RUSSELL (vie et oeuvre)
Philosophe et logicien anglais, Bertrand Russell est né en 1872. Après des études à Cambridge, il y est nommé maître de conférences. Évincé en 1916 pour ses activités pacifistes, il vit de sa plume jusqu'en 1938, puis enseigne aux Etats-Unis jusqu'en 1944, année où il est réélu à Cambridge. À partir de 1945, il lutte pour l’arrêt des recherches nucléaires. En 1950, il reçoit le prix Nobel de littérature. Lutteur infatigable, il alliera jusqu’à la fin de sa vie (en 1970) la réflexion du logicien et l’«action dans le siècle». Moraliste et militant politique autant que logicien et philosophe, Bertrand Russell fut, par l'ampleur de sa réflexion, un personnage hors série, toujours en quête de renouvellement et soucieux de rechercher la vérité dans toutes ses exigences théoriques et pratiques.
VIE
Le temps de Russell, c'est la naissance de la philosophie analytique, mais c'est aussi la guerre mondiale qui le trouve adversaire de la belligérance, la bombe sur Hiroshima qui le range du côté des pacifistes antinucléaires, la guerre du Vietnam qui l'amène à fonder le «Tribunal Russell».
L'aristocrate militant
Lord Bertrand Russell naît à Rovenscroft le 18 mai 1872 au sein d'une famille aristocratique. Il fait ses études au Trinity College de Cambridge où, une fois sa thèse obtenue, il enseigne comme fellow (professeur agrégé), puis comme maître de conférences. En 1910, il milite aux côtés de son épouse pour l'obtention du vote des femmes. En 1916, est évincé de Cambridge pour ses activités pacifistes. En 1918, sa lutte pour les droits des objecteurs de conscience lui vaut six mois de prison. En 1920, il visite l'URSS, rencontre Lénine et se déclare bientôt anticommuniste.
Le penseur reconnu
En 1931, Russell est appelé à siéger à la Chambre des Lords où il brille par la sagesse de ses interventions. De 1938 à 1943, il enseigne aux États-Unis avant d'être réélu à Cambridge en 1944. En 1950, il reçoit le prix Nobel de littérature au titre de «porte-parole de la pensée libre, de la raison et de l'humanité ». Il meurt le 2 février 1970 après avoir attaché son nom à une «Fondation pour la Paix».
OEUVRES
Bertrand Russell est l'auteur de plus d'une quarantaine d'ouvrages et d'innombrables articles dont certains font date. On peut distinguer dans son oeuvre quatre directions: la logique, la morale, la politique et la théorie de la connaissance.
Principia mathematica (1910-1913)
Écrits en collaboration avec Alfred North Whitehead, son maître à Cambridge, les Principes s'intéressent aux rapports entre le langage naturel et la structure logique, et surtout aux fondements de l'arithmétique. Il s'agit de montrer qu'on peut réduire les opérations mathématiques à des principes logiques fondamentaux et les énoncés mathématiques à de pures tautologies. "La logique des Principes" renouvelle le formalisme en privilégiant la forme sur le contenu et en créant un symbolisme logique cohérent permettant d'en exprimer les structures.
Notre connaissance du monde extérieur (1914)
Nous croyons d'ordinaire qu'il existe des objets dans un monde objectif commun. Mais notre connaissance directe porte sur des données sensibles qui constituent notre expérience personnelle. Comment passons-nous des données sensibles au monde objectif? Par une pure construction logique: les apparences sensibles d'un objet constituent mon monde privé, le monde est le système complet de toutes les apparences. Il est ainsi possible de penser qu'il existe des objets physiques permanents dans un espace commun bien que cela ne soit jamais une donnée de la perception.
Principes de reconstruction sociale (1926)
Convaincu de l'urgence de réformes radicales en Grande-Bretagne, Russell cherche la solution politique et sociale dans un socialisme libéral et humaniste proche des orientations de John Maynard Keynes à la même époque.
