phratrie / fratrie
Groupe formé de la réunion de plusieurs clans ou sibs et dont les membres se considèrent comme liés les uns aux autres par une règle de filiation unilinéaire. Ces liens de parenté sont, dans bien des cas, tout à fait conventionnels et assez vagues. Le sens de ce mot tel que les ethnologues l’utilisent, doit être distingué de celui que lui donnent certains psychanalystes pour lesquels la phratrie (ou fratrie) est le groupe formé par les frères et sœurs en face de leurs progéniteurs dans le cadre familial européen.
(Angl. : phratry.)
FRATRIE. Dans ses études sur le développement de la personnalité, Adler attache à la position du sujet dans la fratrie une importance capitale. Dans la mesure où le sujet prend conscience de ses possibilités et de ses imperfections l’équipement constitutionnel avec la valeur relative des organes et des appareils, joue certes un rôle important. La relation de l’enfant avec les partenaires du couple parental n’est pas moins importante pour l’élaboration du caractère, du style de vie, dit Adler. Mais la place qu’occupe l’enfant dans la fratrie modèle ses tendances caractérielles avec autant de vigueur. C’est ainsi que l’aîné, enfant unique pendant un certain temps, se voit, ou se croit, refoulé à l’arrière-plan de l’affection et de la sollicitude de ses parents, de la mère avant tout, au moment où paraît un deuxième enfant. C’est une situation dramatique que celle de l’aîné détrôné, frustré, luxé de sa place privilégiée. Enfant, il cherche par sa tension nerveuse à attirer l’attention sur sa personne. Adulte, il vit dans l’éternelle crainte de se voir dépassé ou mis de côté par un rival. Dans beaucoup de familles la tradition veut que l’aîné prenne un jour la place du père. Il est souvent le collaborateur du père et le surveillant des éléments plus jeunes de la fratrie. Ainsi investi de la confiance de son entourage, il devient un élément constructif qui poursuit une activité efficace. Le cadet se trouve en perpétuelle compétition avec son aîné. Cette situation l’aiguillonne et crée une violente poussée psychique chez le cadet. Il voudrait égaler, voire dépasser son aîné et il s’y applique de toutes ses forces. Il développe une grande ambition et il veille sur ses droits et ses prérogatives. Il craint d’être sous-estimé. Si le cadet n’a pas visé trop haut, si ses aspirations ne sont pas surtendues, s’il sait développer son sens social pour pouvoir de façon utile s’intégrer à un groupe, son dynamisme psychique peut le mener loin. Si, dans sa confrontation avec l’aîné — et plus tard dans la vie —, il subit des échecs, il peut dévier vers la névrose. Le benjamin se trouve le dernier d’une fratrie dont les frères et soeurs le dépassent de loin. Semblable au psychisme du cadet il présente une très grande ambition. Mais il est le plus gâté de la famille. Il est d’autre part l’enfant de parents vieillissants. Ce n’est pas volontiers que la mère lui accorde l’autonomie nécessaire au développement de sa personnalité. Le benjamin grandit alors comme dispensé de responsabilité. Il s’attaque à des problèmes très difficiles, mais il peut aussi abdiquer. Tout dépend de l’ambiance éducative de la famille. L’enfant unique grandit comme si les autres devaient le servir. C’est du moins la situation vécue par rapport à ses parents qu’il transpose par la suite dans ses relations avec autrui. Il en résulte parfois des difficultés avec le conjoint ou dans la profession. Une fille dans une fratrie de garçons veut d’abord agir « comme si » elle était un garçon. Elle délaisse les poupées et n’aime que les jeux des garçons. Plus tard, elle persiste dans cette attitude dénommée par Adler : la protestation virile, et elle refuse son rôle féminin aussi bien dans la vie intime que dans la vie sociale. Adler a décrit toute une série d’attitudes caractérielles qui découlent de la position dans la fratrie. Nous venons d’en citer quelques exemples. (Cf. chapitre Caractérologie ; A. Farau et H. Schaffer : La Psychologie des Profondeurs, Payot, 1960, p. 195.)