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Robert MISRAHI : Le bonheur

Robert MISRAHI : Le bonheur

Tous les hommes aspirent au bonheur, même s’ils sont le plus souvent conduits à renoncer à cet espoir. Les philosophes pessimistes comme Schopenhauer insistent sur le caractère tragique de l’existence, avant même de s’être demandés si la négativité est un argument décisif ou seulement un obstacle à surmonter. En décrivant les conditions concrètes de la joie et du bonheur, Robert Misrahi en montre toutes les possibilités et les richesses, mais aussi les exigences. C’est parce que l’homme est ontologiquement libre qu’il peut s’enfermer dans une dialectique du malheur ou au contraire décider, à l’occasion d’une crise existentielle, de prendre en main sa vie selon un projet eudémoniste. Par cette conversion, l’individu choisit de philosopher, passant de la pure spontanéité du désir aveugle à la joie de désirs informés par la connaissance adéquate. L’exercice de la réflexion n’est pas une dimension artificielle ajoutée à l’existence humaine pour la limiter ou la canaliser selon une morale raisonnable. Au contraire, l’expérience montre que tous, déjà, connaissent le recours à la réflexion dans la vie quotidienne pour parvenir à un plus haut degré de satisfaction. Dans cette perspective existentielle renouvelée, il suffit alors de généraliser le procédé dans un projet d’existence global cohérent. Mais dans une société qui exige l’aliénation du plus grand nombre, le chemin du bonheur est nécessairement difficile. Pour réaliser pleinement le bonheur, il faut en penser les conditions objectives : une vie sociale, politique et culturelle qui permette le plein épanouissement des individus.

Se convertir à la philosophie

La philosophie, en tant qu’elle se réfère au sujet, au désir et à sa joie, est donc simultanément détermination des conditions et des contenus de la joie et expérience actuelle et déjà effective de cette même joie. La philosophie, comme activité libre et ouverte de réflexion, d’interrogation et de création, est donc déjà par elle la réalisation de ce qu’elle préconise. Il faut seulement que cette philosophie se propose, en effet, de réfléchir sur la vie elle-même, et sur l’instauration d’une nouvelle vie. La philosophie procure la joie première parce qu’elle est l’effort pour instaurer un nouveau commencement, c’est-à-dire une existence si satisfaisante et significative qu’elle vaille comme un Tout-autre et comme une seconde naissance. Cette pensée réflexive, qui procure la joie de l’autonomie par la recherche même sur l’autonomie et la joie, peut apparaître au premier abord comme difficile et austère. Cette difficulté est le prix de la joie forte et intense qu’elle permet d’atteindre : et elle s’atténue à la mesure de la progression de la conscience sur le chemin de son itinéraire (...). La philosophie est un couronnement Mais l’activité réflexive qui s’interroge sur les fondements et sur les fins, et qui conclut à la nécessité d’instaurer une tout autre vie en accordant l’existence concrète au désir d’être, cette activité de compréhension, d’instauration et de réalisation n’est rien d’autre que la philosophie comme éthique.

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