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RÉSISTANCE

Nom donné à l'ensemble des actions menées en Europe pendant la Seconde Guerre mondiale contre le régime hitlérien et l'occupation allemande. • En Europe occidentale • La Résistance française. La France libre • La France libre à partir de 1942 • La Résistance intérieure en France • La Résistance à partir du printemps 1943 • La Résistance en Europe orientale • La Résistance allemande En Europe occidentale À l'été 1940, l'Allemagne occupait le Danemark, la Norvège, les Pays-Bas, la Belgique et le nord de la France. Les premières activités de la Résistance, dans la plupart de ces pays, se manifestèrent vers la fin de 1940. Seul, le Danemark bénéficia, jusqu'en 1943, d'un traitement privilégié en conservant son roi, son gouvernement démocratique et des élections libres. En avr. 1942, le leader conservateur Christmas Möller réussit à s'enfuir à Londres, où il prit la tête d'un comité de « Danois libres ». Les actes de sabotage s'étant multipliés durant l'été 1943, les Allemands désarmèrent l'armée danoise, supprimèrent les libertés politiques et placèrent le roi sous surveillance dans son palais (29 août 1943). La Résistance s'organisa alors sous la direction d'un « Conseil de la liberté » (sept. 1943) : elle se manifesta surtout par d'imposants mouvements de grève (grève générale de Copenhague, juin 1944). En Norvège, le roi Haakon VII et son gouvernement s'étaient réfugiés en Angleterre en juin 1940. Soumis au commissaire du Reich Terboven, puis au gouvernement du collaborationniste Quisling, les Norvégiens adoptèrent, dans leur grande majorité, une attitude antiallemande. La Résistance, en contact étroit avec Londres, ne se livra pas à des opérations de guérilla, mais fit un travail actif de renseignements et de sabotages. Fin 1943, d'importantes manifestations eurent lieu à l'université d'Oslo, et 1 500 étudiants et professeurs furent arrêtés. Aux Pays-Bas, la reine et son gouvernement étaient partis pour Londres en juin 1940. Les nazis, qui considéraient le pays comme une terre germanique, encouragèrent le parti national-socialiste néerlandais (NSB) de Mussert. Cependant, dès 1940, d'anciens officiers de l'armée régulière créèrent des réseaux de renseignements en liaison avec Londres, qui, de son côté, envoya des agents parachutés. La résistance spontanée des Néerlandais s'exprima d'autre part dès le début de l'année 1941 par des manifestations de protestation et par des grèves qui éclatèrent souvent à la suite des déportations de Juifs. À partir de 1942, les nazis commencèrent à fusiller des otages, mais les organisations de Résistance se renforcèrent et se rassemblèrent, en juin 1944, sous l'autorité d'un Grand Comité conseiller de la Résistance, (Grote Advies Commissie der Illegaliteit). Les forces de l'intérieur apportèrent une aide importante aux opérations alliées durant la bataille d'Arnhem (sept. 1944). En Belgique, le roi Léopold III, après la reddition de l'armée belge, se considéra comme prisonnier et refusa de former un gouvernement collaborationniste. Réfugié à Londres, le gouvernement Pierlot reconstitua, avec les débris de l'armée belge échappés à la capitulation de 1940, une force militaire que vinrent grossir les Belges qui, par la France et l'Espagne, réussirent à rallier Londres. La Résistance belge ne se manifesta guère par des maquis (sauf quelques-uns dans les forêts ardennaises), mais par des actes de sabotage, par des services de renseignements, par des réseaux qui facilitaient l'évasion des soldats alliés prisonniers, par la diffusion des journaux clandestins. En juin 1944, toutes les forces de la résistance armée furent réunies dans les Forces belges de l'intérieur (FBI). 000200000D6B00000E50 D65,En Italie, la Résistance prit la suite de la résistance antifasciste, qui remontait aux débuts du régime de Mussolini. La propagande communiste clandestine était déjà très active et l'organe communiste clandestin L'Unità commença à circuler à partir de juin 1942. En mars 1943, plus de 100 000 ouvriers se mirent en grève à Turin, bientôt imités par plus de 130 000 ouvriers milanais. Après la chute de Mussolini (25 juill. 