Tamquam clavo clavum eiciendum
Publié le 19/01/2022
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«
Tamquam clavo clavum eiciendum
Il faut chasser un clou par un clou
L'origine de cette sentence est un passage de Cicéron (Tuscu/anae dis
putationes,
4, 35, 75), où l'auteur évoque, comme plus tard saint
Jérôme
(Ep., 125, 14) et la Vita Gisleni Hanoniensis (148), un nouvel
amour
qui chasse un amour plus ancien, selon un topos traité également
par Publilius Syrus
(Q 34: Qui pote transferre amorem pote deponere,
> ).
Mais la
signification de notre proverbe était en réalité moins précise et s'appli-
quait à différents maux ou à diverses mésaventures qu'il fallait guérir
ou éviter par d'autres maux ou d'autres mésaventures,
de la même
façon qu'un clou pouvait en chasser un autre.
On trouve d'autres for
mules similaires en grec: notamment ~À Tov ~Xov ÈKKpoueLv,.
> ( cf.
Aristote, Politique, 5, 1314a 5 ; Lucien,
Philopseudes, 9 ; Apologia., 9 ; Pro lapsu, 1 ; Pollux, 9, 120 [ dont Kock
faisait un fragment comique (494)]; Grégoire de Nysse, Contra
Eunomium,
1, 1, 72 ; Athanase, Vila Sanctae Syncleticae, 28, 1505 ;
Pallade,
Histoire lausiaque, 26, 4); l'expression est répertoriée et
expliquée par les lexicographes, pour une liste d • attestations,
cf.
Photius 11 136 Theodoridis et Souda 'l 259 et nciTTaÀov naTTCIÀcp
È KKpoUElV, > (notam
ment chez Sinesius,
Ep., 45 [83, 13 sq.]) -ces deux locutions étant
citées l'une
à côté de l'autre par les parémiographes (cf.
Diogen.
5,
16 ; Greg.
Cypr.
M., 3, 60 ; Macar.
4, 4 78 ; Apost.
8, 52 ; 14, 1 ).
Citons quelques variantes particulières : 0(611pos CJL6~pcp ÈÀauveTal,
> (notamment chez Aristénète., Ep., 1, 25));
OlV(f) TOV olvov EeEÀOUVELV, (( Dissiper les effets du vin par le vin))
(Antiphane,
fr.
293, l K.-A.
; le fragment comique adespote 453 K.
n'est pas accepté e~ à juste titre, par Kassel-Austin; Plutarque., De
tuenda sanitate,
127f; Thémistios,' Ent Tfj ct,LÀav8pwn(q, 229E); Tc+)
KTT'I) Tov KoTTov ÀveLv, >
(Théophraste, De lassitudine, 6 ; Oribase, Euporistes, 1, 2, 8 ; Galien
De sanitate tuenda, 3, 8 ; Macar., 5, 22 ; pour Similia similibus curare,
cf.
n.
1456).
En latin tardif, l'image revient sous la plume de Guillaume
de Malmesbwy
(Gesta regum Anglorom, PL 179, 1126b) et sous celle
de Félix II (Pl 13, 27b), sous la version Palo ...
excutere palum (mais
palus désigne aussi le clou); Leon BattistaAlberti (Apologues, 80) cite
la maxime Jncommodum sine incommodo vitari non posse ..
>; Erasme (Adagia, 1, 2, 4) utilise le
lemme Clavum clavo pellere, expression qu'il avait déjà plusieurs fois
employée dans les Colloquia familiaria (cf.
Convivium religiosum:
Voluptas voluptate veluti clavus clavo pellitur, et Dilucu/um : C/avus
clavo pellitur, consuetudo consuetudine vincitur).
Toutes nos langues
modernes possèdent
un équivalent de notre Un clou chasse l'autre pour
évoquer
les tou1111ents causés par les soucis ( cf.
en italien, Chiodo scac
cia chiodo;
cf.
Arthaber 267 ; Mota 225 ; Lacerda-Abreu 80 et
Schwamenthal-Straniero
1848).
Les applications de cette expression au
domaine amoureux ne manquent pas non plus : cf.
la célèbre réplique
de Benvolio à Roméo dans
le Roméo et Juliette de Shakespeare ( 1, 2,
46 ..
51 ), qui, bien qu'il évoque en général les souffrances qui sont répu
tées en chasser d'autes, fait évidemment allusion aux peines d'amour de
Roméo.
On lit d'autres exemples dans le Roland furieux de I 'Arioste (28,
98, 6-8) ; dans le Cosi fan tutie de Mozart-Da Ponte ( 1, 3 : Trar chiodo
1
,er chiodo); dans l'Elixir d'amour de Donizetti-Romani (1, 3: Come
{·hiodo scaccia chiodo, / Cosi amor discaccia amor) et dans Pitié pour
/es femmes de Henry de Montherlant (Paris, 1936, 234).
Guitton
d 'Areizo ( I ,
14) utilise la sentence dans un autre contexte, pour évoquer
1·amour divin qui envahit le cœur du poète et doit chasser les amours
humaines (le vers Come d'asse si trae chiodo con chiodo est repris par
Pétrarque dans le Triumphus Amoris, 3, 69); on lit aussi diverses reprises
de notre image dans la Célestine de Fernando de Rojas (10, où l'expres
sion sert à illustrer l'idée qu'un mal se chasse rarement sans ïccourir à un
autre mal; en 15, c'est un amour qui en chasse un autre; en 16, une dou
leur qui en chasse une autre, ce qui vaut aussi pour d'autres sentiments).
D'autres expressions parallèles
ne manquent pas.
notamment parmi les
expressions populaires : cf.
en italien
Un diavolo caccia l 'a/tro
( Passarini 1225c ).
qui possède un précédent c~as§ique chez Eusèbe de
Césarée, Ad Hieroclem, 30 ; un aphorisme de Ramakrishn~ selon lequel.
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