. Lorsque Scipion Émilien se retire dans sa chambre et s'endort, son illustre parent lui apparaît en songe, lui annonce l'avenir et l'exhorte à la vertu, au patriotisme et au mépris de la gloire humaine; ceux qui ont bien servi leur patrie seront récompensés après leur mort: ils auront une demeure céleste (pour l'origine stoïcienne de cette idée, voir aussi posidonius). En passant, le récit donne des indications sur la conception cicéronienne de l'univers, empruntée aux philosophes grecs. Le Songe imite de près le mythe d'Er, au Xe livre de la République de Platon. Dans son Parlement des volailles (vers 1382), Geoffrey Chaucer en offre un résumé poétique.