1943), l'Italie se trouva coupée en deux, le Nord et le Centre de la péninsule restant occupés par les Allemands, le Sud étant déjà conquis par les Alliés. Le gouvernement royal de Badoglio, réfugié dans le Sud, déclara la guerre au Reich, alors que, dans le Nord, Mussolini, sous la pression des nazis, organisait un nouvel État fasciste, la République sociale de Salo. La Résistance ne se manifesta guère dans le Centre de la péninsule, ni lors du débarquement allié d'Anzio (janv. 1944), ni même après l'occupation de Rome par les Alliés (juin 1944). Elle fut au contraire très active dans le Nord, où elle trouva ses cadres parmi les militants du parti communiste et du parti d'Action, et ses combattants parmi les soldats démobilisés lors de l'armistice de sept. 1943, chez les jeunes gens qui prenaient le maquis pour échapper à l'enrégimentement dans les nouvelles forces fascistes, et, en général, dans les classes populaires paysannes et surtout ouvrières. En milieu urbain, la Résistance fut surtout l'œuvre des communistes, qui formèrent les Groupes d'action patriotique (GAP) et les Escouades d'action patriotique (SAP). Dans les régions rurales, les partisans furent organisés en brigades de 100 à 300 hommes, pour la plupart caractérisées politiquement : brigades communistes Garibaldi, brigades socialistes Matteotti, brigades Justice et Liberté du parti d'Action. De nouvelles grèves éclatèrent dans le Nord en mars et en juin 1944. En déc. 1944, à la suite d'un accord entre les partisans, d'une part, les autorités militaires alliées et le gouvernement royal de Badoglio, d'autre part, toutes les forces de partisans furent placées sous l'autorité du Comité de libération nationale de la Haute-Italie (CLNAI) ; la direction militaire du commandement supérieur des partisans fut confiée au général Raffaele Cadorna. Au printemps 1945, lors de l'ultime offensive alliée, le CLNAI ordonna l'insurrection générale des partisans. Ceux-ci se rendirent maîtres de la plupart des grandes villes du Nord avant l'arrivée des troupes alliées. Ils exécutèrent Mussolini et les « hiérarques » fascistes. La Résistance française. La France libre Le général de Gaulle arriva à Londres le 18 juin 1940 afin de poursuivre la lutte aux côtés de l'Angleterre. Le soir même, et les jours suivants, il prononça au micro de la BBC plusieurs allocutions appelant les Français à la résistance et à la désobéissance aux ordres du gouvernement Pétain. Reconnu par Churchill comme « chef des Français libres » (28 juin), de Gaulle signa, le 7 août, un accord avec le gouvernement britannique. Celui-ci s'engageait à « assurer la restauration intégrale de l'indépendance et de la grandeur de la France », autorisait la constitution d'une force française composée de volontaires, sous le commandement suprême du général de Gaulle, lequel acceptait les directives générales du commandement britannique ; il autorisait également le général de Gaulle à créer un organisme civil nécessaire à l'organisation de sa force. 000200000DB500001BB5 DAF,Le premier groupe de ces Français libres fut constitué par des marins qui avaient réussi à s'échapper des ports français, par des évacués de Norvège et de Dunkerque, par quelques éléments d'infanterie coloniale venus de Syrie. À la fin de juill. 1940, les forces de la France libre comprenaient environ 7 000 hommes, une petite flottille d'avisos, de sous-marins et de bâtiments de commerce, ainsi que quelques avions. Parmi les premières personnalités ralliées à de Gaulle se trouvaient les généraux Catroux et Legentilhomme, des officiers tels que Larminat, Kœnig, d'Estienne d'Orves, Hauteclocque (Leclerc), Dewavrin (Passy), Magrin-Verneret (Monclar), Messmer, Clostermann, le juriste Cassin, des administrateurs tel René Pleven, enfin des journalistes (M. Schumann, J. Marin, J. Oberlé, A. Labarthe) qui constituèrent, à la BBC, l'équipe de l'émission « Les Français parlent aux Français ». Le gouvernement du maréchal Pétain fit condamner à mort par contumace le général de Gaulle (2 août 1940). Le premier souci des Français de Londres fut de faire entrer sous leur autorité les territoires d'outre-mer. L'Afrique-Équatoriale française se rallia à de Gaulle (26/28 août 1940), imitée au mois de sept. par les Établissements français de l'Océanie, les comptoirs de l'Inde et les Nouvelles-Hébrides. La résolution du gouverneur général de l'Afrique-Occidentale, Boisson, fit échouer la tentative du général de Gaulle sur Dakar (23/25 sept. 1940), et les Français libres ne purent se rendre maîtres du Gabon qu'après de violents combats avec les Français de Vichy (oct./nov. 1940). Dès la