SÉVIGNÉ (MARQUISE DE)
SÉVIGNÉ (MARQUISE DE)
Marie de Rabutin-Chantal, marquise de Sévigné, naît à Paris le 5 février 1626. Son père, le baron de Chantal, est le fils de la fondatrice de l'ordre de la Visitation. Sa mère, Marie de Coulanges, est elle aussi de bonne noblesse. Orpheline à 7 ans, Marie de Rabutin-Chantal est placée sous la tutelle de son oncle, l'abbé de Coulanges, et reçoit une éducation soignée : parmi ses précepteurs, Chapelain et Ménage, qui lui apprennent d'italien, l'espagnol et le latin. Mariée à 18 ans au marquis Henri de Sévigné, maréchal de camp, petit cousin du cardinal de Retz, elle devient veuve après sept ans d'une union peu heureuse : son mari, qui se bat pour sa maîtresse, est tué lors d'un duel. Mme de Sévigné, dès lors, va se consacrer à l'éducation de ses deux enfants, sa fille Françoise-Marguerite, qui épousera M. de Grignan, lieutenant général en Provence, et Charles, qui se distinguera comme officier dans les guerres d'Allemagne, de Franche-Comté et de Flandre, avant de se retirer en Bretagne, de s'y marier et d'être nommé lieutenant du roi dans le comté nantais. En février 1671, Mme de Grignan doit suivre son mari en Provence. Mme de Sévigné, inconsolable de cette séparation d'avec sa fille, va désormais entretenir avec elle (et avec quelques autres éminents interlocuteurs) une volumineuse correspondance de vingt-cinq années (1671-1696), dans laquelle elle va retracer les grands et petits événements de la Cour et de Paris. C'est, vue par une commère aussi fine que talentueuse, toute l'histoire de la fin du XVIIe siècle. Sous sa plume d'oie défilent la splendeur de Louis XIV, les fêtes de la Cour, les succès oratoires de Bourdaloue et de Bossuet, les triomphes de Corneille, la gloire naissante de Racine, le procès de Fouquet, les exploits de Condé, la mort de Turenne... Faits saillants de l'époque et détails intimes de la vie à Versailles sont décrits et racontés avec une verve, un esprit étincelant et naturel, parfois même une éloquence que peu d'écrivains ont égalés ; Mme de Sévigné, même si ses propos sont parfois frivoles, même si elle fait de la littérature sans le vouloir intentionnellement, est l'un de nos plus grands écrivains classiques. S'étant rendue au château de Grignan en 1694 pour assister au double mariage de son petit-fils et de sa petite-fille (son autre petite-fille sera religieuse), elle y reste pendant deux ans et y meurt, de petite vérole, le 16 avril 1696, à l'âge de 70 ans. Ses lettres, non imprimées de son vivant, continuent à circuler manuscrites après sa mort. En 1725 en paraît un premier recueil sous le titre de Lettres à de Grignan. En 1754, le chevalier Perrin, avec le concours de Mme Simiane, petite-fille de la marquise, fait paraître une édition en huit volumes de ses lettres, qu'il n'hésite pas à corriger. L'authenticité des lettres ne sera rétablie qu'en 1818, dans une nouvelle édition. Mirabeau, Sainte-Beuve, Lamartine se pencheront sur cette œuvre unique dans l'histoire de la littérature française.
