règle des trois unités
règle des trois unités
Principe consistant à fixer les règles du théâtre classique (XVIIe s.). On distingue : — l'unité d'action : la pièce doit s'articuler autour d'une seule action ; — l'unité de temps : l'action doit tenir en 24 heures ; — l'unité de lieu : la pièce doit se dérouler en un lieu unique.
Commentaire Le théâtre classique obéit à des principes très stricts : à la règle des trois unités, il faut ajouter celle de la bienséance (ne rien montrer qui puisse choquer la morale ou le bon goût du public). S'inspirant de la Poétique d'Aristote (philosophe grec, 384-322 av. J.-C.), ces règles ont été créées en réaction contre les extravagances de l'esthétique baroque qui triomphait au début du siècle, notamment dans la tragi-comédie. Dans la France de Richelieu, elles traduisent un souci de l'ordre qui, dépassant le domaine de l'art dramatique, exprime parfaitement le climat social et politique de l'époque. Quelquefois discutées en raison des invraisemblances qu'elles entraînaient, elles ont réglé l'art dramatique chez les grands auteurs de l'époque (Corneille, Molière, Racine). Deux siècles plus tard, c'est le romantisme qui a libéré la tragédie et la comédie des contraintes de l'âge classique, pour donner naissance au drame.
Citations Qu'en un lieu, qu'en un jour, un seul fait accompli Tienne jusqu'à la fin le théâtre rempli. (Boileau, Art poétique, chant III.)
Il faut observer l'unité d'action, de lieu, et de jour, personne n'en doute ; mais ce n'est pas une petite difficulté de savoir ce que c'est que cette unité d'action, et jusques où peut s'étendre cette unité de jour et de lieu. (Corneille, Discours de l'utilité et des parties du poème dramatique, 1660.) Dorante. — [...] Je voudrais bien savoir si la grande règle de toutes les règles n'est pas de plaire, et si une pièce de théâtre qui a attrapé son but n'a pas suivi un bon chemin. Veut-on que tout un public s'abuse sur ses sortes de choses, et que chacun n'y soit pas juge du plaisir qu'il y prend ? (Molière, la Critique de l'Ecole des femmes, sc. 6.)
UNITÉS (règle de trois unités). Règle, issue d’Aristote, qui s’est imposée au théâtre classique français, au XVIIe siècle. Les trois unités sont : — l’unité d’action : un seul événement central doit nourrir l’intrigue, depuis l’exposition jusqu’au dénouement; l’unité d’action accroît l’émotion du spectateur en concentrant son intérêt ; — l’unité de temps : tout doit se passer en une seule journée, car il paraîtrait invraisemblable que le spectateur assiste en deux heures à une histoire s’étendant sur plusieurs mois ou plusieurs années : l’idéal est celui d’une action dont la durée (fictive) coïncide avec la durée (réelle) de la représentation ; — l’unité de lieu : l’action devant se passer en un jour, la vraisemblance exige qu’elle se déroule en un seul endroit (une ville à la limite, un palais de préférence et, si possible, une pièce de ce palais, qui puisse coïncider avec la scène où évoluent les personnages) ; cette règle, qui ne vient pas d’Aristote, mais découle logiquement des deux autres, explique que tant d’actions ponctuelles, qui alimentent la trame de l’histoire, soient rapportées par des témoins, au lieu d’être directement mises en scène. La règle des trois unités sera mise en cause à l’époque romantique, notamment par Victor Hugo dans la Préface de Cromwell (1827), qui retourne contre elle le principe de vraisemblance; «L’action, encadrée de force dans les vingt-quatre heures, est aussi ridicule qu'encadrée dans le vestibule. Toute action a sa durée propre comme son lieu particulier. »
UNITES (règle des unités) - Règle qui, dans l’esthétique classique, imposait aux dramaturges de présenter sur scène une seule action (unité d’action), se déroulant en une seule journée (unité de temps) et en un seul lieu (unité de lieu). La règle des trois unités est issue de la Poétique d’Aristote. Le philosophe grec constate que le théâtre doit être l’imitation d’une action dans laquelle tous les éléments se tiennent de telle sorte que rien ne puisse être modifié sans que l’ensemble soit à son tour altéré. Il précise que la tragédie doit présenter une action qui dure à peu près ce que dure une révolution du Soleil. Il ne parle pas de l’unité de lieu, c’est-à-dire de la nécessité que l’ensemble des événements se déroule dans un espace restreint (celui que l’on peut parcourir en une journée). Reprises, renforcées et systématisées, ces règles s’imposèrent en France peu à peu à la tragédie et à la comédie du XVIIIe siècle, et cela de manière de plus en plus stricte. Notons qu’il en allait tout autrement dans le théâtre anglais ou espagnol qui se caractérisaient, sur ce plan, par une liberté beaucoup plus grande. Prenant modèle sur Shakespeare et repoussant l’esthétique classique, les romantiques, s’ils conservèrent l’unité d’action indispensable à la cohérence de l’œuvre, refusèrent les deux autres règles qui, pour eux, allaient à l’encontre de l’esprit du nouveau théâtre. Dans sa fameuse Préface de Cromwell, Hugo, avec beaucoup de verve, tourne celles-ci en dérision.