fin de 1940, des contingents de soldats français étaient engagés aux côtés des Anglais dans la campagne de Libye (v.) et dans la campagne d'Éthiopie. En janv./mars 1941, la colonne Leclerc, remontant du Tchad, se mit à harceler les garnisons italiennes du Fezzan, avant de s'emparer de Koufra (1er mars 1941). L'année 1941 vit une crise aiguë dans les rapports entre de Gaulle et Churchill. Le chef de la France libre s'efforçait en effet de déborder les limites fixées à son action par l'accord franco-anglais du 7 août 1940. De Gaulle voulait donner à son mouvement un caractère politique et constituer un véritable gouvernement français en exil reconnu par les Alliés. Une telle ambition se heurtait à la méfiance de Churchill et à l'opposition décidée de Roosevelt, bien que les États-Unis ne fussent pas encore entrés dans la guerre. Jusqu'en 1943, en effet, de Gaulle ne fut entouré d'aucune personnalité politique de premier plan. Sa représentativité apparaissait donc fort contestable aux gouvernements alliés. En outre, les États-Unis avaient reconnu le gouvernement de Vichy et considéraient de Gaulle comme un aspirant dictateur. De Gaulle n'en constitua pas moins le Comité national de la France libre (24 sept. 1941), qui était l'embryon d'un gouvernement. Reconnu quelques jours après par l'URSS, c'est vers la Résistance métropolitaine qu'il se tourna. Simultanément, l'action de la France libre ne cessait de s'étendre sur les théâtres d'opérations militaires. Au cours des années 1941 et 1942, les FFL se renforcèrent considérablement : elles se distinguèrent notamment en Libye par leur défense de Bir Hakeim (mai/juin 1942). Mais l'occupation de Madagascar par les Anglais (mai 1942) suscita de nouvelles difficultés entre le gouvernement britannique et de Gaulle qui fut tenu par les Américains complètement à l'écart de la préparation du débarquement allié en Afrique du Nord (nov. 1942). 000200000C1B00002964 C15,La France libre à partir de 1942 Le général de Gaulle eut les plus grandes difficultés à s'établir en Afrique du Nord, où les Américains, après l'assassinat de l'amiral Darlan (24 déc. 1942), apportèrent leur soutien au général Giraud, nommé haut-commissaire. En mars 1943, Churchill refusait encore à de Gaulle l'autorisation de se rendre en Afrique du Nord. C'est la Résistance intérieure qui, finalement, fit pencher la balance en faveur de Charles de Gaulle. Celui-ci, au cours de l'année 1942, avait entrepris, par l'intermédiaire de Jean Moulin, une vaste offensive de ralliement auprès des milieux politiques et syndicalistes de la France occupée. Alors que Giraud rassemblait derrière lui des Français antiallemands mais favorables à l'esprit de la « Révolution nationale », de Gaulle, par son opposition radicale à tout ce que représentait Vichy, devenait l'espoir, tant des anciens parlementaires de la IIIe République hostiles à Pétain que des jeunes chefs qui s'affirmaient dans la Résistance métropolitaine. Il vit ainsi arriver vers lui des personnalités radicales et socialistes telles que Mendès France, A. Philip, Queuille, V. Auriol, J. Moch, mais aussi des communistes (F. Grenier), fidèles à la ligne du gouvernement soviétique qui avait reconnu officiellement le Comité national de la France libre. La constitution, rue du Four, du Conseil national de la Résistance (27 mai 1943) montra l'ampleur des progrès du gaullisme dans la métropole. Et le CNR trancha le différend de Gaulle-Giraud en confiant au premier la direction politique, au second les affaires militaires. À la fin de mai 1943, de Gaulle arriva à Alger. Il constitua (3 juin 1943) le Comité français de libération nationale (CFLN), puis s'employa à écarter Giraud de la coprésidence de cet organisme (oct. 1943) et de son poste de commandant en chef (avr. 1944). Au printemps 1944, de Gaulle apparaissait ainsi comme le chef de toute la Résistance. Le CFLN, qui, à côté de gaullistes de la première heure (Catroux, Pleven, Diethelm), comprenait des personnalités de l'ancien régime républicain (Mendès France, Le Trocquer, R. Mayer, Jacquinot), des communistes (Billoux, Grenier) et des représentants de la Résistance intérieure (d'Astier de La Vigerie, A. Tixier, H. Frenay...), s'érigea en « gouvernement provisoire de la République française » (3 juin 1944) et, par la création à Alger d'une Assemblée consultative provisoire (sept. 1943), se donna l'allure d'un véritable gouvernement démocratique, émanant de la représentation nationale. Toutefois, les « trois Grands » (États-Unis, Grande-Bretagne, URSS) ne le reconnurent qu'en juill. 