SÉVIGNÉ Marie de Rabutin-Chantal, marquise de. Née à Paris, le 5 février 1626. Son père, Celse-Bénigne de Rabutin, baron de Chantal, appartenait à une ancienne famille bourguignonne, de noblesse d’épée, dont Bussy-Rabutin devait plus tard établir la généalogie. D’après lui, les Rabutin étaient fiers de leur naissance, braves, spirituels, avec quelque chose de libre, d’original et une pointe d’humeur caustique. La mère de Celse, amenée à Dieu par François de Sales, devait être canonisée sous le nom de sainte Jeanne de Chantal. Celse de Rabutin épousa en 1624 Marie de Coulanges. De ce côté-là, l’ascendance de Mme de Sevigné est moins brillante, sinon moins fortunée : le père de Marie de Coulanges avait été fermier des gabelles. Les Rabutin refusèrent, dit-on, d’assister au contrat, ce qui explique que le jeune ménage soit allé s’installer chez les Coulanges, dans leur maison de la Place Royale (aujourd’hui place des Vosges) où naquit la petite Marie, future Mme de Sévigné. S’il est vrai que les filles cherchent inconsciemment à retrouver dans leur mari le même type d’homme que leur père, on ne s’étonnera pas des ressemblances de caractère entre Celse de Rabutin et Henri de Sévigné, qui furent tous deux séduisants, hommes d’esprit, et duellistes enragés. Du premier, Bussy a eu ce mot charmant : « Tout jouait en lui. » Mais Celse de Rabutin n’eut pas le temps d’être un mauvais époux : au bout de deux ans de mariage, ayant pris part à un duel retentissant, u dut s’éloigner de la cour pour échapper aux foudres de Richelieu; il fut tué par les Anglais au siège de l’île de Ré, auquel il s’était engagé comme volontaire. Sa fille avait un an. Mme de Rabutin n’ayant survécu que quelques années à son mari, la petite orpheline fut élevée par ses grands-parents; à la mort de ceux-ci, on lui désigna comme tuteur son oncle Philippe de Coulanges, et non le frère de celui-ci, Christophe, abbé de Livry, comme on l’a cru longtemps. L’abbé («le bien bon ») ne fut qu’un conseiller mais fidèle, sage, affectueux, chez qui la jeune fille aimait à séjourner. Elle ne manqua ni de soins ni de maîtres : Ménage et Chapelain lui apprirent l’italien, l’espagnol et un peu de latin. Blonde aux yeux bleus, elle charma, dès sa jeunesse, par son éclat et sa vivacité. Henri de Sévigné, quelle épousa en 1645, pouvait passer pour un bon parti : parent des Gondi par sa mère, il avait du bien (terres en Bretagne, un hôtel à Vitré) et appartenait à une bonne et ancienne famille (bien qu’on ait chicané depuis sur son titre de marquis). Il semble que la lune de miel dans la propriété des Rochers (à six kilomètres de Vitré) ait été pour Mme de Sévigné une heureuse époque... la seule de sa vie conjugale ! En 1640, elle donne naissance à une fille, Françoise-Marguerite; en 1648 à un fils, Charles. Elle fréquente les salons, se lie avec tout ce que Paris compte de cultivé et de spirituel : Mmes de Rambouillet, de Sablé, de Longueville, Cornuel, les du Plessis-Guénégaud, La Rochefoucauld; elle connaît Corneille, alors au faîte de sa gloire, Segrais, Guez de Balzac, Voiture, Sarrasin, les Scudéry, Benserade. Somaize lui accorde une place dans son Dictionnaire des précieuses; le mot n’avait pas encore un sens péjoratif : personne ne fut moins maniéré que Mme de Sévigné, si ce n’est son amie intime Mme de Lafayette. Toutes deux haïssaient le « tortillonnage d’esprit ». Ce beau monde était résolument frondeur. Bussy-Rabutin avait rejoint l’armée de Condé qui assiégeait la capitale; de Saint-Denis, ou il s’ennuyait ferme, il écrivit à sa cousine : « Sans l’espérance de vous faire quelque plaisir au sac de Paris, et que vous ne passerez que par mes mains, je crois que je déserterais; mais cette vue me fait prendre patience. » On voit que le ton était leste, et, pour l’employer, il fallait être sûr que la correspondante ne s’en formaliserait point. L’absence de pruderie de Mme de Sevigné lui a certainement nui; le prince d’Harcourt la trouvait un peu trop « guillerette » et d’aucuns ont prétendu que son mari n’avait pas eu tous les torts. Cependant personne n’a jamais pu lui attribuer une