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ROCHE Maurice 1925

ROCHE Maurice 1925
Romancier, né à Clermont-Ferrand. Élève au Conservatoire de musique, en 1945, il est compositeur de la musique de scène pour Les Épiphanies d’Henri Pichette en 1947 ; et le sera encore en 1961 (création à Berlin d’une oeuvre pour piano, Les Ruines circulaires). N’a-t-il pas reconnu, explicitement, que son œuvre littéraire s’est « nourrie » de cette première expérience ? Mais encore, dira-t-on, fallait-il réussir ce que Théophile Gautier appelait « une transposition d’arts ». Et de fait, dès sa première œuvre littéraire, Compact (1966), Maurice Roche semble faire subir au vocabulaire, à la syntaxe plus encore, et pour finir au sens même du texte (à peine peut-on d’ailleurs parler de « sens »), un traitement libre et en vérité non figuratif, de même nature que le musicien qui «joue » ses phrases en miroir, ses entrelacs de motifs, ses abruptes chutes de niveau (qui seront ici, comme de juste, des niveaux de langage) par « modulation aux tons éloignés dans le cycle des quintes », ses violentes sautes de rythme ; tous effets inopinés, étranges et inquiétants parfois, de ce fait, mais aussi, le plus souvent, drolatiques : caricature des réexpositions et séquences (dites en argot de musicien : « rosalies »), et il nous soûle d’un contrepoint de contrepèteries. Mais enfin, ce roman nous raconte-t-il quelque chose ? Mais oui, il y a bien dans Compact une sorte de héros, aveugle qui vit une manière d’odyssée nocturne, et cherche par exemple à vendre sa peau tatouée (comme dans certain film, plus tardif d’ailleurs de trois ans).,.. La surprise que causa Compact se renouvela (ce qui n’est pas habituel) avec les deux suivants : Circus, « roman (s) », 1972, et Codex, « récit (s) », 1974. Car ces trois livres où le lecteur distrait peut, bien à tort, protester qu’il n’y a pas de « fil du récit » et que, par conséquent, il n’y a pas de « récit », sont bien au contraire subtilement liés l’un à l’autre ; en particulier par leurs thèmes (effrayants, voire féroces au fond, si ce n’est macabres) ; au point qu’on a le droit de les coiffer du titre commun de trilogie. La seule réserve qu’on puisse faire à tant de foncière originalité viserait, me semble-t-il, les trop nombreux artifices typographiques (héritage, d’ailleurs voyant, de l’avant-garde d’avant-hier). Les œuvres ultérieures, en particulier Opéra bouffe (1975), Maladie mélodie (1980), Je ne vais pas bien, mais il faut que j’y aille (1987), ne sont pas indignes de cette suite « en C ».

En conclusion, Maurice Roche est véritablement le type de l’écrivain « de recherche ». Mais plus qu’une recherche, il y a là un ensemble de trouvailles, tant dans les « structures » extérieures que dans l’écriture proprement dite ; dans le « débit » singulier de cet auteur difficile, comme on dit, qui se voit - et c’est tout à son honneur - recommandé en ces termes par un célèbre manuel de grande diffusion, La Bibliothèque idéale (Albin Michel, 1989, présenté par Bernard Pivot) : « La fiction gicle sous le calembour : c’est épique, comique, typographique et diabolique. »

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