Une oeuvre d’art nous fait-elle quitter, l’espace d’un instant le monde réel, ou au contraire nous apprend-elle quelque chose de lui ?
Publié le 01/12/2021
Extrait du document
«
Dissertation de philosophie
Lorsqu’on se trouve devant une œuvre d’art dans un musée, on rentre parfois dans
une profonde rêverie.
Le monde réel autour de nous disparaît, et l’on se plonge dans
le monde propre à l’œuvre qui peut être angoissant, apaisant ou étrange.
Il semble
donc que la contemplation esthétique nous éloigne de la réalité.
Pourtant, on peut se
demander si au contraire, une œuvre d’art n’a pas pour fonction de nous révéler un
aspect de la réalité que nous n’aurions pas encore découvert.
La question se pose
donc : une œuvre d’art nous fait-elle quitter, l’espace d’un instant le monde réel, ou
au contraire nous apprend-elle quelque chose de lui ?
On a tendance à considérer comme réussie une peinture qui ressemble au modèle
original.
Pline l’Ancien relate avec admiration dans ses Histoires naturelles la
prouesse de Zeuxis, un peintre grec qui avait réussi à peindre des grappes de raisin si
ressemblantes que des oiseaux se posaient dessus pour les becqueter.
Zeuxis était lui-
même fasciné par le modèle de l’imitation, puisque dans sa peinture, les raisins
étaient portés par un enfant, et il émit ce regret : « j’ai mieux peint les raisins que
l’enfant; car si j’eusse aussi bien réussi pour celui-ci, l’oiseau aurait dû avoir peur ».
Qui n’a pas été fasciné par une peinture en trompe-l’œil ? Il semble que ce soit là le
point de perfection de l’œuvre d’art, puisque si elle parvient à tromper l’œil humain,
cela montre que l’œuvre est aussi riche de nuances et aussi complexe que la réalité
elle-même : l’artiste devient vis-à-vis de l’œuvre l’égal de Dieu vis-à-vis de sa
Création.
C’est ce qui amène Aristote à définir l’art comme imitation dans ce texte célèbre de
la Poétique : La seconde cause est le plaisir pris aux images (Aristote note qu’on
prend plaisir aux représentations dont l’original déplairait, comme la peinture d’un
cadavre).
L’image, là aussi, est comprise comme l’imitation d’un modèle ; et Aristote
soutient même qu’on prend plus de plaisir à la vue de l’imitation que du modèle.
On
voit donc qu’Aristote définit l’art comme imitation, et dans ce cas, l’art ne nous
éloigne pas de la réalité, mais au contraire vise celle-ci comme un idéal à atteindre.
Le but de l’artiste n’est pas de nous détourner du monde réel, mais de nous en
rapprocher le plus possible.
Néanmoins, on peut remettre en question l’idée qu’imiter
la nature serait nous rapprocher de la réalité.
L'imitation ne nous éloignerait-elle pas
de la réalité ?.
»
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