Schopenhauer: Causalité
Causalité
• La causalité est l’une des trois modalités du principe de raison suffisante. Loin de constituer une catégorie autonome, elle est produite par la relation des deux autres instances de celui-ci, l’espace et le temps. « C’est donc la causalité qui forme le lien entre le temps et l’espace » (M, p. 33).
•• La nature de ce lien est complexe. Tantôt Schopenhauer parle d’une « limitation réciproque » (M, p. 33) de l’espace et du temps, qui produit la loi de causalité. Tantôt il évoque une « pénétration réciproque » (R, p. 141). Quoi qu’il en soit de cette genèse, la causalité reçoit un statut comparable à celui qu’elle détenait chez Kant. Elle est même, à cet égard, la seule survivante des douze catégories kantiennes, dont la « Table » suscite les sarcasmes de Schopenhauer. La causalité est « l’unique forme de l’entendement ; quant aux onze autres catégories, ce sont comme de fausses fenêtres sur une façade » (M, p. 560). D’ailleurs, « toutes les fois que, pour mieux s’expliquer, Kant veut donner un exemple, il prend presque toujours la catégorie de causalité » (ibid.) « Voilà pourquoi je veux que, sur les douze catégories, on en jette onze par-dessus bord pour conserver seulement la causalité » (M, p. 562). Ce privilège lui vaut une nouvelle position dans la structure transcendantale. Alors que Kant la séparait, comme catégorie de l’entendement, des deux formes a priori de l’intuition sensible (espace et temps), Schopenhauer réunit génétiquement les trois déterminations dans le principe de raison suffisante.
••• Il convient de ne pas confondre, comme l’a fait Maine de Biran, la causalité et la force, qui est l’une des Idées, ou objectivations immédiates de la Volonté. Il importe également de ne pas réduire la causalité à la cause (Ursache), qui n’est que l’une de ses modalités dans la sphère phénoménale. La cause régit le monde inorganique, l’excitation (Reiz) le monde végétal, et le motif (Motiv, Motivation) le règne animal, où il faut d’ailleurs distinguer les motifs sensibles, liés à l’entendement, et donc communs aux hommes et aux bêtes, et les motifs abstraits, qui relèvent de la raison, et sont par conséquent spécifiques de l’humanité. Mais, quelle qu’en soit la modalité et à quelque niveau qu’elle intervienne, la causalité est impérieuse et c’est seulement dans la sphère métaphysique, celle de la Volonté, que règne, aussi impérieusement, la liberté.
Liens utiles
- Arthur SCHOPENHAUER, Le Monde comme volonté et comme représentation, 181 B, livre IV, trad. A. Burd eau,© PUF, 2e éd. 2004
- causalité.
- causalité n.
- SCHOPENHAUER
- « LA VIE N'ADMET POINT DE FÉLICITÉ VRAIE, ELLE EST FONCIÈREMENT UNE SOUFFRANCE AUX ASPECTS DIVERS, UN ÉTAT DE MALHEUR RADICAL. » Schopenhauer