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Schelling: Âme (Seele)

Âme (Seele)

• Ce qu’il y a de plus haut en l’homme, troisième « puissance » en lui. Dans l’esprit humain comme tel, les trois facettes ou puissances sont le cœur, l’esprit stricto sensu, et l’âme, « ciel intérieur de l’homme ». On notera la subordination de l’esprit à l’âme.

•• L’âme est pour Schelling le non-personnel, et par là, disent les Conférences de Stuttgart de 1810, « le vrai divin en l’homme » : « L’esprit sait, mais l’âme ne sait pas, elle est la science même [...] l’âme n’est pas bonne, elle est la bonté elle-même » (O. M., 245). Déclaration en parfaite consonance avec celle du début de la première version des Ages du monde : « Créée et puisée à la source des choses, et pareille à cette source, l’âme humaine a une conaissance de la création. En elle réside la plus haute clarté de toutes choses, et elle est moins sachante qu’elle-même science. » Le précepte d’agir avec âme signifie donc : « n’agis pas comme être personnel, mais tout à fait impersonnellement, ne dérange pas avec ta personnalité les influences de l’âme en toi-même » (O. M., 248-9). Le beau dialogue Clara, mémorial de Caroline, dit de l’âme qu’« elle n’est pas où elle est mais où elle aime » (125). On peut noter que le mot allemand Seele (l’âme) vient probablement de See (le lac), en raison de la vieille croyance germanique qui situait dans les eaux de celui-ci les âmes des morts comme de ceux encore à naître — les mânes et les limbes. « J’ai attendu tout l’hiver avec impatience, poursuivit-elle [= Clara], de voir le lac. Nous avons si souvent et abondamment parlé de la vie des esprits, et j’avais toujours devant les yeux l’image du lac. [...] — Cette association d’idées me semble très naturelle, dit le médecin. [...] Le lac est une image du passé, du silence et de la réclusion éternels. » (CL, 140).

••• L’âme étant « la bonté [elle-] même » plutôt qu’elle n’est bonne, il en résulte immédiatement que — contrairement à l’usage linguistique courant — l’âme ne saurait être malade ni mauvaise. Il n’y a pas de maladies de l’âme, contrairement à l’usage courant en allemand de cette expression (comme à son usage kantien dans l'Anthropologie du point de vue pragmatique) — « seuls le cœur et l’esprit peuvent être malades ». Comme il ne peut y avoir d’âme mauvaise, d’âme noire ou d’âme fausse : « Une âme noire, cela signifie une absence d’âme » (O. Af., 245). La noirceur d’âme attribuée au scélérat signifie une vie sans âme. L’identification de l’âme à la plus haute puissance dans l’esprit humain, à l’encontre de l’opinion courante (mais aussi paulinienne) d’après laquelle l’esprit est ce qu’il y a de plus haut en l’homme, résulte de ce que l’esprit ( Geist) est capable de maladie, d’erreur, de péché, de mal (lequel est même « d’un certain point de vue, le spirituel le plus pur »), ce qui fait que « l’esprit ne saurait être ce qu’il y a de plus haut ». En faisant correspondre les mythologies égyptienne, indienne et grecque respectivement au corps, à l’âme et à l’esprit, la Philosophie de la Mythologie semble toutefois revenir à la subordination traditionnelle de l’âme à l’esprit, la mythologie grecque englobant en effet et récapitulant les autres mythologies.

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