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Résumé de Cours: Le DEVOIR (2)

COURS DE TERMINALE 2023/2024



Critiques de la morale kantienne

1. Peut-on renoncer à toute forme d’intérêt ?

Kant soutient que l'acte moral doit être désintéressé, distinguant ainsi l'acte accompli « conformément au devoir » (qui peut être motivé par des intérêts personnels) de l'acte accompli « par devoir » (qui est purement moral). Toutefois, cette position fait l'objet de critiques importantes.

Argument contre le désintéressement absolu
Certains philosophes argumentent que l'être humain, en tant qu'être sensible de chair et de sang, est incapable de renoncer à toute forme d'intérêt, même indirect ou dissimulé. Ils posent la question : tout n'est-il pas intérêt ? Chacun ne se préfère-t-il pas à tout autre ? Cette logique de l'intérêt s'oppose à la morale de la pureté défendue par Kant.

Les critiques de Schopenhauer et La Rochefoucauld
Arthur Schopenhauer voit le sentiment amoureux comme une ruse de l'espèce en vue de la reproduction, soutenant que les rapports humains sont guidés par une logique de l'intérêt bien compris. Pour lui, il n'y a pas d'amour véritable du prochain, seulement de l'égoïsme. François de La Rochefoucauld, un moraliste du XVIIe siècle, partage cette vision pessimiste : « Les vertus se perdent dans l’intérêt comme les fleuves se perdent dans la mer. Nos vertus ne sont le plus souvent que des vices déguisés » (Sentences & Maximes). Il suggère qu'il y a un mobile intéressé à chacune de nos actions, et que même les actions apparemment altruistes sont motivées par des intérêts personnels.

Exemples concrets

Conclusion
Ces critiques soutiennent que la morale désintéressée de Kant est irréaliste, car l'humain ne peut pas agir sans aucune forme d'intérêt. En fait, même Kant a admis qu'il est possible qu'aucun acte moral pur n'ait jamais été accompli dans le monde.

2. Faut-il ne jamais mentir ?

Introduction à la morale kantienne
La morale kantienne est fondée sur l'idée que les actions morales doivent être guidées par des principes rationnels et universels. L'impératif catégorique de Kant stipule : « Je dois toujours me conduire de telle sorte que je puisse aussi vouloir que ma maxime devienne une loi universelle ». Pour Kant, cela signifie que certaines actions, comme mentir, ne peuvent jamais être justifiées, quelles que soient les circonstances, car elles ne pourraient pas être universalisées sans contradiction.

La position de Kant sur le mensonge
Kant soutient qu'il ne faut jamais mentir, même dans les situations où mentir pourrait sembler justifiable ou même nécessaire pour éviter un mal plus grand. Par exemple, il propose que même si un paysan cache un persécuté politique et que la police demande si cette personne est présente, le paysan ne doit pas mentir. Selon Kant, mentir violerait l'impératif catégorique et compromettrait la confiance nécessaire à la vie sociale.

La critique de Benjamin Constant
Benjamin Constant, un philosophe du XIXe siècle, critique la position rigide de Kant sur le mensonge. Il argue que l'interdiction absolue de mentir est moralement inacceptable et peut entraîner des conséquences désastreuses. Constant propose une approche plus pragmatique et circonstancielle de la moralité, basée sur l'évaluation des conséquences de nos actions.

Thèse de Benjamin Constant
La thèse de Benjamin Constant se concentre sur l'idée que la vérité n'est pas un absolu moral inconditionnel, mais qu'elle doit être évaluée en fonction de ses conséquences dans des situations particulières. Constant écrit : « Le principe moral qu’il est interdit de mentir, quelque danger qu’il y ait à dire la vérité, est donc aussi loin d’être absolu que le sont les principes les plus universellement respectés. »

Exemple de l'argument de Constant
Constant illustre son argument en utilisant l'exemple du mensonge pour protéger une personne innocente. Supposons qu'une personne innocente se réfugie chez vous pour échapper à des assassins. Si les assassins viennent à votre porte et demandent si cette personne se trouve chez vous, dire la vérité pourrait entraîner la mort de cette personne. Pour Constant, mentir dans cette situation est moralement justifiable, car le devoir de protéger une vie innocente l'emporte sur l'interdiction de mentir.

La nécessité de mentir dans certaines situations
Pour Constant, les règles morales ne doivent pas être suivies aveuglément sans considération des conséquences concrètes. Il soutient que dans certaines situations, mentir peut être non seulement justifiable mais nécessaire pour éviter un mal plus grand. Cette approche reconnaît la complexité des dilemmes moraux réels et la nécessité de jugements contextuels.

Critique de Kant par Constant
Constant critique la rigidité de l'éthique kantienne et son manque de flexibilité face aux situations morales complexes. Il soutient que l'application stricte de l'impératif catégorique peut mener à des résultats moralement inacceptables et contraires à l'intuition morale commune. Constant propose une éthique plus souple, capable de prendre en compte les particularités des situations et les besoins contextuels.

Conséquentialisme et utilitarisme
L'argument de Constant est souvent associé à des approches conséquentialistes et utilitaristes de la moralité. Ces approches évaluent les actions en fonction de leurs conséquences et cherchent à maximiser le bien-être général. John Stuart Mill, dans « L’Utilitarisme », exprime cette idée : « La doctrine qui donne comme fondement à la morale l’utilité ou le principe du plus grand bonheur affirme que les actions sont bonnes ou sont mauvaises dans la mesure où elles tendent à accroître le bonheur ou à produire le contraire du bonheur. »

Conclusion
La critique de Benjamin Constant met en lumière les limites de la rigidité de la morale kantienne, en particulier dans des situations où des conséquences graves peuvent découler d'une adhésion stricte aux principes universels. Constant propose une approche plus nuancée et contextuelle de la moralité, où les actions sont évaluées en fonction de leurs conséquences et de leur capacité à promouvoir le bien-être général. Cette perspective souligne l'importance de la flexibilité morale et de la prise en compte des particularités des situations dans l'évaluation éthique.
 





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