Zola écrit en marge de son manuscrit de L'Argent : « L'argent est devenu, pour beaucoup, la dignité de la vie, il rend libre; il est l'hygiène, la propreté, la santé, presque l'intelligence. » Que pensez-vous de cette remarque ?
Publié le 09/12/2021
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Zola écrit en marge de son manuscrit de L'Argent : « L'argent est devenu, pour beaucoup, la dignité de la vie, il rend libre; il estl'hygiène, la propreté, la santé, presque l'intelligence.
» Que pensez-vous de cette remarque?
compréhension du sujet
La citation de Zola proclame le triomphe de l'argent.
Sa suprématie couvre la plupart des domaines.Le développement du devoir se structure si l'on étudie chacun d'eux : la dignité, la liberté appartiennent aux valeurs, au sens de la vie.Les trois termes hygiène, propreté, santé, renvoient aux conditions de vie dans ce qu'elles ont de plus vital; l'intelligence forme unecatégorie à part, liée à la réflexion.
P our peu que l'on ait entendu parler de Zola, on comprend qu'une telle phrase provoque le lecteur.Elle constitue un constat, qui ne coïncide pas avec l'idéal de l'auteur.
Il trouve cependant des accents épiques pour peindre, dansL'Argent, le monde de la Bourse et de la Finance.Il est probable que l'élève aura tendance à s'indigner d'une telle domination.
C ependant, si l'argent affronte de nombreux détracteurs au cours des siècles, tout un courant de pensée défend la valeur du commerce, des échanges et des investissements.
On pense, bien entendu, au siècle desLumières.
Il faudra donc se garder de développements lyriques et «vengeurs» et donner la primauté à l'analyse, à la réflexion.
• Première partie : Le triomphe de l'argent
Cette partie explique la citation de Zola, sans apporter de correctifs et sans en rechercher les véritables intentions.
On va ici dans le sens du texte encomparant la situation du XIXe siècle à celui du XXe.a) Le rôle de l'argent sur les conditions de vieA remarquer que la formulation de l'auteur est radicale puisqu'il établit une équivalence complète entre l'argent et la santé par l'emploi du verbe être.La situation du XIXe siècle explique cette première proposition.
C 'est encore un véritable problème à cette époque.
Les altérations de la santé, dansGerminal, s'expliquent par le dur travail de la mine, mais aussi par une malnutrition due au manque de ressources.Certes, aujourd'hui, les progrès de la médecine, de l'hygiène, sont considérables, mais la politique de la santé pose certains problèmes.
O n le constateencore plus, bien évidemment, dans les pays en voie de développement.b) L'argent et l'intelligenceUne telle équivalence choque à priori parce que l'on pense que l'intelligence est indépendante des ressources financières.
O n pourrait cependant étudier,brièvement ici, la liaison entre les classes sociales et l'éducation.
Il est probable cependant que Zola pense surtout à une convention sociale qui donne del'esprit à tous les possédants.
Tel Giton dans les Caractères de La Bruyère : de façon intrinsèque, ce personnage n'est pas nécessairement intelligent,puisque selon l'auteur faire fortune ne nécessite «ni le bon, ni le bel esprit, ni le grand, ni le sublime», mais du moins s'impose-t-il aux autres : «On est deson avis, on croit les nouvelles qu'il débite.
» Les autres s'inclinent devant lui et par flatterie sans doute le reconnaissent comme homme remarquable.
«Ilse croit des talents et de l'esprit» et la renommée s'accorde à cette croyance.c) L'argent : dignité et libertéPour ce qui est de la première, elle s'accorde avec une convention sociale.
Elle ne correspond pas à un bonheur personnel mais à un consensus qui accordeune respectabilité à celui qui est riche.
Q uant à la liberté, elle est synonyme d'indépendance.
L'argent supprime un certain nombre de contingencesmatérielles.
Le pauvre, soumis au souci de sa substance, de sa survie, ne connaît pas une telle émancipation.
L'impression que le riche peut transgresserimpunément les lois accrédite la liaison étroite entre liberté et argent.Une telle constatation aboutit à dénoncer une injustice totale, et l'on insiste sur ce point dans une conclusion provisoire.