1944. Le CFLN put mettre sur pied, dès 1943, de véritables armées qui participèrent à la reconquête de la Tunisie et à la campagne d'Italie, puis au débarquement allié en Provence (août 1944). Les troupes françaises furent présentes lors de la bataille de Normandie ; à force de négociations avec les Américains, la division Leclerc (2e DB), intégrée dans le 5e CA américain, entra la première dans Paris au soir du 24 août 1944. La Résistance intérieure en France 000200000C0900003579 C03,À côté de cette résistance « gaulliste », d'autres mouvements s'étaient développés dès la fin de 1940, auxquels vint s'adjoindre, à partir de juin 1941, la force de la résistance communiste, qui réussit à conserver jusqu'au bout son indépendance de fait. La zone Sud de la métropole n'ayant été occupée par les Allemands qu'en nov. 1942, les mouvements de résistance qui s'y formèrent dès l'été 1940 prirent tout de suite un caractère fortement politique. Dès ses débuts, cette résistance se dressa autant contre le régime conservateur de Vichy que contre les Allemands. Le 12 août 1940, Henri Frenay publia son premier manifeste, puis il fonda le Mouvement de libération nationale, qui, en 1941, fusionna avec divers groupes pour former le mouvement Combat (Frenay, C. Bourdet, F. de Menthon, P.H. Teitgen, G. Bidault, R. Roure). Parmi les autres mouvements importants de la zone Sud, il faut citer Libération (nov. 1940) et Francs-Tireurs (1941). Ces groupes trouvèrent leurs premiers cadres parmi les membres des professions libérales, les universitaires, les syndicalistes, majoritairement socialistes ou démocrates-chrétiens. En dehors de l'organisation de filières d'évasion vers la Suisse ou l'Espagne, la Résistance de la zone Sud, jusqu'en 1942, ne put avoir beaucoup d'activités pratiques. En revanche, elle se livra à un travail important d'élaboration doctrinale, à la conception d'une République nouvelle, démocratique et sociale, presque aussi différente de la IIIe République que du régime de Vichy. Une presse clandestine, sous la forme encore très modeste de simples feuilles ronéotypées, fit son apparition durant l'hiver 1940/41. Dans la zone Nord occupée, les conditions étaient bien différentes ; aussi la Résistance y prit-elle, dès le début, un caractère militaire : espionnage et sabotage. En oct. 1940, des saboteurs furent fusillés par les Allemands. À la différence encore de ce qui se passait en zone Sud, cette Résistance fut, à partir de 1940, en contact avec Londres et avec de Gaulle. Le 2e bureau des FFL commença à monter ses réseaux de renseignements avec des agents envoyés d'Angleterre (entre autres, l'officier de marine d'Estienne d'Orves). En oct. 1941 fut créé à Londres le Bureau central de renseignement et d'action militaire ou BCRA (Passy, Soustelle), qui, en liaison étroite avec les services britanniques, coordonna les services de renseignements de la France métropolitaine, puis assura les envois d'hommes, d'argent et de matériel à la Résistance. Le colonel Rémy (Gilbert Renault) fonda l'important réseau de renseignements « Confrérie Notre-Dame ». Les premiers mouvements de zone Nord comptèrent parmi leurs cadres une proportion importante d'anciens officiers. À l'exception de Libération-Nord, qui groupait en majorité des socialistes, ils étaient pour la plupart apolitiques. Les plus importants de ces mouvements, en dehors du petit groupe des intellectuels du musée de l'Homme, apparu en juill. 1940, furent l'Organisation civile et militaire (OCM), Ceux de la Résistance, Ceux de la Libération, Défense de la France. 00020000102C0000417C 1025,Des journaux clandestins commencèrent à circuler, mais l'esprit de résistance était surtout entretenu par l'écoute de la radio anglaise, interdite par les autorités d'occupation. L'effet psychologique de cette guerre des ondes devait être considérable, surtout après 1943, lorsque la propagande nazie s'efforça de cacher l'ampleur des reculs de la Wehrmacht. Par des « messages personnels », la BBC restait en contact avec les organisations résistantes. Mais, à la fin de juin 1941, la résistance communiste fit son apparition. Tant que l'URSS avait été l'alliée de l'Allemagne hitlérienne, la plupart des militants communistes avaient adopté un