Règle des trois unités. Règle de composition de la pièce de théâtre édictée par un souci de vraisemblance externe. Elle est conçue par les humanistes qui rêvent d’un théâtre régulier (conforme aux règles), par Scaliger qui publie en 1561 sa Poétique, où il énonce les règles aristotéliciennes oubliées au Moyen Age, puis par Jean de la Taille, dans son Discours sur l’art de la tragédie en 1572, et par Vauquelin de la Fresnaye, dans son Art poétique en 1605. Contestée ensuite par les baroques qui créent un théâtre irrégulier, la règle ne s’impose qu’avec le classicisme. Elle exige que l’action unifiée se passe dans un lieu unique en moins de vingt-quatre heures. Boileau la formule ainsi : Qu’en un lieu, qu’en un jour, un seul fait accompli, Tienne jusqu’à la fin le théâtre rempli. (Art poétique, chap. III) Selon l’unité de temps, la durée de l’action ne doit pas excéder vingt-quatre heures. Ce conseil que formule Aristote (en se fondant sur l’usage, notamment sur les pièces de Sophocle et d’Euripide) ne devient un impératif qu’à partir du xvie siècle en Italie. Corneille est conscient de la facticité d’une telle règle, puisque la durée de l’action (moins de vingt-quatre heures) et celle de la représentation (deux heures et demie en moyenne) ne sont pas identiques. Aussi conseille-t-il de raccourcir le plus possible la durée du temps de l’action afin que les deux durées tendent à coïncider. Le problème du temps excédentaire peut être résolu par le temps mort de l’entracte. Selon l’unité de lieu, pour que l’illusion soit maximale au XVIIe siècle, le lieu de l’action ne doit pas varier puisque le spectateur ne change pas de place. La règle est adoptée pour la première fois par Corneille en 1640 avec Horace qui marque la naissance du théâtre classique. La règle a entraîné l’adoption de deux décors types, à l’époque classique, le «palais à volonté» (expression de Laurent Mahelot, le premier décorateur de l’hôtel de Bourgogne) et la place de ville, lieux propices à la rencontre. L’unité d’action, règle fondamentale de la dramaturgie classique, est héritée d’Aristote qui condamne les «fables épisodiques» lorsque la succession des épisodes n’est déterminée « ni par la vraisemblance ni par la nécessité ». L’unité d’action concerne aussi bien la comédie que la tragédie. Corneille la définit, dans la comédie, comme « l’unité d’intrigue ou d’obstacle aux desseins des principaux acteurs», et dans la tragédie, comme « l’unité de péril, soit que le héros y succombe, soit qu’il en sorte ». Horace ne le satisfait pas, car la mort de Camille crée un second péril pour Horace, qui, après avoir été exposé au danger d’être tué par les Curiaces, risque d’être condamné comme meurtrier de sa sœur. Il ne faut pas confondre unité d’action et action unique. Corneille n’exclut les actions secondaires que lorsqu’elles n’entretiennent pas un lien étroit avec l’action principale. D’Aubignac a critiqué le rôle de l’infante dans Le Cid, qui introduit une intrigue parallèle à l’action principale.
L’amour que l’infante porte à Rodrigue, inavouable au début de la pièce, car Rodrigue est d’un rang inférieur au sien, ne l’est plus lorsque le Cid, vainqueur des Maures, a sauvé le royaume de Castille. Pourtant l’infante va taire sa flamme. Cette action secondaire n’a donc aucune incidence sur l’amour de Rodrigue et de Chimène, qui constitue l’action principale. Dans le théâtre classique, l’action d’une pièce de théâtre est unifiée, selon Schérer, « lorsque l’intrigue principale est dans un rapport tel avec les intrigues accessoires que l’on puisse constater à la fois : 1. qu’on ne peut supprimer aucune des intrigues accessoires sans rendre partiellement inexplicable l’intrigue; 2. que toutes les intrigues accessoires prennent naissance dès le début de la pièce et se poursuivent jusqu’au dénouement; 3. que le développement de l’intrigue principale aussi bien que des intrigues accessoires dépend exclusivement des données de l’exposition, sans introduction tardive d’événements dus au hasard pur; 4. que chaque intrigue accessoire exerce une influence sur le déroulement de l’intrigue principale ».
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