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RÉSISTANCES ALLEMANDES AU NAZISME

RÉSISTANCES ALLEMANDES AU NAZISME

Longtemps déconsidérées par une indéniable germanophobie franco-anglaise qui, après 1945, privilégie la thèse rassurante de la culpabilité collective, les résistances allemandes au nazisme furent aussi victimes de la Guerre froide. La République fédérale d’Allemagne (RFA) préféra en effet, à l’idée gênante d’une résistance communiste, le destin jugé exemplaire d’individus issus des couches libérales et conservatrices, à l’image de l’amiral Wilhelm Canaris (1887-1945), chef de l’Abwehr (service de renseignement militaire), ou du colonel Claus von Stauffenberg (1907-1944). La République démocratique allemande (RDA) fonda quant à elle sa légitimité sur l’antifascisme de la seule classe ouvrière.

Au-delà des grandes tendances sociales qui composent cette opposition intérieure au nazisme - la résistance de gauche (communiste et sociale-démocrate), celle des Églises catholique et protestante, celle de la droite libérale et nationale-conservatrice, celle, enfin, plus diffuse, de la jeunesse étudiante -, il faut insister sur l’extraordinaire variété, et donc sur l’extrême complexité, de ses motivations : simple résistance passive, révolte de la conscience, aspiration à plus de libertés, écœurement devant les massacres, peur du désastre entraînant la fin de l’Allemagne… Cette variété des justifications explique la diversité des actions entreprises, allant du refus de l’embrigadement (telle l’opposition aux Jeunesses hitlériennes des groupements de jeunes autobaptisés les « pirates-edelweiss ») ou de la distribution de tracts (ainsi l’action de la Rose blanche de Hans et Sophie Scholl) à l’organisation d’un réseau d’espionnage (tel celui des intellectuels regroupés autour de Arvid Harnack et de Hans Schulze-Boysen), en passant par la tentative de coup d’État centralisée par le général Ludwig Beck et Carl Friedrich Goerdeler.

Divisées dans leurs objectifs, souvent méprisées par des Alliés qui, en exigeant une « capitulation sans condition » dès 1943, ne leur laissaient guère de chances, ces oppositions se heurtent en outre à une quadruple difficulté : tout d’abord, le loyalisme d’une population traditionnellement fidèle à l’autorité (Obrigkeit) et qui, jusqu’aux derniers jours de la guerre, va malgré tout conserver au « Führer » sa confiance ; ensuite, une coordination d’autant plus impossible qu’au-delà de leurs différences sociales, ces mouvements de résistance n’ont jamais opposé un front uni dans le temps : si les Églises s’étaient opposées au nouveau régime dès 1933 par les voix de Mgr von Galen ou du pasteur Martin Niemöller (1892-1984), il faut attendre 1938 et les menaces d’une guerre jugée aventureuse pour voir un L. Beck et avec lui de nombreux officiers glisser vers l’opposition ; enfin l’existence d’un appareil répressif omniprésent, renforcé par un constant appel à la délation, et une guerre qui, selon le mot de Dietrich Bonhoeffer, allait sans cesse imposer aux conjurés un choix cornélien entre la « nation » et la « survie de la civilisation chrétienne ». L’échec de l’attentat du 20 juillet 1944 mis en œuvre par C. von Stauffenberg, dernier d’une longue série dont Hitler avait toujours réchappé et qui allait entraîner plus de 200 condamnations à mort et 7 000 arrestations, devait sonner le glas de toute opposition organisée.




ABWEHR. Nom du service de renseignement de l’état-major allemand reconstitué après 1919. Placé sous les ordres de l’amiral Canaris (1935-1944), l’Abwehr engagea la lutte contre les organisations de résistance de l’Europe occupée. En février 1944, le service passa sous le contrôle de la SS (Sections de sécurité). Voir Gestapo, OKW.

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