SIMENON Georges 1903-1989
SIMENON Georges 1903-1989
Romancier belge d'expression française, né à Liège. Le bilan quantitatif est connu: d'abord, de 1920 à 1930, environ quelque mille deux cents contes. Puis sous son nom, depuis 1930, « plusieurs romans par an», décompte tenu des mois de repos, soit quelque deux cents nouveaux titres, dont quatre-vingt-dix « Maigret » environ. Ce qui fait de ce monstre de travail et d'imagination le plus fécond de tous les auteurs de son temps. Sur le plan qualitatif, l'accord n'est pas moins complet : auteur de « romans policiers » ? non, mais de romans tout court, et Gide a pu résumer l'opinion de ses confrères romanciers en le saluant comme « le plus grand de tous peut-être, et le plus vraiment romancier que nous ayons en littérature aujourd'hui ». De cette œuvre dont se dégage une mélancolie très doucement insistante, la série des « Maigret » et des autres romans « policiers » n'occupe d'ailleurs qu'un versant, relativement animé, dynamique; tonique presque, en raison même de la « règle du jeu » d'un genre qui exige le triomphe du Bien sur le Mal et qui ne badine pas avec les traditions. (Maigret, au demeurant, range à l'occasion parmi les fins heureuses celles où il laisse échapper, volontairement, le coupable; fût-il criminel.) L'autre versant, libéré d'une telle servitude, laisse apparaître à découvert chez Simenon les thèmes qui lui sont propres. La solitude, l'inadaptation, et, surtout, l'effort opiniâtre et maladroit : vers une évasion, vers l'aventure, ou, mieux, vers quelque réhabilitation - rédemption, affection -, quelque rêve de gloire. Effort voué dès le départ à l'échec; et qui bientôt s'essouffle, se paie le luxe (sans conviction) d'un dernier sursaut, retombe enfin : le juif libraire de province dans Le Petit Homme d'Arkhangelsk (1957) ; le couple d’amants pauvres, isolés dans Paris qui les refuse (Les Noces de Poitiers, 1948) ; le pitoyable artiste amateur, qui peint obstinément des toits à perte de vue (dans Les Sœurs Lacroix, 1938).
On a parfois traité Simenon de « romancier populaire». Et c'est vrai, dans le sens où les poètes ont parlé à propos d'un glorieux confrère, comme La Fontaine (ou aujourd’hui Prévert) de poésie populaire ; et dans le sens où les musiciens parlent de chanson populaire : comme elles, il vivra éternellement.