Pensées de Blaise PASCAL, 1670 (posthume), Classiques Hachette
Après avoir défendu Port-Royal contre les jésuites dans Les Provinciales Pascal entreprend en 1657 une Apologie de la religion chrétienne à l'intention des libertins et des indifférents. À sa mort, en 1662, cet ouvrage reste inachevé. Les liasses de pensées qu'il a constituées sont alors recopiées puis collées sur un registre, mais non éditées telles quelles. Pour des raisons religieuses et littéraires, les héritiers de Pascal les trient et les retouchent : c'est l'édition de Port-Royal (1670), qui fixe la forme sous laquelle les Pensées seront connues jusqu'à la fin du xviiie siècle où Condorcet les reclasse en pensées philosophiques et pensées religieuses (1776). Le retour ultérieur aux manuscrits et à la copie de 1662 a permis d'abord l'enrichissement du texte, les éditeurs continuant d'user d'un classement personnel (édition Brunschvicg, 1897). On s'est aperçu depuis que la copie permettait de retrouver le plan conçu par Pascal (travaux de Tourneur, 1935) et surtout de Louis Lafuma (1951). Voici ce plan. Après un Discours préliminaire qui prend violemment à partie les indifférents (il faut avoir toute la charité de la religion qu 'ils méprisent pour ne pas les mépriser jusqu'à les abandonner dans leur folie), vingt-sept liasses s'organisent en deux groupes. Première partie : Misère de l'homme sans Dieu (liasses l-XI) ; seconde partie : Félicité de l'homme avec Dieu (XII-XXVIII). La première partie, qui vise à inquiéter l'incrédule pour qu'il se soumette à la religion chrétienne, commence par le procès de la nature humaine et de la vie sociale. Sous le titre Vanité (II), y sont dépeints les effets de l'imagination, cette maîtresse d'erreur et de fausseté, et de l'amour-propre ; sous celui de Misère (III), la contingence des coutumes, des lois et de la justice ( Vérité au-deçà des Pyrénées, erreur au-delà). Montaigne (Essais) inspire ces analyses, et Pascal, à son exemple, justifie la soumission aux lois auxquelles les habiles obéissent comme le peuple, mais en gardant une pensée de derrière (la tête) et connaissant la raison des effets, c'est-à-dire des usages adoptés en raison de l'imperfection humaine (V). Puis, de cet exercice de la pensée, Pascal tire la grandeur de l'homme (La grandeur de l'homme est grande en ce qu'il se connaît misérable) pour aussitôt le ramener à ses contrariétés (L'homme n'est ni ange ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l'ange fait la bête) et prouver qu'il est un monstre incompréhensible dont seule la religion chrétienne expliquera l'énigme (VII, Contrariétés). Elle seule aussi lui rendra le bonheur, car le divertissement ne saurait le lui donner. Chacun cherche à se divertir et s'agite pour éviter l'ennui, mais ce besoin est une nouvelle preuve de la misère de la condition humaine (VIII). Les philosophes stoïciens ou épicuriens ne sont d'aucun secours (IX). Le souverain bien est en Dieu (X). Au début de la seconde partie, devait vraisemblablement prendre place l'argument du pari : il y a intérêt à parier que Dieu est, si l'on raisonne en termes de jeu, et il faut bien parier car on est embarqué (XII). Pascal prêche aussi l'humilité (XIII, Soumission et usage de la raison) et l'obéissance à Jésus-Christ, seul médiateur faisant connaître Dieu à la créature perdue entre les infinis et si faible : L'homme n'est qu'un roseau, le plus faible de la nature, mais c'est un roseau pensant. [...] Travaillons donc à bien penser : voilà le principe de la morale. (XIV-XV). Il affirme la fausseté des autres religions (XVI). Puis il développe Jes preuves théologiques de la religion chrétienne à l'aide de la Bible et des Évangiles (XVII-XXVII) ; la hiérarchie des trois ordres (chair, esprit, charité) est analysée au chapitre XXIII. La passion et la rigueur de Pascal font des Pensées l'un des livres par rapport auxquels se définissent les familles d'esprit (cf. Voltaire, Lettres philosophiques ; Valéry, Variété, Variation sur une pensée, tous les deux hostiles; Chateaubriand, Génie du christianisme, III, II, 6; Mauriac, Biaise Pascal et sa sur Jacqueline, favorables).
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