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SCHELER (Max)

SCHELER (Max). Né à Munich, longtemps privât docent, (c'est-à-dire assistant) à léna puis à Munich, Max Scheler (1874-1928) ne devint professeur à Cologne qu'en 1922. Son influence fut alors immédiatement importante. Ses deux principaux ouvrages sont Nature et formes de la sympathie (1913) et le Formalisme éthique et l'Ethique matériale des valeurs (1913-1916). Citons aussi le Renversement des valeurs, De l'éternel en l'homme, l'Homme du ressentiment, le Sens de la souffrance, la Pudeur. Né israélite, très tôt converti au catholicisme, Scheler, à la fin de sa vie, se détourna de l'Eglise et orienta ses travaux vers la sociologie. Il mourut au moment où il allait occuper une chaire de philosophie sociale à Francfort. Scheler est un phénoménologue, parfois plus proche de Brentano que de Husserl. La connaissance est, pour lui, visée des essences et des valeurs. Elle atteint sa perfection dans l'amour de Dieu et dans la sympathie. Scheler développe une théorie des valeurs en critiquant la morale formelle de Kant. Il admet une intuition des valeurs qui sont reçues avec une évidence immédiate : on n'a pas besoin d'avoir appréhendé les caractères de la beauté pour appréhender un objet comme beau. Il y a une pluralité des valeurs irréductible mais ordonnée. On peut être «aveugle aux valeurs». L'intuition émotionnelle préfère ou refuse les valeurs et sacrifie les inférieures aux supérieures. L'intuition émotionnelle vise aussi la personne. La sympathie, l'amour, la haine ont leurs évidences propres. Le discernement affectif est au centre de la doctrine de Scheler. L'amour est lucide. La personne n'est pas le moi. Elle est le sujet des actes intentionnels par lesquels nous saisissons essences, valeurs, autrui. Les valeurs de personnes sont les plus élevées : il y a le saint, le héros, le génie, le chef, l'artiste. Pour chaque personne, Dieu a créé une valeur propre que l'amour sait discerner. La pensée de Scheler a beaucoup varié, surtout en ce qui concerne sa philosophie religieuse. Il a pourtant exercé une influence importante, par exemple sur Nicolaï Hartmann, et, en France, sur Paul-Louis Landsberg qui contribua au personnalisme de la revue Esprit.

Philosophe allemand. D'origine israélite, il est baptisé très jeune, et une certaine conception du catholicisme, qui accorde la plus grande importance au cœur et à la grâce, influence son parcours à partir de 1906. ♦ De la phénoménologie, il retient la nécessité d'une réflexion sur les intuitions, dont la vérité ne se révèle que si l'esprit, délivré du vouloir et d'une visée pragmatiste sur la nature, redevient capable de s'ouvrir au monde et de reconnaître les choses dans leur mode d'être particulier. La connaissance ultime coïncide avec l'amour de Dieu, et fonde, entre les personnes, la sympathie. ♦ Scheler critique l'interprétation kantienne, jugée trop formaliste, du devoir (Le Formalisme en éthique et l'éthique matérielle des valeurs, 1916). Il considère que les états affectifs, intentionnels en eux-mêmes, saisissent des valeurs indépendantes de la seule subjectivité. Ces dernières donnent sens aussi bien à l'action qu’aux objets, et s'organisent hiérarchiquement, du couple agréable-désagréable aux valeurs religieuses en passant par les valeurs vitales et les valeurs spirituelles. Les valeurs morales sont indépendantes de cette hiérarchie : à chaque niveau, ce sont elles qui permettent de réaliser ce qui est le plus noble. Scheler décrit très subtilement des expériences morales diverses, néanmoins proches des valeurs sociales ou culturelles. ♦ C'est dans Nature et formes de la sympathie (1923) qu'il montre comment les vécus d'autrui deviennent objets : la connaissance d'autrui ne s'instaure pas sur l'analogie avec le moi, car la sympathie (ou l'amour, ou la haine) permet une compréhension lucide d'un sujet extérieur. Elle doit également comprendre les communautés, au même titre que les individus : Scheler, affirmant une relation fondamentale entre la personne et la communauté où elle se déploie dans une solidarité avec les autres, cherche à analyser les idées comme des expressions de classes ou de périodes, et apparaît comme un des pionniers de la sociologie de la connaissance.

Autres œuvres : L’Homme du ressentiment (1923) ; La Situation de l’homme dans le monde (1928) ; Le Sens de la souffrance (1936).

SCHELER (Max), philosophe allemand (Munich 1874 - Francfort-sur-le-Main 1928). Il fut un représentant de la phénoménologie, dont il étendit les analyses à l'ordre des sentiments humains : moraux et religieux. Le Formalisme en éthique et l'Ethique matériale des valeurs (1913-1916), Essence et formes de la sympathie (1923), la Situation de l'homme dans le monde (1928) développent un personnalisme très concret (la personne est un « centre d'actes irréductible à toute activité particulière où elle se manifeste »), allié à une théorie assez abstraite des valeurs comme essences éternelles, distinctes et immuables.

