Zone Guillaume Appolinaire éxplication linéaire
Publié le 01/05/2022
Extrait du document
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Guillaume Apollinaire incarne « l’esprit nouveau » selon l’expression qu’il utilisera lors d’une
conférence en 1917.
Dans son recueil Alcools, initialement nommé Eau-de-vie, ce vent de modernité est
palpable puisqu’il s’inspire de la ville, du rythme du jazz et de la peinture cubiste, supprimant la ponctuation
de tous ses poèmes.
Toutefois, Apollinaire respecte une certaine tradition poétique.
On peut dire qu’il
est d’une certaine manière: « entre deux mondes ».
C’est justement cette posture particulière, entre tradition
et modernité, que nous retrouvons dans le poème « Zone », qui fait l’objet de notre étude.
Placé en tête du
recueil, ce texte est, pourtant, le dernier poème rédigé par Apollinaire avant la publication en 1913.
Toutefois, en ouvrant Alcools avec ce texte, l’auteur affirme la modernité de son écriture et de ses
inspirations.
Il évoque, dans un poème dépourvu de versification, un espace urbain où se mêle passé et
présent.Ainsi, nous nous demanderons en quoi ce poème célèbre-t-il la modernité ? Pour cela, nous
relèverons deux mouvements dans ce texte : tout d’abord la confrontation du passé et du présent des vers 1 à
14 et l’évocation d’un monde moderne des vers 15 à 24.
Lecture
I/ La confrontation du passé et du présent (v 1 à 10)
a/ La lassitude vis-à-vis du passé (v 1 à 3)
Nous pouvons constater que les trois premières strophes, qui ouvrent « Zone », sont des monostiches
(strophes d’un vers) et rendent palpables la lassitude d’Apollinaire quant au passé.
Le premier vers est
déroutant : « A la fin tu es las de ce monde ancien » dans la mesure où il s’agit d’un vers classique, d’un
alexandrin plus précisément, répondant à une certaine tradition poétique.
Cependant, il s’agit déjà, pour le
poète, d’annoncer un renouveau poétique.
Effectivement, il est intéressant de noter que la diérèse sur le mot
« ancien » concourt à donner l’impression que l’adjectif se brise : « anc-i-en » et donc que le passé s’efface.
Cette décomposition du mot évoque aussi la peinture cubiste.
La présence de l’attribut du sujet : « las » qui
met en évidence le désir de rupture d’Apollinaire.
Le poète nous surprend en utilisant le pronom personnel
« tu » pour se désigner.
Le lyrisme (= évocation des sentiments personnels.
Registre énormément utilisé par
le romantisme mouvement littéraire du début du XIXème siècle) est, de la sorte, mis à distance.
Pourtant, ce
choix permet au lecteur de devenir, au même titre qu’Apollinaire, le destinataire du poème.
Le vers 3 insiste
plus encore sur cette envie de modernité.
Une formule assez familière : « Tu en as assez de l’antiquité
grecque et romaine » exprime la lassitude à l’égard de l’Antiquité, considérée comme une inspiration et un
modèle absolus au cours des siècles précédents.
Enfin, le vers 2 est également à observer.
Apollinaire
abandonne l’alexandrin au profit d’un vers libre de 16 syllabes et inscrit, de la sorte, la modernité poétique
au cœur de « Zone ».
Néanmoins, comme au vers 1, nous sommes sensibles à la présence discrète de la
poésie traditionnelle.
En effet, l’utilisation du « ô » lyrique témoigne d’un certain élan lyrique, d’un héritage
romantique.
Pourtant, il est placé devant un symbole fort de modernité : la Tour Eiffel dont la construction
avait fait scandale, suscitant des réactions hostiles mais aussi enthousiastes comme chez le peintre Delaunay,
un proche d’Apollinaire.
Cette référence précipite le poème dans l’espace urbain comme la métaphore
pastorale du vers 2 : « le troupeau des ponts bêle ce matin » qui métamorphose les arches des ponts de la
Seine en dos de moutons.
b/ La religion hors du temps (v 5 à 10)
A partir du vers 5, Apollinaire se réfère à la religion.
Le parallélisme de constructiondes vers 5 et 6 : « La
religion seule est restée toute neuve la religion / est restée simple » lui confère une modernité évidente.
L’enjambement, d’ailleurs, permet la mise en évidence du substantif : « religion » qui se trouve au début et
à la fin du vers 5.
De plus, nous pouvons relever une comparaison surprenante puisque la religion est
assimilée aux « hangars de Port Aviation » (v 6) Alors que le « ô » lyrique précédait un symbole de
modernité au vers 2, il accompagne, au vers 7, le « Christianisme » créant une forme de correspondance
entre les deux termes.
Apollinaire semble inscrire, de la sorte, la religion dans l’ère moderne ce qui va.
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