venus d'anadyomène Rimbaud
Publié le 03/02/2024
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« Vénus Anadyomène » RIMBAUD -1870
Parution dans le cahier de Douai - Mouvement littéraire du symbolisme
ARTHUR RIMBAUD -1854-1919
Arthur Rimbaud, né en 1854.
Élevé par sa mère, il se fait tout de remarquer très tôt pour ses vers
en latin publiés dans la presse locale, et un de ses poèmes remporte le prix académique.
Rimbaud
n’a alors que 15 ans.
Il fait plusieurs fugues, va même jusqu’en Belgique, et écrira pendant ses
voyages plusieurs poèmes.
Dans le sonnet « Vénus anadyomène »(Anadyomène, épithète de Vénus sortant de l'eau : ce
thème récurrent dans l’histoire artistique de l’Europe dépeint généralement une jeune femme
d’une grande beauté, qui sort d’une conque =un coquillage- vous reporter au tableau) publié
dans les Cahiers de Douai en 1870, Arthur Rimbaud revisite un thème célèbre, celle de Vénus, la
déesse de l'amour qui a inspiré de nombreux poètes et notamment le célèbre tableau de la Vénus
de Botticelli à la Renaissance.
La problématique : Comment Rimbaud brise-t-il les canons (règles) artistiques classiques dans ce
sonnet ?
Plan :
Introduction : En effet, le poème dresse le portrait d’une vieille prostituée repoussante en rupture
totale avec les attentes traditionnelles.
4 mouvements :
I.
Une parodie
2.
Un portrait dépréciatif
3.
Une vénus nauséabonde
4.
Rimbaud, un poète provocateur
I.
Une parodie
Premier quatrain : Une parodie
Ainsi, dès le premier vers, le ton est donné, et il jure totalement avec l’image traditionnelle
de la Vénus idéale.
Déesse immortelle et allégorie de la beauté, qui sort d’une conque en
majesté, Vénus est ici une prostituée vieille et laide qui émerge d’une baignoire.
Dans Vénus
anadyomène, la femme est directement associée à la mort : l’écrin qui la présente est une
baignoire de mauvaise qualité qui s’apparente à un “cercueil” (v.1).
La baignoire de laquelle
émerge la femme rappelle avec humour le coquillage duquel émerge Vénus.
On sent bien ici
la volonté de parodie du poète.
Chaque détail décrit un corps qui s’oppose en tout point à la
Vénus antique : la femme cache des formes dégradées et ridées derrière un épais
maquillage (“fortement pommadés” v.2) qui n’en masque pas les défauts (“des déficits assez
mal ravaudés” v.4) e Elle est artificielle, en témoigne ses cheveux « fortement pommadés »,
ce qui s’oppose à la beauté naturelle de Vénus.
Cependant, même avec tous ses artifices, elle ne peut cacher sa laideur comme le montre le
groupe nominal « déficits mal ravaudés ».t qui est pour l’époque le signe qu’il s’agit d’une
prostituée.
C’est une parodie du corps idéal de la déesse, la femme est repoussante jusque
dans les détails, qui sont décrits avec une précision chirurgicale.
Deuxième quatrain : Un portrait dépréciatif de la femme
La seconde strophe commence par un adverbe de liaison : « puis ».
Cet adverbe, repris au
vers 7, montre une volonté d’exagération du poète dans la précision avec laquelle il décrit la
femme.
L’animalisation se poursuit car Rimbaud évoque, non pas le cou, mais le « col » de la
femme.
On assiste à une sorte de transformation en vache : « col gras et gris » ; « larges
omoplates / qui saillent ».
Mais ce que le poète veut donner à voir, c’est la femme qui
émerge de la baignoire.
Une énumération d’imperfections physiques à tous les niveaux, qui insiste sur cette laideur
totale.
L'expression « fortement pommadés » (vers 2) suggère des soins de beauté
maladroits, incapables de lutter contre la laideur due à l'âge.
De plus ce terme oppose le
fard et l'artifice à la beauté naturelle, attribut de la déesse.
L'allitération en [S] du vers 4
traduit l'amollissement de la chair.
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« Vénus Anadyomène » RIMBAUD -1870
Parution dans le cahier de Douai - Mouvement littéraire du symbolisme
C’est une Femme sans grâce : « lente et bête » (vers 3).
Le terme « bête » peut également
conférer une dimension animale à la femme.
Le poème est, de fait, très sonore : l’allitération
(répétition d’une même consonne) en “g” au vers 5 (“puis le col gras et gris”) qui fait écho à
la “graisse” à la fin de la strophe (vers 8) renvoie à la mollesse répugnante qui caractérise la
femme.
