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provinces romaines

provinces romaines. Le mot latin provincia, à l'origine (jusqu'à l'époque de la première guerre punique, 264-241 av. J.-C.), désigne la sphère d'action d'un magistrat qui possède l'imperium (le droit de commander). Il en est venu à signifier, à la fin de la République, un territoire en dehors de l'Italie, soumis au peuple romain, obligé de payer un tribut à Rome, et gouverné par un magistrat romain qui y résidait. Sauf circonstances exceptionnelles, une province n'était pas tenue de se plier au service militaire. Les plus anciennes provinces militaires, acquises pour des raisons de sécurité, la Sicile (241 av. J.-C.), la Sardaigne et la Corse (238 av. J.-C.), étaient administrées par des magistrats qui se trouvaient à Rome. Mais comme cette formule ne donnait pas satisfaction, elles eurent des gouverneurs romains en 227 av. J.-C., quand le nombre des préteurs passa à quatre, pour permettre à deux d'entre eux de quitter Rome à cette fin. Le nombre des préteurs passa à six en 197 av. J.-C. pour donner des gouverneurs à l'Espagne Citérieure et Ultérieure (qui ne comprenaient, à l'origine, qu'une partie relativement limitée de la péninsule). On n'institua pas de nouvelles prétures pour les provinces qui vinrent par la suite : à partir de 146 av. J.-C., l'usage s'instaura de nommer gouverneur un ex-consul ou un ex-préteur (voir proconsul). Les trente années suivantes virent l'acquisition de provinces comme l'Afrique (une partie du territoire le plus fertile de Carthage en 146), la Macédoine (146), l'Asie (annexée en 133, organisée en province en 129-128), et la Gaule Narbonnaise, en 121). Dans la première moitié du Ier siècle av. J.-C., Rome a acquis la Cilicie sur la côte méridionale de l'Asie Mineure (elle fut ajoutée v. 102 av. J.-C. pour permettre à Rome de s'occuper des pirates), la Bithynie au nord-ouest de l'Asie Mineure (léguée à Rome en 74; Pompée lui ajouta le Pont occidental pour en faire la province de Bithynie et du Pont en 65), Cyrène (74 ; la Crète lui fut ajoutée en 67), la Syrie (64) et Chypre (58, ajoutée à la Cilicie), tandis que César pacifiait la Gaule (Gallia Comata) par ses campagnes de 58-50. Auguste réorganisa les provinces à partir de 27 av. J.-C., divisant la Gaule en trois provinces, séparant l'Achaïe de la Macédoine et la Lusitanie de l'Espagne Ultérieure (après la pacification de la péninsule tout entière), et il en fit des provinces distinctes. Sous son règne s'ajoutèrent de nouvelles provinces; l'Égypte (30 av. J.-C., après la défaite d'Actium et la mort d'Antoine et de Cléopâtre), la Galatie (au centre de l'Asie Mineure, en 25 av. J.-C.), la Rhétie (sud de l'Allemagne et nord de la Suisse, 15 av. J.-C.), la Norique (entre la Rhétie et la Pannonie, également v. 15 av. J.-C.), la Mésie et la Pannonie (sud et ouest du Danube, après 9 apr. J.-C.). Cette liste fut augmentée par les empereurs suivants : Tibère ajouta la Cappadoce en 17 apr. J.-C., Claude les deux Maurétanies (v. 42 apr. J.-C.), la Bretagne (43), la Lycie-Pamphylie (43) et la Thrace (46). Trajan ajouta l'Arabie (106) et la Dacie (107), et Septime Sévère ajouta la Mésopotamie (199).

Après 146 av. J.-C., le Sénat décidait des provinces qui seraient gouvernées par des proconsuls et de celles qui seraient gouvernées par des propréteurs, mais l'attribution même des provinces à des individus particuliers était fixée par tirage au sort. L'organisation de chaque province était fixée par un édit (lex provinciae) du commandant qui l'avait annexée, avec l'assistance d'une commission de dix sénateurs. Sous le contrôle général du gouverneur, les communautés provinciales (cités ou tribus) bénéficiaient d'une autonomie dont le degré variait, et gardaient d'ordinaire leur propre constitution et leurs lois. Mais la plupart devaient payer un tribut à Rome, qui coïncidait parfois avec un système fiscal déjà existant. Le gouverneur avait des pouvoirs militaires, administratifs et judiciaires. Lorsqu'il prenait ses fonctions dans sa province, il publiait un décret indiquant les principes légaux qu'il ferait observer durant sa période d'exercice.

