« Un roi sans divertissement est un homme plein de misères. » Blaise Pascal, Pensées, 142. Commentez cette citation.
Publié le 16/05/2020
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Lorsque l'on est comme le fut Pascal adossé à l'absolu, tout ce qui est humain finit par revêtir un sens dérisoire.
Onne s'étonnera pas dès lors si le penseur le plus constamment présent, quoique de manière cachée, dans lesPensées, est Montaigne, le penseur sceptique.Pascal met le scepticisme philosophique au service de l'apologie de la religion chrétienne.
Tout est vain comparé àDieu et toute activité qui n'a pas Dieu pour but ou pour objet est vaine.
La philosophie qui prétend et entendconnaître la totalité des choses ne sait pas de quoi elle parle: comment se pourrait-il que la partie (l'esprit humain)connût le tout? Toutes choses étant liées, à la fois causes et effets, il est impossible de connaître l'une sans l'autreet l'une sans toutes les autres.La raison échoue, donc, mais l'imagination ne vaut pas davantage.
Pascal appelle l'imagination maîtresse d'erreur etde fausseté d'autant plus fourbe qu'elle ne l'est pas toujours, car elle serait règle infaillible de vérité si elle l'étaitinfaillible du mensonge — à la manière dont une montre qui retarde régulièrement de cinq minutes toutes les 24heures pourrait être malgré tout utilement consultée.
J'ai découvert que tout le malheur des hommes vient d'une seule chose, qui est de ne pas savoir demeurer au reposdans une chambre.
— Pascal
Pascal appelle divertissement tout ce qui détourne l'homme de son salut.
Aussi est-ce la société tout entière avecses goûts et ses usages qu'il passe au feu de sa critique.
Il taxe la peinture de vanité car elle attire l'admiration parla ressemblance des choses dont on n'admire pas les modèles.
Argument curieux, mais significatif: n'est-ce pasjustement parce que la mort n'est pas belle qu'elle peut l'être à l'extrême lorsqu'elle est représentée en peinture?Le point de vue de Dieu (comme, en d'autres circonstances, le point de vue de Sirius) permet de pousser l'analyse àun point rare de contestation critique.
C'est ainsi que Pascal écrit à l'adresse des grands qui portent plume auchapeau et épée au côté: votre naissance dépend d'un mariage ou plutôt de plusieurs mariages.
Mais d'où cesmariages sont-ils issus? D'une visite faite par rencontre, de paroles dites en l'air, de mille petits riens et minusculesoccasions imprévues.
Voilà le rang que l'ordre établi voudrait faire passer pour nécessaire et qui se trouve réduit à lapure contingence d'un choc d'épidermes.
Il y a bien des comtes et des ducs qui sont nés parce que leur père, teljour, a été saisi par la vision d'un grain de beauté sur un sein à moitié nu.Saint Augustin avait écrit de l'habitude qu'elle est une seconde nature et Montaigne avait déjà bien dégagé cemécanisme: pour justifier leurs plus extravagantes actions, les hommes ont tôt fait d'appeler nature leurs artifices.Leur justice ne peut apparaître que dérisoire, voire grotesque, comparée à ce qui serait la véritable justice et quiest évidemment celle de Dieu.
Plaisante justice qu'une rivière borne!, s'exclame Pascal.
Vérité au-deçà desPyrénées, erreur au-delà.
L'Histoire dans son ensemble ne nous donne pas à contempler un spectacle moinscomique.
La coutume est une seconde nature, qui détruit la première.
Mais qu'est-ce que nature? Pourquoi la coutume n'est-elle pas naturelle? fui grand peur que cette nature ne soit elle-même qu'une première coutume, comme la coutumeest une seconde nature.
— Pascal
Le divertissement
L'homme, égaré par l'amour de soi et les puissances trompeuses de l'imagination, refuse de prendre conscience deson néant, qui lui apparaît clairement dans l'ennui et fuit l'idée de la mort.
Il se réfugie dans le divertissement, tout ce qui le détourne du spectacle de sa condition misérable réelle, inscrite dans le temps et promise à la mort.
Ledivertissement, au sens pascalien, couvre toutes les activités profanes de l'homme : le jeu et l'amusement, bien sûr,mais aussi le travail et toutes les occupations sérieuses.
« Quelque condition qu'on se figure, si l'on assemble tous les biens qui peuvent nous appartenir, la royauté est leplus beau poste du monde, et cependant qu'on s'en imagine, accompagné de toutes les satisfactions qui peuvent letoucher.
S'il est sans divertissement, et qu'on le laisse considérer et faire réflexion sur ce qu'il est, cette félicitélanguissante ne le soutiendra point, il tombera par nécessité dans les vues qui le menacent, des révoltes quipeuvent arriver, et enfin de la mort et des maladies qui sont inévitables ; de sorte que, s'il est sans ce qu'on appelledivertissement, le voilà malheureux, et plus malheureux que le moindre de ses sujets, qui joue et se divertit »(Pascal, Pensées et Opuscules, Hachette, p.
390)..
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