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roman

roman
Récit en prose, plus long que la nouvelle ou le conte.
Commentaire Le genre romanesque est né au XIIe siècle avec les premiers récits en langue romane (langue française), qui contribuèrent à détrôner le latin comme langue exclusive de l’écrit. D’abord en vers, les textes du XIIe siècle (Tristan et Iseut, Lancelot ou le Chevalier à la charrette...) furent repris au début du XIIIe sous la forme de vastes romans en prose, donnant naissance à un genre promis au plus bel avenir. Le roman a connu depuis lors une destinée riche et variée. Ses formes se sont multipliées, son contenu n’a cessé d’être redéfini au cours de l’histoire littéraire : on ne compte pas les théories qui se sont succédé à son sujet, ni les expérimentations dont il a été l’objet. Toutefois, dans cette abondance, émerge ce qu’il est convenu d’appeler le roman traditionnel, qui se définit par l’équation suivante : action, personnages, cadre spatio-temporel. A partir de cette formule sont nés une multitude de sous-genres, parmi lesquels :
— le roman d'aventures, dans lequel les personnages sont lancés dans des épreuves dont ils essaient de sortir victorieux (ex. : Jules Verne) ; — le roman de mœurs, qui présente la société d'une époque à travers une peinture familiale ou sociale (ex. : Honoré de Balzac, Eugénie Grandet) ; — le roman historique, dont l'action reprend des événements et des personnages empruntés à l'histoire (ex. : Alexandre Dumas, les Trois Mousquetaires) ; — le roman policier, qui s'inscrit dans le cadre d'une énigme policière dont il faut trouver la solution (ex. : Georges Simenon, le Chien jaune) ; — le roman autobiographique, dans lequel le narrateur raconte ou est supposé raconter sa vie (ex. : Marcel Proust, A la recherche du temps perdu) ; — le roman-fleuve, roman en plusieurs volumes qui développe une vaste fresque familiale et sociale (ex. : Roger Martin du Gard, les Thibault) ; — le roman épistolaire, dont l'organisation interne se présente comme une correspondance échangée entre deux ou plusieurs personnages (ex. : Choderlos de Laclos, les Liaisons dangereuses) -, — le roman-feuilleton, qui paraît dans la presse sous la forme d'un feuilleton quotidien ou hebdomadaire (ex. : Eugène Sue, les Mystères de Paris).
Citations Le vrai roman est comme une autobiographie du possible. (Albert Thibaudet, Réflexions sur le roman.) Le roman est une œuvre de mauvaise foi, mauvaise foi de la part du romancier qui croit en ses personnages et cependant se voit derrière eux, qui les ignore, les réalise comme inconnus et trouve dans les mots dont il est maître le moyen de disposer d’eux sans cesser de croire qu’ils lui échappent. Mauvaise foi du lecteur qui joue avec l’imaginaire, qui joue à être ce héros qu’il n’est pas, qui joue à prendre pour réel ce qui est fiction, et finalement s’y laisse prendre, et, dans cet enchantement qui tient l’existence écartée, retrouve une possibilité de vivre le sens de cette existence. (Maurice Blanchot, « le Roman, œuvre de mauvaise foi », in les Temps modernes, avril 1947.) Le roman fabrique du destin sur mesure. C’est ainsi qu’il concurrence la création et qu’il triomphe, provisoirement, de la mort. (Albert Camus, l'Homme révolté.)
Roman psychologique, roman d’introspection, réaliste, naturaliste, de mœurs, à thèse, régionaliste, allégorique, fantastique, noir, romantique, populaire, feuilleton, humoristique, d’atmosphère, poétique, d’anticipation, maritime, d’aventure, policier, scientifique, historique, ouf ! et j’en oublie ! Quel fatras ! quelle confusion ! (Robert Desnos, « Notes sur le roman », in les Problèmes du roman.) Un roman, pour la plupart des amateurs — et des critiques —, c’est avant tout une « histoire ». Un vrai romancier, c’est celui qui sait « raconter une histoire ». Le bonheur de conter, qui le porte d’un bout à l’autre de son ouvrage, s’identifie à sa vocation d’écrivain. Inventer des péripéties palpitantes, émouvantes, dramatiques, constitue à la fois son allégresse et sa justification. (Alain Robbe-Grillet, Pour un nouveau roman, « Sur quelques notions périmées ».)
ROMAN, n. m. Long récit en prose racontant une histoire de caractère fictif, vécue par des personnages imaginaires, que l’auteur veuille ou ne veuille pas nous faire croire à leur vraisemblance.
• À l’origine, le mot roman désigne l’ancien français — la langue vulgaire par opposition au latin (langue savante). Par extension, on a appelé romans des œuvres littéraires (en vers) qui racontaient des histoires fictives en langue romane (roman de chevalerie; roman courtois). Le terme s’est spécialisé par la suite pour désigner un récit en prose d’aventures imaginaires, par opposition aux autres genres littéraires (épopée, chronique, poésie, théâtre, fable, histoire). De nos jours, le roman est devenu un genre attrape-tout qui, tout en s’opposant aux autres genres, en intègre souvent les éléments spécifiques, même si ce n’est que de façon partielle.