aventure définie, alors que celles de Sévigné étaient de notoriété publique. « Il aima partout et n’aima jamais rien de si aimable que sa femme », écrit Bussy qui ne joua pas un très joli rôle auprès du ménage. Au moment de sa liaison avec Ninon de Lenclos, Sévigné eut le tort de le prendre comme confident; Bussy alla tout raconter à l’épouse délaissée dans l’espoir qu’on le choisirait comme consolateur. Espoir déçu et dont il garda du ressentiment. Sévigné se fit tuer en duel par un de ses rivaux en 1652, et sa veuve fut longtemps inconsolable : deux ans après le drame, elle s’évanouissait encore en rencontrant un témoin du duel. C’est qu’elle aimait son mari bien qu'elle ne l’estimât point; lui au contraire «l’estimait et ne l'aimait point». Il fut probablement le seul. Tous les contemporains de Mme de Sévigné ont été séduits par le charme incomparable qui éclate aujourd’hui encore dans les Lettres; des nombreux portraits qu’ils ont laissés d’elle, le plus profond et le plus « parlant » est sans contredit celui de Mme de Lafayette : « Sachez... que votre esprit pare et embellit si fort votre personne qu’il n y en a point sur terre de si charmante... » Cependant, on voyait Mme de Sévigné refuser tour à tour les hommages du duc de Rohan, du prince de Conti, du comte du Lude, qu’elle appelait pourtant « le charmant » ; le sévère Turenne lui faisait savoir qu’il l’avait distinguée entre toutes les femmes. Bussy, étonné par tant de vertu, lui écrivait : « La fortune vous fait de belles avances, ma cousine, n’en soyez pas ingrate : vous vous amusez après la vertu, Comme si c’était une chose solide... » Mme de Sévigné repoussa même les avances de Fouquet, démentant ainsi le vers de Boileau : « Jamais surintendant ne trouva de cruelles. » Elle garda néanmoins beaucoup d’amitié pour l’homme fin et séduisant qu’était Fouquet, et le soutint dans le malheur; elle détesta toujours Colbert (qu’elle appelait « le Nord ») pour l’acharnement qu’il mit à tenter d’obtenir la tête du surintendant. Ce procès Fouquet, par lequel Louis XIV inaugurait son pouvoir personnel, fit bien des éclaboussures. Mme de Sévigné elle-même fut au moment d’être compromise : en effet, l’accusé avait bien imprudemment rangé les lettres qu’il recevait de cette charmante amie dans la cassette où il conservait sa correspondance amoureuse; mais, après les avoir lues, le ministre Le Tellier pouvait confier à Bussy qu’elles ne contenaient rien qui ne fût a l’honneur de leur auteur. Et pourtant, en 1664, se répandait dans Paris le plus malveillant des portraits; c’est Bussy qui l’avait écrit, quelques années auparavant, pour faire rire des amis de débauche aux dépens de sa cousine qui avait osé lui refuser un prêt d’argent (sur le conseil d’ailleurs de l’abbé de Coulanges qui l’aidait à gérer ses intérêts). En outre, le galant Bussy avait encore sur le cœur ses échecs répétés. Il se vengea en assurant que Mme de Sévigné était « froide », ce qu’il disait tenir de son mari : « Toute sa chaleur est à l’esprit... Si l’on s’en rapporte à ses actions, je crois que la foi conjugale n’a pas été violée. Si l’on regarde l’intention, c’est une autre chose. Pour en parler franchement, je crois que son mari s’est tiré d’affaire devant les hommes mais je le tiens cocu devant Dieu. » Et pour finir : « Il y a des gens qui ne mettent que les choses saintes pour borne à leur amitié... ces gens-là s’appellent amis jusqu’aux autels. L’amitié de Mme de Sévigné a d’autres limites : cette belle n’est amie que jusqu’à la bourse. » Trait qui dut paraître particulièrement injuste à l’intéressée, puisque, dans l’intervalle, regrettant sans doute son premier refus, elle avait effectivement prêté de l’argent à Bussy en une autre occasion. Son chagrin et son indignation furent immenses. Bussy, sincèrement désolé, alla se jeter à ses pieds. Mais, quelques semaines plus tard, arrivait à Paris la première édition, imprimée en Hollande, de l'Histoire amoureuse des Gaules; le fameux portrait s’y trouvait en bonne place; d’autres aussi, qui n’étaient pas moins cruels; Louis XIV lui-même n’était pas épargné ni ses