profil bas à l'égard des occupants. Après le début de l'agression hitlérienne contre l'Union soviétique (22 juin 1941), les communistes s'engagèrent dans la Résistance avec discipline et avec une résolution farouche. Leur principal organisme fut le Front national, dont les postes de commande étaient entre les mains de militants du parti, mais qui s'efforça de rallier des hommes de tendances très diverses, y compris d'anciens pétainistes. Sans communications avec Londres, les résistants communistes se détournèrent du travail de renseignement. Leur action tendit à placer l'armée d'occupation dans une situation d'insécurité permanente, afin d'amener les Allemands à prendre des mesures de plus en plus rigoureuses et à créer ainsi une rupture irréparable entre eux et la population. Le premier attentat contre un militaire allemand fut commis à Paris, le 21 août 1941, par le militant communiste Fabien. Les Allemands réagirent par la terreur et fusillèrent des otages. Le 29 août suivant, d'Estienne d'Orves et deux autres Français furent exécutés pour espionnage. Particulièrement tragiques furent les fusillades de Châteaubriant, en Bretagne, ordonnées le 22 oct. 1941, en réplique au meurtre du commandant allemand de Nantes. À Paris, au Mont-Valérien, de nombreuses exécutions d'otages eurent lieu également. En même temps, les Allemands commencèrent à déporter les résistants, et l'année 1941 fut marquée par les deux premières rafles de Juifs. Dans ces circonstances, la position de Vichy devenait de plus en plus intenable : des tribunaux français d'exception, dits « sections spéciales », furent créés pour la répression anticommuniste ; le ministre de l'Intérieur de Vichy, Pucheu, se trouva même associé aux exécutions de Châteaubriant. Ainsi, au bout de quelques mois à peine, les méthodes d'action communistes se révélèrent particulièrement efficaces : elles avaient acculé les autorités d'occupation à une répression aveugle et elles forçaient le gouvernement de Vichy à se déconsidérer en aidant les Allemands dans la répression. Mais, à Londres, le général de Gaulle n'entendait pas laisser ainsi passer la Résistance intérieure sous le contrôle exclusif des communistes. À partir de déc. 1941, par l'intermédiaire de Jean Moulin, de Gaulle s'employa à resserrer les liens entre Londres et les mouvements de la métropole. Il obtint ainsi le ralliement d'Henri Frenay (Combat) et d'Emmanuel d'Astier de La Vigerie (Libération). Les trois grands mouvements résistants de la zone Sud furent unis dans les Mouvements unis de la Résistance (MUR), qui gênèrent considérablement les progrès dans cette région du Front national communisant. À partir de 1943, de Gaulle s'appuya délibérément sur la Résistance intérieure pour faire la preuve de sa représentativité aux yeux des Alliés face à Giraud. Cette tactique compliqua encore les problèmes qui se posaient à la Résistance : en effet, par l'intermédiaire de Jean Moulin, de Gaulle imposa la reconstitution des partis démocratiques de la IIIe République, qui avaient à ses yeux l'avantage d'être connus des Alliés. Sous la pression gaulliste, le CNR comprit, à côté des représentants des divers mouvements résistants (Front national, Ceux de la Libération, Ceux de la Résistance, Libération-Nord, Libération-Sud, OCM, Combat, Francs-Tireurs), des représentants des organisations syndicales, des délégués du parti communiste, du parti socialiste, du parti radical, des démocrates populaires et de la droite conservatrice. 000200000D5C000051A1 D56,La Résistance à partir du printemps 1943 Au printemps de 1943, les premiers maquis commençaient à se former avec des jeunes gens qui fuyaient le Service du travail obligatoire en Allemagne (STO). Ces maquis s'implantèrent surtout dans les régions difficilement accessibles du Massif central, du Sud-Est, de l'Est, et aussi dans le Sud-Ouest. On a estimé le nombre des maquisards, en 1944, à 30 ou 40 000. Contre les maquis, Vichy lança les forces de la Milice, les gardes mobiles, des forces de répression qui opéraient tantôt seules, tantôt en liaison avec la police allemande et les SS. Des régions entières devinrent des zones de guerre civile où tortures et atrocités contre les résistants se multiplièrent. Malgré la formation du CNR (dont le premier président, Jean Moulin, fut arrêté le 21 juin 1943), l'unification de la Résistance ne se fit que très imparfaitement. Au début de 