SENSIBILITÉ / SENSIBLE / SENSUALISME / SENTIMENT / SENTIR
- SENSIBILITÉ, n.f. (lat. sentire « percevoir par les sens », ou « sentir moralement »). ♦ 1° Physiologie, a) Propriété des tissus vivants de recevoir des excitations et d'y répondre par des réactions ; b) Finesse des sens qui réagissent à des excitations très légères, qui perçoivent les moindres nuances entre les excitations. Par analogie, on parle de la sensibilité de certains objets (d'une balance, d'un thermomètre). ♦ 2° Psychologie. a) Faculté d'éprouver des sensations, mais aussi du plaisir et de la douleur, des sentiments, des émotions et des passions ; b) Disposition de caractère qui attache de l'intérêt aux impressions sensibles, qui est enclin à éprouver avec intensité plaisir et douleur, tristesse et joie. Disposition à l'émotion, à la passion. Disposition à la sympathie, à l'amitié, à l'affection, à la tendresse. Il y a une sensibilité esthétique, une sensibilité intellectuelle : celle qui perçoit l'harmonie d'une démonstration, la beauté d'une conception, d'une théorie. ♦ 3° Dans la Critique de la Raison pure (« Esthétique transcendantale »), Kant attribue à la sensibilité la faculté de nous fournir le donné de la connaissance, par l'intuition empirique des phénomènes, et l'intuition pure de l'espace et du temps, « formes a priori de la sensibilité ».
- SENSIBLE. n.m. et adj. (lat. sensibilis « qui tombe sous les sens »). ♦ 1° Adjectif. a) Qui peut être perçu par les sens (qualité sensible, différence sensible) ; b) Par extension, qui peut être perçu par l'intelligence ou le cœur : «Dieu sensible au cœur, non à la raison» (Pascal) ; ou qui est suffisant pour être perçu, remarqué (différence sensible) ; c) Qui est capable de recevoir des impressions sensibles (le nez est sensible aux odeurs, l'oreille est sensible aux sons) ; — qui a une finesse particulière de perception. Par extension, qui est facilement ému, ébranlé par des émotions (âme sensible), d) Appliqué à des objets : objets capables de recevoir des impressions (plaque sensible à la lumière). ♦ 2° Substantif. Aristote a établi une distinction, conservée par les scolastiques, entre sensibles propres (les qualités spécifiques qui sont perçues par chaque sens : la lumière et les couleurs pour la vue, les bruits et les sons pour l'ouïe) et sensibles communs (qualités qui peuvent être perçues par différents sens ; par exemple, les formes, par la vue et le toucher). Aristote a établi une distinction, conservée par les scolastiques, entre sensibles propres (les qualités spécifiques qui sont perçues par chaque sens : la lumière et les couleurs pour la vue, les bruits et les sons pour l'ouïe) et sensibles communs (qualités qui peuvent être perçues par différents sens ; par exemple, les formes, par la vue et le toucher).
- SENSUALISME. n.m. Forme d’empirisme, soutenue par Condillac, qui fait dériver toutes les fonctions mentales de la sensation, et qui donne la sensation comme la source unique de nos connaissances. C'est la thèse exposée dans le Traité des sensations (Condillac). Beaucoup de philosophes ont pensé que ce terme était mal choisi et pouvait donner à penser qu'il s'agissait d'une doctrine qui ferait l'apologie de la sensualité.
- SENTIMENT. n.m. (lat. sentire « percevoir par les sens » ou « sentir moralement »). ♦ 1° Autrefois, s'employait comme synonyme de « sensation » ou de « conscience ». Descartes, dans les Principes, écrit : « Nous connaissons clairement et distinctement la douleur, la couleur et les autres sentiments lorsque nous les considérons simplement comme des pensées. » ♦ 2° Aujourd'hui, deux sens dominent dans l'usage du mot sentiment : a) État affectif complexe, riche en nuances propres, ayant pour origine, non des sensations, mais des pensées, des désirs, des représentations, des souvenirs, nos relations avec les personnes et les choses, d'une façon générale l'ensemble de l'aspect affectif de notre vie personnelle (altruisme, sentiment familial, sentiment religieux, sentiment de la nature, sentiment de fierté, de regret, d’envie, de jalousie, de rancune, etc.) b) Connaissance qui n'est pas une idée claire. Malebranche disait que nous ne connaissons notre âme que par sentiment intérieur. Nous avons le « sentiment » d'une vérité avant d'en avoir une connaissance certaine. Le sentiment intellectuel est une sorte de contact personnel avec la vérité qu'il faut ensuite élucider. — Expression de la pensée personnelle (Ceci est mon sentiment). ♦ 3° Les morales du sentiment (Rousseau, par exemple, ou Adam Smith) sont des morales plus intuitives que rationnelles, inspirées par l'altruisme et autres sentiments désintéressés.
- SENTIR, v. tr. (lat. sentire « sentir »). ♦ 1° Être affecté par une impression sensorielle. Dans ce sens, sentir s'oppose à « concevoir », à « imaginer », à « se souvenir ». ♦ 2° En rapport avec le seul odorat (on ne sent pas les couleurs ni les sons) : Percevoir une odeur (sentir une odeur de fumée) ; flairer, porter son attention sur une odeur (sentir un parfum) ; répandre une odeur (la rose, le lilas sentent bon). ♦ 3° Faire une expérience sensorielle (sentir une résistance, sentir un mouvement) ; avoir conscience de (se sentir capable de) ; sentir qu'on a déplu à quelqu'un. ♦ 4° Connaître par intuition particulièrement dans le vocabulaire pascalien : « C'est le cœur qui sent Dieu. » « Le cœur sent qu'il y a trois dimensions dans l'espace. » ♦ 5° Éprouver des affections, des sentiments : dans ce cas, on dit de préférence ressentir.
- SENTIR (v.) 1. — Éprouver une sensation, percevoir par les sens ; (en part., sens vulg.) percevoir par l’odorat. 2. — Éprouver un sentiment ; on dit plutôt ressentir. 3. — Connaître par intuition. 4. — Répandre une odeur.
Liens utiles
- Expliquez et discutez ce propos de Maurras (Prologue d'un essai sur la critique): « La critique littéraire proprement dite consiste à discerner et à faire voir le bon et le mauvais dans les ouvrages de l'esprit, discernement qui suppose deux opérations, tantôt consécutives, tantôt simultanées : le sentiment et l'élection. Il n'est pas de bonne critique qui n'excelle ensemble à sentir et à choisir. »
- les expressions de la sensibilité HLP T
- SES : le sentiment d’injustice fiscale
- Saint-Exupéry écrit dans Terre des hommes : « Etre homme, c'est précisément être responsable. C'est connaître la honte en face d'une misère qui ne semblait pas dépendre de soi. C'est être fier d'une victoire que les camarades ont remportée. C'est sentir, en posant sa pierre, que l'on contribue à bâtir le monde. » Vous étudierez avec soin cette définition de la responsabilité, en indiquant dans quelle mesure elle rejoint votre expérience personnelle.
- Un critique moderne écrit à propos de la Lettre à d'Alembert sur les spectacles. « C'est cette curieuse liaison entre le sentiment, la littérature et la politique, qu'il faut dévoiler ». Votre lecture de l'oeuvre de Rousseau inscrite au programme vous semble-t-elle éclairée par cette affirmation ?