SCHELER Max. Philosophe allemand. Né à Munich le 22 août 1874, mort à Francfort-sur-le-Main le 19 mai 1928. Scheler peut être considéré comme un des plus grands philosophes de l’Allemagne contemporaine, et sa mort a mis fin prématurément à une activité extrêmement féconde. Juif de naissance, il grandit sans éducation religieuse. Au Gymnasium de Munich, il subit fortement l’ascendant du prêtre chargé de l’instruction religieuse et il est baptise dans la religion catholique, à l’âge de quatorze ans. Ses humanités terminées, il commence ses études de philosophie à l’université de Berlin, puis d’Heidelberg. Il subit alors l’influence de Dilthey, de Stumpf, de Simmel. Puis à Iéna il rencontre R. Eucken dont il devient le disciple, et dont ses thèses : Sur le rapport entre les principes logiques et les principes moraux (1899), La Méthode transcendantale et la méthode psychologique (1900), reflètent les idées, en réagissant à la fois contre le kantisme et l’empirisme, par l’affirmation de la vitalité de l’esprit. Chargé de cours comme privat-docent à Iéna, il passe ensuite, après son habilitation, à l’université de Munich (1907) où il entre en contact avec la phénoménologie de Husserl qui le marque profondément, et également avec la pensée de F. Brentano. Période d’intense activité intellectuelle et de conversion religieuse. Les circonstances de son premier mariage l’avaient éloigné de l’Église catholique. Il y revient, fréquente l’abbaye de Beuron, fait un effort, qui ne sera jamais vraiment couronné de succès, pour comprendre la vie sacramentelle et liturgique de l’Eglise. Scheler réfléchit sur les philosophes de la vie, Dilthey, Nietzsche, Bergson, en même temps que sur la tradition augusti-nienne. Fruit de ces méditations : en 1913 paraît De la phénoménologie et théorie des sentiments sympathiques et de l’amour et de la haine [Sur Phénoménologie und Théorie der Sympathiegefühle und von Liebe und Hass], devenue, dans la seconde édition remaniée de 1923 : Nature et formes de la sympathie . En même temps, il compose diverses études : L’Idole de la connaissance de soi-même [Die Idole der Selbsterkenntnis], Le Ressentiment comme fondement des conceptions morales [Das Ressentiment im Aufbau der Moralem] qui prendront place définitivement dans un recueil réédité en 1919 sous le titre Le Renversement des valeurs . La guerre de 1914-1918 provoque également sa réflexion philosophique : Le Génie de la guerre et la guerre allemande [1915], La Guerre et la reconstruction [Krieg und Aufbau, 1916], Sur les causes de la haine contre les Allemands [Die Ursachen des Deutschenhasses, 1917]. En 1919, il devient professeur à l’université de Cologne; il est considéré comme le maître de la pensée catholique allemande; sa philosophie des valeurs dont le meilleur exposé est son ouvrage : Le Formalisme dans l’éthique et l’Éthique des valeurs matérielles est un personnalisme qui voit dans la rencontre avec la personnalité vivante qu’est Dieu, dans la participation à l’amour infini de Dieu, un accomplissement dernier et indispensable de la personne humaine, qui doit se découvrir comme image de Dieu. Cette philosophie de l’acte religieux sera exposée, comme phénoménologie de la religion dans son livre : De l’Eternel dans l’homme (1921). Mais nouveau renversement des valeurs, dans la vie de Scheler : une nouvelle crise morale l’éloigne de l’Eglise catholique. A vrai dire, elle est liée à révolution même de sa pensée, probablement à une prise de conscience des conséquences logiques de ses principes. Cette crise a pour résultat son départ de Cologne : il enseigne désormais la sociologie à Francfort. Son activité littéraire est extrêmement féconde : Les Problèmes d’une sociologie de la connaissance [Zur Soziologie des Wissens, 1923], Sociologie et science des conceptions du monde [Schriften zur Soziologie und Weltanschauungslehre, 4 vol., 1923], Les Formes du savoir et la Société [Die Wissenformen und die Gesells-chaft, 19261, La Situation de l’homme dans le monde (1928). La pensée de Scheler, en seconde partie de son évolution philosophique s’oriente vers l’anthropologie, insiste sur la complémentarité de la vie et de l’esprit, c’est-à-dire de la poussée vitale aveugle mais puissante, et de la liberté spirituelle, lumineuse, mais précaire : la divinité est alors liée au devenir de l’homme lui-même, à la spiritualisation des forces obscures, à la « pénétration réciproque » de la poussée vitale et de l’esprit. Le 19 mai 1928, il meurt d’une attaque d’apoplexie, sans qu'apparemment, il se soit réconcilié avec l’Eglise. ♦ « Les thèmes de base de sa métaphysique étaient les certitudes de son cœur avant d’être les vérités de son esprit. Ce qu’il démontrait comme philosophe, l’homme en lui le vivait et lui appliquant sa propre méthode, nous pouvons dire que ce qu’il y a de plus profond et de plus authentique dans sa nature ne se découvre dans sa pureté et sa totalité que sous le regard de l’amour. Il estimait que la vie la plus haute et la meilleure était celle où tous les efforts conjugués sont appliqués aux tâches humaines, mais qui n’est pas cependant totalement absorbée par ces tâches, et demeure intérieurement dans le silence de la contemplation de Dieu. Pour ceux qui Vont entendu à ce moment et pour qui cette conversation fut la dernière impression qu’ils aient reçu de sa vie terrestre, ces mots demeureront son testament. » Ernst Curtius. ♦ « On peut dire que Scheler fut l’esprit dont les idées ont trouvé le plus grand retentissement dans l’Allemagne intellectuelle pendant ces quinze dernières années. » G. Gurvitch.

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