Poésies de Stéphane MALLARMÉ, 1866-1914 (posthume)
Malgré son peu d'étendue (mille cinq cents vers dont onze cents publiés par l'auteur), l'oeuvre poétique de Mallarmé constitue le témoignage d'une aventure capitale qui a exercé une influence considérable à la fin du xixe siècle et au début du xxe. Mallarmé a commencé par imiter Baudelaire dont il reprend les thèmes (ennui, refus de la réalité, évasion spirituelle) dans la dizaine de poèmes qu'il donne au Parnasse contemporain de 1866 (Les Fenêtres, Les Fleurs, L'Azur, Brise marine). Mais il a très tôt résolu de se débaudelairiser, et son originalité va résider dans son refus de la poésie sentimentale et du culte parnassien de la perfection plastique, et dans l'affirmation de l'autonomie du langage considéré dans son pouvoir de nommer et de donner existence, par un acte de conscience totalement affranchi du hasard. Sa production poétique fort rare reflète désormais le drame de la paralysie et de l'impuissance de l'esprit devant cette aspiration à l'absolu (Hérodiade, 1871 ; Le Vierge, le vivace et le bel aujourd'hui, 1885). Il n'évite pas l'écueil de l'hermétisme (Ses purs ongles très haut dédiant leur onyx, 1868 ; Prose pour Des Esseintes - le héros d'4 rebours -, 1884) et repousse toujours à plus tard la réalisation de son grand livre, explication orphique de la terre (Autobiographie, 1885). De ce projet, il ne subsiste que les vingt pages d'Un coup de dés (1914, posthume), où la recherche créatrice est poussée jusqu'au niveau de la typographie. Cette relative stérilité n'a pas altéré la ferveur des amis et disciples fidèles qui, à partir de 1885, avaient pris l'habitude de se réunir tous les mardis chez le Maître, rue de Rome. Outre les poètes de la génération symboliste -Gustave Kahn, Georges Rodenbach, René Ghil, Henri de Régnier, Francis Viélé-Griffin -, Mallarmé a ainsi marqué de sa parole et de son exemple Gide, Claudel et Valéry.