Sous la République, de graves abus étaient possibles. Le gouverneur était en réalité un autocrate : il ne partageait sa mission avec aucun collègue, aucun fonctionnaire n'avait le pouvoir de contester ses décisions, on ne pouvait pas faire appel de ses condamnations à mort. Le plus souvent, il n'avait aucune expérience dans l'administration de populations non italiennes, et la durée annuelle de sa charge (elle était rarement prolongée) était trop brève pour lui permettre d'acquérir cette expérience. Enfin, il était fortement encouragé à considérer sa fonction comme une source d'enrichissement personnel. Dans ces conditions, nous avons de nombreux témoignages sur des affaires d'abus de pouvoir ou d'extorsion de fonds (les lois repetundae pouvaient être facilement contournées par les hommes riches qui avaient de bonnes relations). Le candidat qui avait réussi à se faire élire à une magistrature à Rome à coup de pots-de-vin électoraux pouvait rentrer dans ses fonds quand il partait dans sa province, à la fin de son année d'exercice. Pompée, en 52 av. J.-C., redonna vigueur à un décret du Sénat peu respecté, à savoir que cinq ans devaient s'écouler avant qu'un gouverneur ne parte dans sa province, afin d'empêcher la généralisation des pots-de-vin. L'exemple le mieux connu d'abus de pouvoir est celui de Verrès, mais Cicéron décrit de manière éloquente à Atticus les excès de son prédécesseur en Cilicie, Appius Claudius Pulcher — «ce n'était pas un être humain mais une sorte de bête sauvage », et la situation de la province — « plongée dans le désespoir et virtuellement ruinée pour toujours». Sur Chypre, Cicéron écrit : «Tant que je serais gouverneur, on ne demandera pas une seule pièce de monnaie. » Cependant Cicéron, tout en ne retirant que les bénéfices légaux de sa fonction, amassa pendant l'année où il fut gouverneur 2 200 000 sesterces, c'est-à-dire, selon sa propre estimation, plus de trois fois le revenu annuel nécessaire pour vivre dans le luxe. Le système qui consistait à affermer les impôts (indirects) des provinces aux publicani demeura la cause de graves abus.

La situation changea sous l'Empire. Auguste divisa les provinces en deux catégories. La première regroupait les provinces les plus peuplées et les plus riches comme la Sicile et l'Afrique, où on n'avait besoin d'aucune légion : elles restèrent sous la direction du Sénat et leurs gouverneurs furent appelés proconsuls même quand ils étaient de rang prétorien. Le second groupe comprenait les provinces impériales, sur les frontières, où les régions étaient cantonnées, comme en Syrie; elles étaient sous le contrôle direct de l'empereur, qui désignait des sénateurs comme legati Augusti («envoyés d'Auguste») pour diriger les plus importantes d’entre elles, et des chevaliers en qualité de préfets, plus tard procuratores, pour les moins importantes. L’Égypte était une province à part et était gouvernée par un préfet de l'ordre équestre. Ces hommes devinrent des spécialistes de l’administration des provinces, et obtenaient des promotions par leur efficacité. Le maius imperium d'Auguste, qui lui fut conféré en 23 av. J.-C., lui donnait un pouvoir supérieur à celui de tous les autres proconsuls.

On peut trouver d'autres raisons à l'amélioration de l'administration provinciale sous l'empire : le census et les disposititions sur les impôts (les publicani ont virtuellement disparu), le paiement d'un salaire fixe aux gouverneurs, de meilleures voies de communications, et la large extension de la citoyenneté romaine parmi les habitants des provinces. Par conséquent, l'administration provinciale fut en général saine et libre de toute oppression sous les premiers empereurs, même les pires d'entre eux. Il y avait une centralisation considérable, comme on peut le voir à partir de la correspondance de Pline le Jeune avec l'empereur Trajan. L'administration des municipalités provinciales pouvait prendre des formes très variées. En Occident, elles bénéficiaient de l'autonomie, avec des constitutions aristocratiques, et elles étaient gouvernées par une curia ou un sénat, des duumvirs (deux fonctionnaires chargés du pouvoir exécutif principal), des édiles et des questeurs.

EMPIRE ROMAIN D'OCCIDENT. Nom donné à la partie occidentale de l'Empire romain après sa division en deux États distincts à la mort de Théodose (395 ap. J.-C.). L'Empire d'Occident disparaît au moment des invasions barbares: le jeune empereur Romulus Augustule est déposé en 476 ap. J.-C. par Odoacre. Il renaît en 800 ap. J.-C., lorsque Charlemagne se fait couronner empereur par le pape Léon III. Plus tard, Il devait donner naissance au Saint Empire romain germanique. Voir Empire romain d'Orient, Invasions (les Grandes).

EMPIRE ROMAIN D'ORIENT. Nom donné à la partie orientale de l'Empire romain après sa division en deux États distincts à la mort de Théodose (395 ap. J.-C.). L'Empire romain d'Orient ou Empire byzantin résista aux invasions barbares du Ve siècle ap. J.-C. et constitua jusqu'au XIe siècle ap. J.-C. un État puissant et prospère. Il disparaît en 1453 ap. J.-C. après la prise de sa capitale, Constantinople, par les Turcs. Voir Constantin, Empire romain d'Occident.

PROVINCES. Dans la Rome antique, nom donné par les Romains d'abord à la mission du magistrat chargé d'organiser les territoires conquis (provincia) puis aux pays conquis, situés hors d'Italie et soumis aux lois romaines. Gouvernées pour les premières par un préteur (leur nombre passa à cet effet de 2 à 6) puis en général par un propréteur, elles étaient au nombre de 15 à la fin de la République. De nombreuses provinces nouvelles furent créées sous l'Empire et en 27 av. J.-C., Auguste décida de diviser les provinces entre le Sénat et lui, se réservant celles où une occupation militaire était nécessaire. Les provinces sénatoriales, définitivement pacifiées, étaient gouvernées par des magistrats sortis de charge ayant le titre de proconsuls choisis par le Sénat pour un an (ancien consul pour l'Afrique et l'Asie, ancien préteur pour les autres). Les provinces impériales, occupées par les légions, étaient gouvernées par des légats, fonctionnaires directement nommés par l'empereur au sein du Sénat, de rang prétorien ou consulaire, disposant à la fois d'une autorité militaire et civile. L'Égypte, dotée d'un statut particulier, avait à sa tête un préfet de rang équestre.

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