• Deuxième partie : Le procès de l'argent
La phrase de Zola peut être jugée de trois façons.
On estime que la place prépondérante de l'argent est peut-être exacte, mais qu'il convient de nuancer lacondamnation.On estime que le bilan est un peu excessif ou enfin qu'il limite certains termes à leur dimension sociale.a) Défense de l'argent.
Certes, lorsque la fortune occasionne de telles inégalités, il est difficile à justifier.
On peut toutefois penser au XV IIIe siècle qui voitdans l'argent un instrument du progrès.
Les écrivains ne soutiennent pas, il est vrai, les rentes, les «positions» mais l'investissement.
Le commerce devientle symbole du développement et du mieux-être des populations.
Voltaire explique clairement cette perspective économique quand il écrit : «Le commerce,qui a enrichi les citoyens en Angleterre, a contribué à les rendre libres, cette liberté a étendu le commerce à son tour.» C 'est dire presque la même choseque Zola.
Mais celui-ci le prend en mauvaise part parce qu'il pense aux spéculateurs, alors que l'auteur des Lettres anglaises y voit un monde de négociantsqui fait fructifier un pays.b) Un deuxième commentaire consisterait à dire que la domination que relève Zola est un peu schématique.
La santé ne dépend pas systématiquement de lafortune.
Zola en fournit un exemple avec le financier Gundermann dans L'Argent.
L'argent libère, mais il crée des contraintes.
Que l'on pense aux fameuxexemples de L'Avare de Molière.c) Il semble donc que Zola a volontairement ramené la dignité, la liberté, l'intelligence même aux seules dimensions sociales.
Il rejoint un moraliste commeLa Bruyère.
Celui-ci écrit : «De telles gens ne sont ni parents, ni amis, ni citoyens, ni chrétiens, ni peut-être des hommes : ils ont de l'argent.
» Il réduitdonc le riche à sa seule situation sociale.
Sous cet angle la valeur est absolue.
En revanche, humainement, d'autres critères restent à établir.
De même, laliberté ou la dignité ne se manifestent, ici, que sur le plan des relations sociales, dans ce qu'elles ont de plus restrictif.
rédaction d'une partie du développement
Zola constate que le XIXe siècle est largement dominé par l'argent.
Il donne de la valeur à tous les secteurs de l'existence, même ceux qui semblent à prioriindépendants d'un état de fortune comme la santé (1).Il est certain cependant que cette assimilation peut paraître excessive.
Ainsi le financier Gundermann dans L'Argent est loin de bénéficier d'une santéflorissante.
Lorsque Saccard se rend chez lui, il le trouve avalant avec peine un bol de lait.Cet état maladif n'intervient pas en dépit de sa fortune, mais à cause d'elle : «P ourquoi donc se lever dès cinq heures, faire ce métier abominable, s'écraserde cette fatigue immense, mener une vie de galérien...» déplore-t-il (2).
D'ailleurs, ce n'est pas exclusivement le travail intensif qui mine la santé, même pas« la mémoire bourrée de chiffres, le crâne éclatant de tout un monde de préoccupations», mais l'obsession même de la richesse.Ainsi la liberté se retourne contre elle-même.
Elle devient une véritable maladie mentale (3).
Saccard en fait «l'appât même de la vie, l'éternel désir quiforce à lutter et à vivre».
Mais la crainte de tout perdre dérègle l'individu, le rend esclave de son bien.
Lorsque Harpagon a perdu sa cassette, il se considèrecomme un homme mort, ne sait plus où il est et en vient à maudire son propre fils.Une telle dépendance s'explique par le fait que l'argent a pris possession de toute la personnalité.
L'être se trouve ainsi réduit à sa seule dimension socialed'homme riche (4).
Remarques
Les chiffres utilisés renvoient à la rédaction qui précède.(1) C e court passage assure la phase de transition.(2) Chaque fois que possible, on utilise un exemple littéraire en l'analysant(3) Les thèmes de la liberté et de la santé ne sont pas liés à priori.
Mais ici, nous avons considéré l'obsession maladive de l'argent comme une aliénation.(4) Phrase qui annonce la suite du développement..
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