favorites. Bussy fut envoyé a la Bastille. Il y tomba malade et Mme de Sévigné se laissa attendrir. Après sa sortie de prison, la querelle fut vidée par lettres où chacun rivalisa de finesse et d’esprit. Bussy dut s’avouer vaincu devant le feu, l’ironie et le mordant de sa cousine. Il faut beaucoup lui pardonner pour avoir conservé — et plus tard publié — toutes les lettres qu’il reçut d’elle et dont il fut le premier à sentir la valeur. L’âge acheva d’apaiser les combattants. Mme de Sévigné avait maintenant une fille à marier. D’une beauté parfaite, Françoise de Sévigné dansait dans les ballets de la cour et avait été remarquée par le jeune roi; mais — trop intelligente peut-être — elle intimidait les prétendants. La Fontaine lui reprochait en vers son indifférence. Elle épousa à vingt-trois ans, en janvier 1669, le comte de Grignan dont elle-même disait plaisamment qu’il « abusait de la permission qu’ont les hommes d’être laids». Il fallut préciser dans le contrat de mariage que 196 000 livres de la dot seraient employées à payer les dettes du futur, qui, par ailleurs, était veuf et avait des enfants. Mme de Sévigné passa outre : elle avait beau avoir « la plus jolie fille de France », elle était lasse d’en faire les honneurs, comme elle disait. D’ailleurs, il n’est pas exclu que Françoise ait aimé Grignan, intelligent et de bonne noblesse. En outre, nommé, en 1670, lieutenant général en Provence, il faisait d’elle une sorte de vice-reine. Mais, hélas ! cet honneur signifiait séparation. Le 5 février 1671, après avoir vu partir le carrosse qui emmenait sa fille, Mme de Sévigné, en larmes, commence une correspondance qui ne cessera plus pendant vingt ans. Qu’elle ait adoré sa fille, qu'elle l’ait préférée à son charmant étourdi de fils, c’est un fait. Mais de là à prétendre que cet amour fut anormal et dénote des tendances suspectes, c’est formuler une hypothèse toute gratuite et fort peu vraisemblable, appliquée à une femme aussi saine de corps et d’esprit ! Disons plus simplement qu’elle avait reporté sur cette fille les réserves de tendresse qu’elle n’avait pu assouvir avec son mari. Belle, intelligente, adulée, Mme de Grignan flattait en tous points l’orgueil maternel de Mme de Sévigné... qui, une fois conclu ce mariage auquel elle avait poussé, se repentit peut-être d’avoir donné sa fille à un homme qui habitait si loin, lui faisait mener une existence si fatigante et si ruineuse : Mme de Grignan s’épuisait en réceptions et en fausses couches. Il était bien normal que sa mère s’inquiétât. Remarquons aussi qu'elle n’avait jamais autant aimé sa fille que depuis qu’elle était loin. On peut se demander si, jusqu’à la quarantaine, au moins, ce ne fut pas pour résister à d’autres sentiments que Mme de Sévigné cultiva aussi exclusivement l’amour maternel. Veuve, jolie, très en vue, une ou deux fois déjà échaudée par la médisance, elle ne voulait pas, par une réputation ternie, nuire à l’avenir de sa fille; en retour, cette affection la protégea contre les tentations. « Si je suis restée une honnête femme, c’est à cause de mon amour pour vous », avoua-t-elle un jour à sa fille. C’est donc pour distraire cette belle exilée que Mme de Sévigné entre prend de lui conter presque au jour le jour les potins de la ville et de la cour, rédigeant, sans le savoir, un document incomparable du point de vue historique; grâce à elle nous pénétrons dans l’intimité du XVIIe siècle. La cour, à vrai dire, elle la connaissait surtout par les relations qu’elle y avait (j’en excepte Mme de Maintenon, qui ne montrait guère de tendresse pour les gens qui l’avaient connue quand elle n’était encore que la veuve Scarron !). Mme de Sévigné allait rarement à Versailles : elle avait été frondeuse et elle aimait les Jansénistes, deux griefs aux yeux de Louis XIV, qui, pourtant, fut toujours parfaitement aimable avec elle. Son vrai milieu c’est celui des grands blasés de la Fronde : Condé, La Rochefoucauld, le cardinal de Retz. Elle les voit chez Mme de Lafayette ou chez elle, à l’hôtel Carnavalet. Ce petit cénacle commente les auteurs nouveaux, discute fort librement de la