Databac

REGNARD Jean-François 1655-1709

REGNARD Jean-François
1655-1709

Auteur dramatique, né à Paris. Homme heureux, dilettante adorable, il dilapide l’héritage paternel avec des filles faciles ; part à la découverte du monde, Italie, Hollande, Suède - et même au Grand Nord, d’où il rapporte son délicieux Voyage en Laponie -, se fait enlever, comme dans Les Fourberies de Scapin, par les « Barbaresques » (1678) et devient auteur à quarante ans, par hasard et un peu aussi, tout de même, par plaisir: Le Joueur (1696), Le Distrait (1697), Les Folies amoureuses (1704), Le Légataire universel (1708). Il ne dédaigne pas même les livrets d’opéra-ballet ; ainsi, Le Carnaval de Venise (où le prologue, dans l’esprit de nos « effets scéniques » modernes, représente les machinistes en train d’installer les montants du décor tandis que les acteurs s’habillent).
Regnard a mauvaise réputation dans les manuels scolaires, où on le traite d’« amuseur ». C’est d’ailleurs vrai, mais la question est : est-ce infamant? Car après tout, sa bonne humeur est à ce point communicative qu’on oubliera vite, pour peu qu’on l’écoute, de le rappeler à ses devoirs de moraliste. « Châtier les mœurs en riant », selon la définition de son contemporain Santeul, voilà une devise dont Regnard ne se soucie guère. Il est du côté de ses peu exemplaires personnages : du côté de son héros Valère, le Joueur, qui court vendre le portrait offert un instant auparavant par sa fiancée ; ou de son Distrait, Léandre, qui donne rendez-vous, en même temps, aux deux femmes qu’il aime. Théâtre frivole, futile. Immoral, enfin, sans aucun doute.
Tous ces héros désœuvrés, ahuris, pique-assiettes, coureurs de dots et coureurs de cottes, mufles, cyniques, écervelés, tout cet univers de Regnard est plus proche de la comédie italienne, avec ses Gilles, ses docteurs Pantalon et ses Colombines, que de la « comédie de caractères » à la manière classique. Le voisinage de Molière a fait du tort à ce pur et simple théâtre du plaisir ; mais notre époque qui a redécouvert Labiche (ou pis encore, Feydeau) et qui plus récemment s’est réconciliée avec Crébillon fils, sourira peut-être un jour au trop léger Regnard.

■ Œuvres - Théâtre, éd. par R. Moland (Classiques Garnier). ■ Critique- A. Calame, Regnard, sa vie et son oeuvre (PUF, 1961 ).

Liens utiles