• Le roman s’oppose à l'essai, mais il peut contenir des développements et des méditations qui valent bien des essais (la théorie du pouvoir dans 1984 d’Orwell). Le roman s’oppose à la poésie, mais certaines pages descriptives ou narratives sont d’une incomparable poésie (la «Promenade sur le lac» dans La Nouvelle Héloïse de Rousseau). Le roman s’oppose au théâtre, mais ses scènes et ses dialogues sont parfois d’une vigueur dramatique dépassant bien des œuvres théâtrales. Le roman s’oppose à l'épopée, mais offre parfois des pages épiques brossant formidablement le tableau des conditions sociales et des luttes humaines (Zola, Germinal). Le roman s’oppose à l'histoire mais il produit parfois des chroniques à la fois exactes et animées qui font magnifiquement revivre le passé (Flaubert, Salammbô). Et ainsi de suite.
• On distingue en général le roman du récit et de la nouvelle, qui sont des œuvres plus courtes (voir ces mots). Mais les auteurs nomment parfois «romans» des récits très courts (L'Étranger de Camus). Que conclure, sinon que le roman est un genre protéiforme dont l’aptitude essentielle est de s’enrichir de tous les autres, en les greffant à chaque fois sur le noyau spécifique que demeure le processus narratif. Le roman raconte, et à partir de là, il mime l’existence sous toutes ses formes, sous tous les points de vue, en employant tous les procédés de l’écriture littéraire, tous les moyens qui peuvent entraîner le lecteur dans le fantastique, ou le confronter à la représentation du réel.
Voir Chronique, Conte, Fable, Nouvelle, Récit, Romanesque.
ROMAN nom masc. - Long récit en prose relatant une histoire de caractère fictif.
ÉTYM. : à l’origine, texte écrit en « roman » (première forme du français) et non en latin. Le roman était la langue parlée autrefois en France, par opposition au latin qui était alors la langue savante. A partir du XIIe siècle, le terme a désigné des œuvres littéraires traduites du latin en « roman », puis des textes de fiction ordinairement en vers qui relataient des aventures de chevalerie. C’est là ce qu’on nomme le roman courtois qui est l’ancêtre le plus lointain du roman tel que nous le connaissons aujourd’hui. Le genre est tellement riche et protéiforme qu’il est impossible d’en proposer une définition plus précise que celle formulée plus haut. Il se distingue sans difficulté du théâtre - car il n’est pas destiné à la scène - et de la poésie, parce qu’il n’est plus écrit en vers et que le travail sur la langue même n’y occupe pas, en principe, le premier plan. Par sa longueur, il se différencie de la nouvelle, et par son caractère réaliste, du conte, quoiqu’il existe des romans surnaturels, fantastiques ou merveilleux. Parce qu’il présente des événements de nature fictive, il ne devrait pas être confondu avec l’essai, l’autobiographie ou l’histoire. Ordinairement, il met en scène l’aventure d’un ou plusieurs personnages vivant une histoire dans le cadre d’une société, d’une époque et d’un milieu donnés. Tel est, en gros, le schéma qui, de La Princesse de Clèves jusqu’à L’Éducation sentimentale, se trouve dans l’ensemble respecté. Cela dit, il n’est pas une des frontières tracées plus haut, un des éléments de définition avancé, qu’au cours de son histoire, et tout particulièrement au XXe siècle, le roman ne se soit essayé à franchir. Sous ses formes les plus modernes, l’œuvre des grands romanciers vise à annexer l’ensemble des langages littéraires.
Ainsi chez Joyce dont l'Ulysse joue de tous les styles littéraires, inclut une scène de théâtre de nature fantastique, des développements théoriques sur l’œuvre de Shakespeare, et dont Finnegans Wake propose un travail prodigieux sur la langue qui laisse loin derrière lui la plupart des textes poétiques du XXe siècle et relève davantage de l’épopée que du roman au sens traditionnel du terme. Plus près de nous, le nouveau roman a défini ses fictions par le refus du modèle romanesque balzacien, et tout particulièrement du rôle central qui était traditionnellement attribué au personnage et à l’intrigue. Au terme de toutes ces mutations, le genre a perdu en définition ce qu’il a gagné en extension. Il s’affirme comme la principale forme littéraire de notre temps et s’avère aussi bien le lieu des expériences les plus audacieuses que le refuge des conformismes les plus navrants.
—► Nouveau roman — Nouvelle ROMAN-FEUILLETON nom masc. - Roman paraissant par épisode dans la presse. —> Feuilleton ROMAN-FLEUVE nom masc. - Roman d’une très grande longueur et consacré à l’histoire d’un personnage ou d’une famille. Parmi les classiques du roman-fleuve^ on peut citer Les Thibault de Martin du Gard et Les Hommes de bonne volonté de Romains. On signalera également parmi les réussites plus récentes Au plaisir de Dieu de Jean d’Ormesson.