religion et de la mort. On ne se gêne pas non plus pour déplorer les guerres et la politique souvent brutale de Louis XIV. Mme de Sévigné n’est pas restée insensible aux malheurs du siècle; quand on lui reproche de ne pas s’être étendue plus longuement sur la répression en Bretagne, par exemple, c’est qu’on oublie, comme le fait remarquer M. Antoine Adam, que la poste royale était en droit d’ouvrir les lettres. Au reste, on a souvent pris pour de l’insensibilité la pudeur des gens du XVIIe siècle. L’époque n’est pas encore venue où il sera de bon ton d’étaler ses chagrins. Mme de Sévigné s’efforce de cacher les siens (« ses mouches », disait-elle). Comme toutes les mères trop inquiètes, elle agace sa fille et le sait; leurs rares retrouvailles, au lieu de les rendre l’une et l’autre parfaitement heureuses, les laissent déçues et nerveuses. Son fils tente de la distraire en lui contant « mille folies », en lui donnant la comédie : sa mère prétend qu’il joue aussi bien que Molière. C’est sans doute sa maîtresse, l’actrice Champmeslé, qui lui a inculqué ce talent (car le jeune Charles, avant de tomber dans la piété en se mariant, a eu une jeunesse orageuse comme son père). Ces scènes se passaient aux Rochers où Mme de Sévigné faisait de longs séjours. Elle a été une des seules femmes de son siècle et de son milieu à aimer sincèrement la campagne et à savoir en parler; quand elle rentrait d’une promenade dans les bois, « faite comme un loup-garou », elle lisait, elle méditait au coin de son feu. Pascal et Nicole faisaient ses délices. Sans être dévote, elle croyait fermement à « la volonté de Dieu », sans laquelle le monde lui paraissait inexplicable. On comprend qu’elle ait été séduite par la doctrine de la prédestination que professaient les Jansénistes; et puis, disait-elle, « le cœur humain n’a jamais été mieux anatomisé que par ces Messieurs-là ». Elle pensait souvent à la mort et à l’au-delà et ces pensées ne la trouvaient pas toujours aussi ferme qu’elle l’aurait souhaité... Cependant elle mourut courageusement, à Grignan, le 17 avril 1696; de petite vérole disent les uns, d’une mauvaise fièvre disent les autres. Si ce n’est de petite vérole, on s’explique mal que sa fille ne l’ait pas veillée pendant les quinze jours que dura sa maladie; il est vrai qu’elle était elle-même malade et alitée. Le corps de Mme de Sévigné, revêtu de brocatelle bleue, fut inhumé dans la collégiale de Grignan. En 1793, la tombe fut violée par la « Société populaire de Grignan », et les restes dispersés : un maçon déroba une mèche de cheveux, le notaire préleva un morceau de côte, qu’il fit enchâsser dans un médaillon, et le juge, une dent qu’il fit monter en bague. Selon M. Gérard-Gailly, il ne faut pas voir là du vandalisme mais de la vénération. On perd la trace des reliques à la fin du XIXe siècle. Deux fragments de brocatelle bleue se trouvent l’un au musée Carnavalet (avec d’autres souvenirs de Mme de Sévigné), le second à la Bibliothèque de la Sorbonne.
SÉVIGNÉ, Marie de Rabutin-Chantal, marquise de (Paris, 1626-Grignan, 1696). Femme de lettres française, célèbre par la longue correspondance qu'elle entretint avec ses amis mais surtout sa fille {Lettres, éd. posthume, 1726). Orpheline très jeune, élevée dans le Marais chez son oncle, Philippe de Coulanges, qui lui donna une éducation très soignée, Marie épousa le marquis de Sévigné (1644), tué en duel en 1651. Veuve à 25 ans, d'une grande gaieté et douée pour la vie mondaine, elle partagea sa vie entre Paris, à l'hôtel Carnavalet - où elle fréquenta la Cour et les salons comme celui de Mme de La Fayette - et Les Rochers en Bretagne. Elle eut deux enfants, une fille - Françoise-Marguerite, mariée au comte de Grignan, retirée en Provence et qui sera l'adoration et le tourment de sa vie -, et un fils, Charles. Durant 25 ans, elle aura plusieurs fois l'occasion de revoir la comtesse de Grignan mais à chaque séparation, l'échange de lettres fut presque quotidien. Écrite avec une grande liberté de style, sa correspondance s'attache à restituer avec humour la chronique mondaine et littéraire de son temps.