pointe
On analysera la pointe comme une figure macrostructurale. C’est une variété de sentence. Indépendamment de ce qui a été dit en général de cette sentence, et en particulier du noème et de la chute, ce qui reste de spécifique à la pointe dans l’espace du sentencieux paraît ne guère pouvoir s’exprimer autrement qu’en ces termes exemplairement repris chez Quintilien : les pointes sont des pensées ingénieuses. On ajoutera que les pointes peuvent se trouver à peu près n’importe où dans le discours, ce qui ne contribue pas peu à les différencier de la chute et de l’épiphonème, comme l’essentielle ingéniosité fait la différence, pour le contenu, avec le noème. Ce n’est pas si mal. Il est patent que la tradition rhétorique est partagée sur l’usage de la pointe. La façon dont Quintilien rend compte du fait est assez révélatrice du problème : il oppose ceux qui en condamnent l’usage et ceux qui en sont amoureux. On s’oriente donc plutôt vers un tableau des défauts possibles : à part qu’on aime ou qu’on n’aime pas, demeure le risque qu’un discours trop émaillé de pointes paraisse si bigarré qu’on n’y distingue plus rien, et que l’abondance du carquois n’en fournisse trop d’émoussées ou de vicieuses. Mais, au bout du compte, si l’on reste sage, l’absence de pointes est un pire inconvénient : le discours pourrait en devenir languissant. Est-ce que les juges n ’en sont pas frappés ? Est-ce que la cause n’en tire pas quelque avantage? Est-ce que l’orateur n’en est pas lui-même plus écouté, plus applaudi? feint d’interroger Quintilien ; avant d’ajouter : Je tiens donc pour moi que ces pensées qui sont si lumineuses et si brillantes se doivent regarder comme les yeux de l’Éloquence. On conclura ainsi sur cette pointe, autorisée avec tant de lustre.
=> Figure, macrostructurale; sentence, chute, noème, épiphonème; vices, languissant.