1944, les MUR se fondirent avec les mouvements Résistance, Défense de la France, Lorraine et Voix du Nord pour former le Mouvement de la libération nationale (MLN), qui devint la principale organisation non communiste de la Résistance. Sur le plan militaire, on distinguait l'Armée secrète (AS) et l'Organisation de résistance de l'armée (ORA), encadrées par d'anciens officiers et sous-officiers de l'armée régulière, d'une part, les Francs-Tireurs et Partisans (FTP), à prédominance communiste, d'autre part. Selon leurs affinités ou selon la situation locale, les maquis se rattachèrent à l'une de ces organisations. Les envois d'armes effectués depuis Londres n'allaient pas sans discrimination politique, généralement au détriment des FTP. En mars 1944 furent constituées, sous le commandement du général Kœnig, les Forces françaises de l'intérieur (FFI), qui regroupèrent l'AS, l'ORA, les maquis et les FTP. En outre, l'accord s'était fait sur le programme du CNR (15 mars 1944), qui réclamait, non seulement une sévère épuration, mais des réformes de structures radicales de l'économie. En dépit du manque d'armes, FFI et FTP passèrent à l'action dès le débarquement allié en Normandie (6 juin 1944). Dans le plan allié, leur rôle consistait essentiellement à entraver, sur les arrières du front, les communications routières, ferroviaires, téléphoniques et télégraphiques de la Wehrmacht. Ainsi la division SS Das Reich, qui perpétra les massacres de Tulle et d'Oradour-sur-Glane (juin 1944), fut-elle soumise à un harcèlement incessant. Entre juin et août 1944, 1 800 locomotives et plus de 6 000 wagons furent immobilisés par l'action de la Résistance. Dans le Sud-Est, où le débarquement allié de Provence ne se produisit que le 15 août 1944, les maquisards prirent des initiatives qui dépassaient de beaucoup les plans élaborés à Londres. Ceux du Vercors, qui combattaient depuis le début de juin, furent exterminés ou dispersés à la fin de juill. 1944, à la suite d'opérations aéroportées menées par des unités SS. D'autres réussirent cependant, comme les maquisards de la Haute-Loire (Mont-Mouchet), à immobiliser des troupes allemandes qui eussent été précieuses sur le front de Normandie. Dans le Dauphiné, les Alpes de Provence, la vallée du Rhône, l'action des FFI facilita l'avance des armées débarquées sur la côte méditerranéenne. Dans le Centre et le Sud-Ouest, évacués par les troupes allemandes, FFI et FTP substituèrent le gouvernement révolutionnaire des comités de libération aux autorités de Vichy. 0002000014CC00005EF7 14C5,À Paris, l'insurrection, préparée par la grève de la police, commença le 19 août 1944, mais la garnison allemande, sous les ordres de von Choltitz, résista jusqu'à la capitulation du 25 août 1944. Le 25 août, de Gaulle était bien décidé à ne pas laisser s'instaurer en France un pouvoir insurrectionnel issu directement de la Résistance. Le rôle de celle-ci, à ses yeux, avait été de concourir à la Libération, non de faire une révolution. Le jour même de son arrivée, à l'Hôtel de Ville, il écarta nettement le patronage que tentaient de lui imposer les chefs du CNR et de la Résistance. Au cours des trois mois qui suivirent, de Gaulle l'emporta face à la fraction politiquement la plus avancée de la Résistance. Les FFI furent dirigés vers les « poches » allemandes de l'Atlantique ou intégrés dans la Ire armée (de Lattre de Tassigny). L'action du général fut facilitée par les directives que les communistes français recevaient de Staline, hostile à tout coup d'État en Europe occidentale qui aurait pu le séparer de ses alliés anglo-américains. En échange de l'amnistie accordée à Maurice Thorez, les « milices patriotiques » issues de la résistance communiste furent dissoutes dès le 28 oct. 1944. Les hommes de la Résistance jouèrent un grand rôle dans la vie politique française de l'après-guerre, mais individuellement. Quant aux formations politiques de la Résistance, comme le Front national et le Mouvement de libération nationale, elles ne tardèrent pas à se désagréger. Les élections d'oct. 1945 marquèrent la résurrection des partis. La Résistance en Europe orientale En 1939, la Tchécoslovaquie était passée sous la domination allemande. Les oppositions entre Tchèques et Slovaques furent exploitées et aboutirent à la formation d'un État slovaque, dont la résistance ne se développa que dans les dernières années de la guerre, sous