Tchouang-tseu
Publié le 16/05/2020
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Tchouang-tseu Tchouang-tseu est un des trois fondateurs ou " Pères " du taoïsme.
Le premier, Lao-tseu , est à demi légendaire, son Taô-tô-king est pourtant le livre fondamental toujours cité lorsqu'on veut remonter aux principes du taoïsme, bien qu'il soit très difficile à traduire, c'est-à-dire à interpréter, lesdeux choses allant de pair dans cette doctrine.
Le troisième, Lie-tseu , dont l'existence historique n'est guère assurée, exprime des opinions assez peu cohérentes dans son oeuvre où la part d'interpolations a été difficilement délimitée par les sinologues.
Le second est précisément Tchouang-tseu, sur lequel on a des données plus précises, qui a composé une oeuvre en partie plus authentique et dont l'expression est brillante etpersonnelle.
Entre une personnalité mythique et laconique comme Lao-tseu et une personnalité peu authentique comme Lie-tseu , Tchouang-tseu fait figure définie et originale.
Il est un peu l'équivalent oriental d'un grand apôtre qui posséderait intimement la croyance du fondateur de religionauquel il succéderait et dont il exprimerait la doctrine dans sa plénitude et sa clarté.
Si tant est qu'on puisse comparer à un apôtre un aristocrate quifait le contraire d'un apostolat, et à une religion une doctrine qui a commencé par être le contraire d'une religion.
Le taoïsme vu à travers Tchouang-tseu ne peut en effet se comprendre que par relation avec les croyanceschinoises en général, et par opposition à la grande doctrine confucéenne.
Les Chinois en général, et encore plus dans l'antiquité, ne considèrent pas comme différentes des choses qui nous paraissent bien distinctes, lemonde et la Terre, la Nature et l'homme, le corps et l'esprit, etc.
Une seule force pénètre et anime tout, c'est le tao, déjà défini, si l'on peut dire, avant le taoïsme, comme une force à la fois cosmique, vitale et spirituelle.
Organiser sa vie selon le tao, voilà le devoir et aussi la liberté.
Mais comment interpréter le tao du point de vue pratique ? Voilà qu'éclate la divergence entre ceux qui croient nécessaires l'action et l'obéissance aux rites, et ceux qui pensent que l'homme doit s'abandonner au grand rythme de l'Univers : d'un côté, le règne de la loi, de l'autre, la soumission à laNature ; d'un côté, l'activité mise au service de la société, de l'autre la quiétude goûtée par l'individu.
Les deux doctrines prennent pour postulatl'existence d'un Ordre, mais tendent de plus en plus à entrer en conflit.
Nombreuses sont les anecdotes où l'on voit Confucius L049 , rendant visite à Lao-tseu H1146 , effrayé par l'étrangeté des vues de celui-ci et leur caractère irréfutable ; il s'en retourne en disant du " vieux maître " : " C'est un dragon ! " Cette opposition entre le taoïsme confiant dans la Nature, et le confucianisme épris des règles sociales alimente ensuite une polémiquede plusieurs siècles où tour à tour les confucéens sont traités de penseurs terre à terre, de réalistes à courte vue, de raisonneurs dépourvusd'intuition, bref de gens " plats " ; et les taoïstes, de rêveurs inconséquents, d'illuminés dangereux, d'égoïstes néfastes à la vie sociale.
CependantConfucius L049 accorde une grande place à l'harmonie naturelle dont l'harmonie sociale n'est qu'un reflet ; il ne prétend pas reconstruire une société à force de lois, il veut former des moeurs durables, etc.
Et inversement, Lao-tseu H1146 et ses disciples pensent à instaurer un bon gouvernement, ils ne sont pas insensibles au bonheur des autres hommes.
D'ailleurs, le taoïsme n'est pas un bloc qui se serait gardé intact jusqu'à nos jours.
Les trois fondateurs plus ou moinshistoriques qui vivaient entre le IVe et le IIIe siècle avant notre ère sont de grandes figures qui cachent, par lagrandeur de leurs vues cosmiques et par leur désintéressement intellectuel, la préoccupation déjà dominante desmembres de la secte, qui était de conquérir l'immortalité (corporelle aussi bien que spirituelle, les deux étantinséparables).
Les adeptes pensent y parvenir, comme on le voit déjà dans un texte de Tchouang-tseu, parl'abstention des céréales, par la pratique des exercices respiratoires, par la concentration de la pensée et ladirection de l'extase.
A côté des recettes d'hygiène et de gymnastique compliquées, il y a des préceptes de vie simples : garder le calmede l'esprit et du corps, se cultiver et gouverner les autres sans aucune intention intéressée ni désintéressée, oubliertoute chose pour posséder toute chose.
C'est la voie de Tchouang-tseu pour qui les recettes sont utiles maisinsuffisantes.
Et même pour lui les préceptes de méditations cèdent le pas à l'appel du vide.
Tchouang-tseu racontesa brusque conversion : dans une partie de chasse, il s'aperçoit que des êtres vivants, un oiseau, une cigale, unemante, en s'attaquant mutuellement, et surtout en oubliant le souci de leur propre conservation pour se livrer à leurvoracité ou à leur plaisir, causent leur propre perte ; de même, se dit-il, après avoir réfléchi trois mois, toutes lesprécautions que je prends pour nourrir mon corps et l'immortaliser peuvent être rendues inutiles par un instantd'oubli ; et pendant ce temps, je négligeais mon esprit qui, une fois détaché de ses passions, y compris celle dedurer, me donnera la béatitude.
S'il était possible d'employer des mots aussi usés, il faudrait dire que le taoïsme de Tchouang-tseu était " mystique "et qu'il devint, après lui, de plus en plus " magique " (ce qu'il était déjà un peu à l'origine) : recherche de la pierrephilosophale, culte des bienheureux mortels, adoration d'innombrables puissances infernales et célestes, liturgiescomplexes, sans parler des bains de soleil et des bains de lune ! La vie et l'oeuvre de Tchouang-tseu témoignent aucontraire de la plus grande simplicité.
Il vivait à la fin du IVe siècle av.
JC, en même temps que le disciple de Confucius L049 , Mong-tseu ( Mencius H1174 ) dans la province de Chantoung.
Il occupa un emploi public, mais quitta bientôt la vie politique, refusant même la charge de chancelier que lui offrait le roi.
" Le boeufdestiné au sacrifice, répondit-il, est grassement nourri pendant plusieurs années ; lorsqu'il est conduit au temple, il préférerait pourtant être unpetit porc...
" " Éloignez-vous donc et ne m'insultez point de votre présence.
J'aurai plus de plaisir à me coucher dans un ruisseauboueux qu'à me soumettre aux obligations de la cour.
" Il vécut donc pauvre et se retira avec sa dernière femme près d'une montagne.
A ses disciples qui voulaientl'enterrer solennellement, il répondit : " Le ciel et la terre sont mon cercueil, le soleil et la lune mes ornements dejade, les étoiles sont mes perles et mes joyaux, et tous les êtres suivront mon convoi.
" Les disciples reprirent :" Nous frissonnons à l'idée que les corneilles et les vautours pourraient dévorer le corps de notre maître.
" A quoi ilrépliqua : " Si l'on ne m'enterre pas, les corneilles et le milan me dévoreront ; et si l'on m'enterre, les courtilières et.
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