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Résumé du cours : La Technique et la Nature

Résumé du cours : La Technique et la Nature

Introduction
La technique désigne un ensemble de savoir-faire destinés à augmenter l’efficacité des activités humaines, que ce soit par des instruments ou non. Selon Bergson, l'homme est d'abord un "homo faber" avant d'être un "homo sapiens". La technique est une adaptation vitale de l'homme à son environnement, marquant les âges de l'humanité par son outillage. La problématique centrale est de savoir si tout ce qui est techniquement possible doit être réalisé, mettant en balance les considérations morales et les impératifs technologiques.

La Technique comme Marque de l'Intelligence Humaine

1. La Technique et l'Intelligence Humaine

Aristote et Bergson considèrent la technique comme révélatrice de l'intelligence humaine. Aristote, dans ses ouvrages, souligne que l'homme, par nature, cherche à connaître et à transformer son environnement pour améliorer ses conditions de vie. Dans "Les Parties des animaux", Aristote explique que l'homme se distingue des autres êtres vivants par sa capacité à fabriquer des outils et à utiliser sa raison pour manipuler la nature.
Henri Bergson, dans "L'Évolution créatrice" (1907), développe l'idée que l'homme est un "homo faber", c'est-à-dire un fabricant d'outils. Il soutient que la capacité à fabriquer des outils est ce qui distingue fondamentalement l'homme des autres animaux. Bergson écrit : « L'homme est un fabricant d'outils, il est un outil fabriquant des outils. » Cette capacité technique est pour Bergson une manifestation de l'intelligence humaine et un signe de la créativité humaine.
Les inventions telles que la roue, l'imprimerie, la machine à vapeur et Internet ont marqué des étapes capitales dans l'évolution de la civilisation. La technique a soulagé la peine des hommes et leur a donné de la liberté. La pratique de la technique développe chez ceux qui la pratiquent des qualités intellectuelles comme l'observation, la précision et l'inventivité.

2. Exemples de Progrès Techniques


Les Limites Morales du Progrès Technique

1. Critiques Morales du Progrès Technique

Luc Ferry observe : « Aujourd'hui, la situation semble s'être inversée au point que le plus souvent c'est la nature qui nous paraît admirable et la science maléfique. » Le progrès technique, bien qu'apportant des avantages immédiats, peut entraîner des conséquences négatives à long terme. La question est de savoir si les bénéfices immédiats justifient les risques potentiels à long terme. Reprenons les 3 exemples ci-dessus mais pour en monter les dangers :


2. Le Principe de Responsabilité

Hans Jonas propose un principe de responsabilité face aux défis posés par le progrès technique : « Agissons de telle sorte que les effets de notre action soient compatibles avec la permanence d’une vie authentiquement humaine sur Terre. » Il souligne l'importance de prendre en compte les conséquences à long terme de nos actions techniques et de préserver la nature pour les générations futures. Jonas appelle à une éthique de la responsabilité, qui prend en compte les impacts environnementaux et sociaux des innovations technologiques.

Technique : Libération ou Aliénation ?

1. La Technique comme Source de Libération

La technique a historiquement libéré l'humanité des contraintes naturelles et sociales. Elle a amélioré l'hygiène, l'habillement, la conservation des aliments, l'accès à l'information et diminué le temps de travail tout en augmentant le temps de loisirs. René Descartes, dans le "Discours de la méthode", exprime ce projet de domination de la nature : « Devenir comme maîtres et possesseurs de la nature. ». La nature ne se contemple plus, elle se soumet, s’exploite. Elle ne chante plus les louanges des dieux, elle est offerte à l’homme pour qu’il l’exploite. Mais Descartes dit « comme » ; seul Dieu est le véritable « maître et possesseur » de la nature. La nature est au service de l’homme, elle lui appartient (« possesseur ») et lui peut en faire ce qu’il veut (« maître »). Il annonce la possibilité d’une technique dont le développement, loin d’être une fatalité pour l’homme, devrait libérer l’humanité, et la libérer en particulier, de la souffrance du travail.
Deux exemples illustrent ce potentiel :

2. La Technique comme Source d'Aliénation

Cependant, l'utilisation des machines a également introduit une nouvelle forme d'aliénation. Karl Marx, dans "Le Capital" (1867), décrit comment le travailleur devient subordonné aux machines et à la division du travail, perdant ainsi la maîtrise de son propre travail.
S’il domine la machine, l'homme est aussi dominé par elle : il soumet ses gestes productifs à la rationalité de celle-ci. La division du travail qui accompagne le machinisme subordonne le travailleur aux conditions mécaniques de la production. Le travail devient moins intéressant, plus répétitif, parcellaire, sans qualification.
La dialectique du maître et de l’esclave de Hegel se vérifie avec la situation de l’homme contemporain au sein de la civilisation technologique : Pour Hegel, le maître devient l’ « esclave de son esclave », et, l’esclave devient le « maître de son maître ». Idem pour notre situation actuelle, l’homme devient l’esclave de la technique, et, la technique devient maîtresse de l’homme.
La technique, en se complexifiant, entraîne une dépendance accrue des hommes aux technologies qu'ils ne comprennent pas toujours. Martin Heidegger, philosophe allemand du XXe siècle, parle d' « arraisonnement » pour décrire comment la technique transforme notre perception du monde, réduisant la nature et l'homme à des ressources à exploiter. « Le Rhin » (1801) dont le poète Hölderlin savait dire la beauté et le mystère n’est plus qu’une énergie électrique potentielle. Toute la nature est devenue, non un objet de contemplation mais un objet de calculs et d’exploitation, un instrument, un produit y compris l’homme lui-même. La nature ne sera plus qu'une « réserve de bois », la montagne « une carrière de pierres », la rivière une « force hydraulique », etc. Comme n'importe quelle autre réalité matérielle, l'homme devient alors purement et simplement une « ressource » (cf. Les directions des « ressources humaines » dans les entreprises) qu'il s'agit d'exploiter et de rentabiliser le plus rationnellement possible le personnel, c'est à dire avec le minimum de coût et de perte...

3. Le « principe de précaution » face aux dangers des technologies

Les sources scientifiques et philosophiques du « principe de précaution » :

Le Rapport Meadows (1972)

Hans Jonas et le Principe de Responsabilité (1979)
 
Le Principe de Précaution (1992)
Adopté en 1992 dans la "Déclaration de Rio" sur l'environnement et le développement, le principe de précaution stipule : « Pour protéger l'environnement, des mesures de précaution doivent être largement appliquées par les États selon leurs capacités. En cas de risques de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l'environnement. » Ce principe préconise des actions préventives face à des incertitudes scientifiques pour éviter des dommages environnementaux potentiels.

Critique du Principe de Précaution

Conclusion : Pour une Technique Dominée par l'Homme

La condamnation radicale de la technique est jugée impossible, étant donné ses nombreux avantages, tels que l'allégement du travail, l'allongement de l'espérance de vie et la prévention de certains phénomènes naturels catastrophiques (famines, inondations, etc.). La technique doit servir les fins que l'homme lui donne. Ses avancées et ses usages doivent être démocratiquement maîtrisés et réfléchis pour éviter des catastrophes ou des formes nouvelles d'oppression.
En conclusion, il est essentiel de maintenir la technique sous contrôle humain. La technique peut être la meilleure et la pire des choses, selon son usage et les fins qu'elle sert. Une approche équilibrée, fondée sur le principe de précaution et une éthique de la responsabilité, est nécessaire pour garantir que le progrès technique bénéficie à l'humanité tout en préservant l'environnement.



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