direction communiste. Un soulèvement de partisans eut lieu en août 1944, à l'approche des armées soviétiques, mais il fut écrasé par les Allemands deux mois plus tard. Parallèlement, un gouvernement tchécoslovaque s'était reconstitué à Londres, sous la présidence de Benès, en 1940. Il resta en liaison radio avec d'anciens militaires qui, dans le « protectorat de Bohême-Moravie », avaient créé des réseaux de renseignements et de sabotage. La principale action de la Résistance tchèque - l'attentat mortel contre le protecteur SS Heydrich (mai 1942) - fut exécutée par des agents tchèques parachutés d'Angleterre. Les SS y répliquèrent par le massacre de Lidice. La Pologne, à la fin de sept. 1939, fut partagée entre l'Allemagne et l'URSS. Mais un gouvernement polonais, sous la présidence du général Sikorski, fut reconstitué en France en 1939, et il passa à Londres en 1940. Avec des Polonais qui avaient réussi à fuir leur pays occupé ou qui résidaient déjà en Europe occidentale, une armée polonaise fut rapidement mise sur pied. Elle fut engagée dans la campagne de France en juin 1940, puis participa aux côtés des Anglais à la guerre de Libye. Après l'attaque allemande contre l'URSS (juin 1941), Staline libéra les soldats polonais tombés aux mains de l'armée soviétique en 1939 (mais un grand nombre d'officiers polonais avaient été sommairement exécutés à Katyn (v.). Ces prisonniers libérés formèrent, sous le commandement du général W. Anders, de nouvelles armées qui participèrent brillamment à la campagne d'Italie puis, de Normandie (1944/45). Au début de 1945, le gouvernement polonais de Londres avait sous ses ordres près de 200 000 soldats. En Pologne dès la fin de 1939, de petits groupes de résistance s'étaient formés ; en janv. 1940, ils fusionnèrent en une organisation unique, auprès de laquelle le gouvernement polonais de Londres envoya un délégué. Après l'entrée en guerre de l'URSS, la découverte du massacre de Katyn provoqua la rupture des relations entre le gouvernement polonais de Londres et Moscou (avr. 1943), et aboutit à la formation de deux mouvements de résistance polonais. À la fin de 1943 fut formé un Conseil national populaire, prosoviétique, où les communistes jouaient un rôle prépondérant ; il prit le nom de Comité polonais de libération nationale en juill. 1944. Au printemps de 1944, le gouvernement polonais de Londres avait, de son côté, renforcé l'organisation de la Résistance intérieure. Son délégué en Pologne, Jan S. Jankowski, fut nommé Premier ministre adjoint (avr. 1944) ; il constitua un Conseil des ministres de l'intérieur, assisté d'un Conseil de l'union nationale, qui comprenait des représentants de tous les partis politiques, sauf les communistes. La Résistance armée prit le nom d'Armée de l'intérieur : elle eut pour chef le général Stefan Rowecki, dit Grot, puis, après l'arrestation de celui-ci, au début de 1944, le général Bor Komorowski. Le 1er août 1944, celui-ci déclencha l'insurrection de Varsovie, mais la Résistance polonaise ne reçut aucune aide des armées soviétiques, pourtant parvenues sur la rive droite de la Vistule, et, après soixante-trois jours de combats héroïques, elle fut finalement écrasée, comme l'avait été, au printemps 1943, le ghetto juif qui s'était insurgé (v. VARSOVIE). Cette élimination par la Wehrmacht de la Résistance non communiste laissa le champ libre au comité prosoviétique de Lublin (v.), qui s'érigea en gouvernement provisoire à la fin de 1944. 000200000DA9000073BC DA3,La Yougoslavie fut un des pays occupés où la Résistance fut la plus active. La péninsule balkanique, avec son relief montagneux, avec un réseau routier et ferroviaire peu développé, se prêtait particulièrement bien aux opérations de guérilla. Après la foudroyante offensive de la Wehrmacht dans les Balkans (avr./mai 1941), le territoire yougoslave fut partagé entre plusieurs États : la Croatie, qui englobait également la Bosnie, passa sous la dictature du chef fasciste des oustachis, Ante Pavelic ; la Serbie fut administrée par le gouvernement fantoche du général Neditch ; l'Italie avait annexé une partie de la Slovénie, la côte et les îles dalmates. En Croatie, les hommes de Pavelic se livrèrent à des massacres systématiques de Serbes qui se réfugièrent dans les montagnes et les forêts. En Serbie et en Herzégovine, le colonel D. Mihaïlovitch constitua dès le début de l'été 1941, avec des débris