Shôtoku Taishi (574-622) ; introducteur du bouddhisme au Japon.
Shôtoku Taishi (574-622) ; introducteur du bouddhisme au Japon. A son arrivée au pouvoir en tant que régent en 592, le prince S. entreprend d'implanter au Japon la culture continentale chinoise au sens large du terme. La grande estime qu'il porte aux éléments de religion bouddhiste, de philosophie, d'éthique et de politique contenus dans la doctrine confucianiste, loin d'être fortuite, est le résultat d'une influence longue déjà d'un siècle, qui avait atteint le Japon par l'intermédiaire de la Corée. La Corée, bouddhiste depuis le IVe siècle, n'était pas seulement un simple intermédiaire, mais bien plus un propagateur actif de la culture bouddhiste. Ces efforts trouvent leur apogée en 552, lorsque l'empereur japonais est pressé de se convertir au bouddhisme. L'histoire japonaise nomme « Asu-ka » la période qui débute alors. Vers le milieu du VIe siècle, il y a au Japon approximativement 7 000 foyers « Ts'in », qui représentent environ 100 000 personnes, sans compter les réfugiés venus des colonies chinoises de Corée du Nord et du continent. Ces immigrés, excellents artisans et paysans, constituent l'avant-garde de la culture continentale que le Japon devait adopter. Ces colons sont assimilés par les classes supérieures japonaises grâce à des mariages mixtes (au VIIIe siècle, un tiers de l'aristocratie japonaise prétend être d'origine chinoise ou coréenne). Le terrain est donc bien préparé lorsque le prince S. entreprend de détacher son pays de la domination des groupements primitifs de clans et de le mettre en contact avec une culture infiniment supérieure à la sienne. L'adoption de la culture étrangère réussit si parfaitement qu'il est difficile de déterminer quelle était la culture précédente, si ce n'est ce que l'on appelle en chinois le shinto (« le chemin de dieu »), une religion primitive animiste qu'on préféra astucieusement ennoblir par le confucianisme et le bouddhisme au lieu de la remplacer complètement, même si les ultranationalistes ont toujours cherché à faire du shinto un symbole national. Comme beaucoup de princes des clans rivaux ne s'étaient ralliés à la nouvelle doctrine (officielle depuis 594) que pour des raisons politiques, il faut rendre ce mérite à S. qu'il s'efforça véritablement de faire passer dans son pays quelque chose de l'essence du bouddhisme et du confucianisme, bien qu'il n'ait pas dédaigné de recourir à des moyens extérieurs de propagation de la foi, comme par exemple la construction de temples (Shitennôji, à Osaka, 593 ; Hôryûji, 607). Trois ans après sa mort, il y avait déjà 46 temples au Japon, dont l'un, Asukadera, a donné son nom à la période Asuka. A l'exception de ses commentaires des sou- tras bouddhiques et de la première histoire du Japon rédigée par lui, le prince S. est connu pour son système des douze classes de fonctionnaires, introduit en 603, et pour sa constitution en dix-sept articles (604) qui, entre autres, interdit les guerres privées. Par ces deux moyens, il tente de remplacer le système de clans par des institutions officielles. En donnant aux princes des clans des postes à la cour, il ne leur retire ni leur pouvoir ni leurs possessions, il essaie seulement de les inciter à reconnaître un rapport de dépendance au pouvoir central. La « constitution », qui est considérée comme la première loi écrite du Japon, n'est nullement une véritable législation, mais tout simplement un ensemble de maximes politiques et morales, fondées sur le confucianisme et le bouddhisme. C'est pendant le règne de l'impératrice Suiko, au nom de laquelle le prince S., son neveu, exerce la régence, qu'est introduit le terme chinois de tennô (« empereur céleste », 592) pour qualifier le souverain. Le Japon ne doit pas à la Chine la seule terminologie, mais aussi toute la conception de la hiérarchie, dont l'implantation est considérablement accélérée par l'adoption de l'écriture chinoise (ve siècle). A la mort de S., les clans aristocratiques, à commencer par celui des Soga, reprennent aussitôt leur agitation ; mais son héritage spirituel demeure sans être entamé.