La femme est présentée comme une personne décharnée, d’une maigreur dans les
vers 5,6,8 : « larges omoplates » »Qui saillent ; le dos court qui rentre et qui ressort, la peau
paraît en feuilles plates » La maigreur suggérée par la proposition subordonnée relative «qui
saillent » rejetée en début de vers 6 participe au portrait horrible d’une femme laide et
malade.
Pourtant, la maigreur est contredite par « les rondeurs des reins » au vers 7.
On voit donc
que le physique de la femme est tout sauf harmonieux.
Il s’oppose parfaitement à la
perfection habituelle de Vénus.
Au niveau du rythme, les enjambements entre les vers 1-2 et 2-3 créent un déséquilibre et
une disharmonie à l’image de la femme présentée.
Il insiste sur sa laideur ce qui vient
s’opposer à la beauté de la Vénus peintes par Botticcelli.
Dans cette strophe, le poète mobilise plusieurs sens du lecteur pour mieux montrer l’horreur
de la femme décrite.
On trouve l’odorat avec « sent », le goût avec « goût » et la vue avec «
voir » et « loupe ».
On a donc affaire à une synesthésie détournée dans laquelle le poète
sature sa description de détails afin de confronter le lecteur à la laideur de la femme.
L’oxymore « Horrible étrangement » donne un nouveau sens à la laideur (vers 10).
Le goût
est horrible, mais suscite la curiosité du poète.
Il faut donc voir ici une sorte de beauté du
laid, du mal, qui attire Rimbaud.
On peut rapprocher cela de sa volonté de combattre la
poésie traditionnelle et son éloge de la beauté.
Premier tercet : Une vénus nauséabonde et morbide
Le premier tercet apporte une nouvelle couleur au tableau d’ensemble : le rouge.
Cette couleur vient s’opposer à la blancheur pure avec laquelle est fréquemment
représentée Vénus.
Ici, « L’échine est un peu rouge » suggère une fois de plus que la
colonne est saillante, et donc que la maigreur de la femme décrite est maladive.
Dans cette strophe, le poète mobilise plusieurs sens du lecteur pour mieux montrer l’horreur
de la femme décrite.
On trouve l’odorat avec « sent », le goût avec « goût » et la vue avec «
voir » et « loupe ».
On a donc affaire à une synesthésie détournée dans laquelle le poète sature sa description
de détails afin de confronter le lecteur à la laideur de la femme.
Il s’agit de fait d’une laideur étonnante, hors norme : c’est ce que montrent les deux
expressions “horrible étrangement” et “belle hideusement” (vers 10 et 14) : le poète est
incapable de déterminer des éléments qui justifient ce jugement.
C’est plutôt la multiplicité
des détails faisant appel aux cinq sens qui dresse le tableau d’une nudité sale et
repoussante : plus qu’un corps, la femme est décrite comme un amalgame d’organes
contrefaits selon le regard du poète, qui glisse de la tête à la taille.
Elle a la peau rouge (v.
9), usée, et des cheveux bruns, alors que la Vénus anadyomène de Botticelli est une jeune
femme blonde, à la peau blanche.
Il s’en dégage un parfum désagréable : “le tout sent un
goût.
L’oxymore « Horrible étrangement” (v.
9-10).
Celui-là faisant écho à « belle
hideusement » Pourquoi associer saveur et odeur ? Cette association permet d’insister sur
le caractère global de l’impression du poète : la femme qui s’offre à ses yeux ne présente
pas uniquement une image physique, mais envoie aussi une myriade d’informations
gustatives et olfactives qui dégoûtent.
L’enjambement “on remarque surtout // Des singularités qu’il faut voir à la loupe…” (v.
1011), qui conclut une énumération d’imperfections physiques à tous les niveaux, insiste sur
cette laideur totale.
C’est d’ailleurs de l’animal, plus que de la femme, que se rapproche le corps émergé : le
champ lexical associé à sa morphologie renvoie en réalité à des attributs animaux, comme
“l’échine” (v.
9) et la “croupe” (v.
13), ou même des organes habituellement associés à
l’homme, mais qui ne sont généralement pas utilisés pour décrire une femme (“omoplates”
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« Vénus Anadyomène » RIMBAUD -1870
Parution dans le cahier de Douai - Mouvement littéraire du symbolisme
v.
5, “reins” v.
12).
Mais la proximité n’est pas uniquement physique : dans Vénus
anadyomène la rime de la première strophe entre “tête” et “bête” (vers 2 et 4) rend sonore
l’animalité brute et la déficience intellectuelle de la femme décrite.
D’ailleurs, son corps semble animé par un mouvement instinctif et irréfléchi : le vers “tout ce
corps remue et tend sa large croupe” (vers 13), qui utilise le nom commun “corps” comme
sujet du verbe, lequel n’a d’ailleurs pas de complément, exprime le mouvement disgracieux
et sans....
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