de l'armée régulière, des forces de guérilla qui prirent le nom de tchetniks, d'inspiration monarchiste. Mais, vers la même époque, apparaissait une autre force de résistance, celle des partisans, levée par le chef communiste croate Josip Broz, dit Tito. Dès la fin de 1941, ces deux groupes se livraient une guerre ouverte. Les tchetniks de Mihaïlovitch étaient en majeure partie des Serbes anticommunistes. Les partisans de Tito se recrutaient, au contraire, principalement parmi les minorités (Croates, Bosniaques, Monténégrins), et, s'ils ouvraient leurs rangs à des hommes de tous les partis, même à d'anciens fonctionnaires de la monarchie, leur encadrement supérieur était tenu fermement par des communistes. Les tchetniks commencèrent à collaborer avec les Italiens contre les partisans titistes non serbes. Tito prêchait au contraire l'union de tous les Slaves du Sud pour la lutte contre l'occupant allemand et la création d'une Yougoslavie fédérale, démocratique et sociale. Tandis que les partisans déployaient une activité sans cesse accrue, les tchetniks s'enlisèrent dans l'inaction et dans la collaboration avec l'Axe, et ils furent désertés par leurs éléments les plus dynamiques, qui rallièrent Tito. Parmi les chefs alliés, Churchill fut le premier à donner sa confiance et son aide à Tito, qui commença à recevoir un matériel important après l'ouverture du front d'Italie (1943). À cette époque, les partisans contrôlaient déjà de vastes territoires en Bosnie. Hitler se trouva amené à détourner des unités allemandes vers la Yougoslavie. Après la défection de l'Italie (sept. 1943), la Wehrmacht dut prendre seule en main la lutte contre les partisans. Durant l'hiver 1943/44, une grande opération fut menée, pour en finir avec Tito, par dix-huit divisions allemandes, neuf divisions bulgares et les forces locales des oustachis et des milices serbes de Neditch. L'organisation de Tito, qui comprenait, depuis la fin de 1942, une administration civile et, depuis 1943, une Assemblée nationale et un g




RÉSISTANCE. Nom donné à l'ensemble des actions clandestines menées au cours de la Seconde Guerre mondiale par différents pays d'Europe contre l'occupation allemande (Pays-Bas, Belgique, Norvège, Danemark, France, Tchécoslovaquie, Pologne, Yougoslavie, Grèce, URSS, mais aussi Allemagne et Italie). Ses modes d'action furent variés (tracts et journaux clandestins, travail de renseignement et de liaison, action armée). En France, la Résistance fut à la fois extérieure et intérieure. La Résistance extérieure s'organisa à Londres (qui accueillit durant la guerre sept gouvernements en exil) après l'appel du 18 juin 1940 lancé par le général de Gaulle avec la constitution du Bureau central de renseignements et d'action (BCRA), la création des FFL (Forces françaises libres) et le CFLN (Comité français de libération nationale). La Résistance intérieure en zone nord et en zone sud débuta dès la fin de 1940, renforcée en 1941 par l'engagement massif des communistes. La création du Conseil national de la Résistance en 1943 fédéra les divers réseaux (Jean Moulin) ; quant aux organisations militaires (Francs-tireurs et partisans, Armée secrète, Organisation de résistance de l'armée), elles furent regroupées dans les FFI (Forces françaises de l'intérieur) qui combattirent aux côtés des Alliés à la Libération. En Allemagne, après le démantèlement d'un réseau clandestin de renseignements d'obédience communiste (Rote Kappelle), la Résistance prit la forme d'une opposition au sein de l'armée qui culmina avec l'attentat manqué contre Hitler le 20 juillet 1944. En Italie, la chute de Mussolini en 1943 permit aux antifascistes italiens de constituer un Comité de libération nationale. Plus de 60 000 partisans combattirent avec les Alliés pour la libération de l'Italie (1944-1945). Voir Brossolette (Pierre), Passy (Colonel), Tito.


RÉSISTANCE (Parti de la). Nom donné en France sous la monarchie de Juillet aux orléanistes de tendance conservatrice soutenus par Louis-Philippe. Le parti de la résistance était hostile, à l'intérieur, à toute concession démocratique et favorable, à l'extérieur, à une politique de prudence. Ce parti, opposé au parti du Mouvement, fut dirigé par Guizot, de Broglie et Casimir Perier qui influencèrent le pouvoir à partir de 1832 jusqu'à la révolution de 1848. Voir Molé (Louis).

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