Mariage et Morale (1929)
L'ouvrage a fait scandale. Russell s'y prononce pour l'amour libre et le mariage à l'essai et s'affirme favorable à une vie sexuelle précoce chez les jeunes.
Signification et vérité (1940)
La vérité est une correspondance entre une croyance et un fait qui est son «vérificateur». Il convient de hiérarchiser les croyances vraies et d'admettre que certaines d'entre elles, bien qu'il ne soit pas raisonnable d'en douter, n'ont pas le même degré de certitude que celles qui font l'objet d'une connaissance directe et personnelle.
EPOQUE
La philosophie analytique
En Angleterre, au début du siècle, commence une nouvelle façon de concevoir l'acte même de philosopher. Il ne s'agit plus de constituer un savoir sur l'homme ou sur le monde, mais de questionner la manière dont l'homme, par son langage, pense le monde. Dès lors, la philosophie cesse d'être une quête de vérité pour devenir une quête de clarté, une quête de sens.
Le refus de la violence
Face aux déchaînements de violence du siècle, le philosophe devait prendre position. C'est ce qu'a fait Russell dès 1916 et pendant tout le reste de sa vie. Ainsi, il mettra tout le poids de son autorité morale contre la menace nucléaire parce qu'il estime qu'il s'agit de la survie de l'humanité . Plus tard, au début des années soixante, il fondera avec Jean-Paul Sartre un tribunal — le «Tribunal Russell» — destiné à juger les crimes de guerre commis par les Américains au Vietnam.
APPORTS
Initiateur, avec George Edward Moore, de ce qu'on appellera la philosophie analytique, Bertrand Russell est un penseur majeur dont l'oeuvre est l'une des principales contributions à la fondation de la logique moderne.
L'atomisme logique. Pour savoir si une proposition est vraie ou fausse, il faut l'analyser, c'est-à-dire la décomposer en ses ultimes constituants (les «atomes» logiques). La méthode consiste à réduire une expression complexe en ses éléments fondamentaux, à l'aide des seuls outils de la logique formelle. Et, c'est de la vérité ou de la fausseté de chacune de ces propositions que dépendra la vérité de l'ensemble.
Logique et connaissance du monde.
Selon Russell, la logique est l'instrument par excellence de la position et de la résolution des problèmes philosophiques essentiels. «Tous les problèmes (…) concernant notre connaissance du monde peuvent se réduire, dans la mesure où ils sont spécifiquement philosophiques, à des problèmes de logique», écrit-il en 1910 dans "La Méthode scientifique en philosophie". Il est persuadé qu'en débarrassant le langage courant de tout ce qu'il contient de confus, on pourra déterminer la valeur de vérité d'une proposition aussi facilement qu'on vérifie la justesse d'une addition.
Actualité-postérité. Dans le domaine moral, Russell fut une conscience tout à la fois représentative de son époque et en avance sur son Autrui puisque l'évolution des moeurs s'est chargée de transformer la réalité quotidienne dans le sens de ses voeux. Dans le domaine de la logique et de la philosophie des mathématiques, l'oeuvre laissée par Russell est capitale. Elle est, avec celle de Gottlob Frege, fondatrice de la logique moderne. La rigueur de la méthode et la clarté de l'écriture symbolique utilisée serviront encore longtemps de référence aux logiciens.
[…] fond, qu’il s’agisse de nombres, de droites ou de triangles. Comme le constate Bertrand Russell, « les mathématiques pures sont cette discipline où on ne sait pas de quoi on parle ni si ce […]
[…] de la «philosophie analytique» moderne, Ludwig Wittgenstein a fortement modelé, avec Bertrand Russell, le paysage philosophique anglais, pour le centrer sur un travail de dénonciation des […]
[…] de l’atomisme logique est la transcription d’une série de huit conférences que Russell a prononcées à Londres dans les premiers mois de 1918. Ce texte, contemporain des travaux de […]
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