Suisse (2004-2005): Un fonctionnement gouvernemental en « faible régime »
Publié le 27/09/2020
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Suisse (2004-2005): Un fonctionnement gouvernemental en « faible régime »
L’élection de Christoph Blocher au Conseil fédéral, en décembre 2003, comme
deuxième représentant de l’Union démocratique du centre (UDC), le parti le plus
à droite de l’échiquier politique, a-t-elle changé le système suisse de
concordance, ou, au contraire, la pratique de la concordance pouvait-elle
changer l’UDC et son chef, désormais responsable du département de Justice et
Police ? Les députés de la droite radicale et démocrate-chrétienne avaient
ouvert la porte du gouvernement au populiste zurichois dans l’idée qu’ils
trouveraient en lui un allié pour des réformes économiques d’envergure visant à
désendetter l’État et à assainir le financement des assurances sociales.
Ils
escomptaient en revanche que sur les autres dossiers, comme l’Europe ou
l’immigration, ils sauraient empêcher ses excès.
Leur calcul ne s’est pas révélé
faux d’une manière générale : en 2004, le « système » institutionnel suisse,
délicate horlogerie, a supporté le choc.
Hormis à l’occasion d’une initiative de
C.
Blocher consistant notamment à supprimer l’aide sociale d’urgence à des
demandeurs d’asile sans papiers (mars 2005), il y eut peu de conflits.
Cette nouvelle coalition fédérale a cependant eu trois effets importants.
Premièrement, la collégialité du Conseil fédéral, cette discipline que les
gouvernements suisses s’imposent pour compenser la diversité politique de leurs
membres, s’est dégradée.
Une règle non écrite exigeait qu’après discussion et
décision au sein du collège gouvernemental chaque ministre surmonte ses
désaccords pour défendre devant le Parlement et le peuple la position élaborée
en commun.
Désormais, chacun donne son opinion et personnalise sa politique,
court-circuitant le processus d’élaboration en commun.
Ensuite, le pays, ne
comprenant plus très bien, a manifesté son manque de confiance.
Ainsi, lors des
trois votations de l’année 2004, portant sur une petite dizaine d’objets, le
Conseil fédéral en a perdu six.
À plusieurs reprises, C.
Blocher a refusé de
faire campagne, allant jusqu’à dénoncer le principe même de l’engagement
gouvernemental en faveur de la position commune sur les sujets soumis au vote.
Enfin, la perte de confiance dans le Conseil fédéral a provoqué à son tour une
polarisation sur les deux forces qui semblaient tenir un discours « clair » :
l’UDC elle-même, dont les scores ont continué de croître dans les cantons, bien
qu’elle n’ait pas réussi à conquérir les exécutifs, et le Parti socialiste qui,
se posant en résistant, a vu son électorat s’élargir (victoire historique à
Neuchâtel en avril 2005).
Le fonctionnement gouvernemental helvétique est donc passé en « régime faible ».
Il n’a pas produit d’orientations politiques, sinon celles du renoncement à la
dépense publique et à l’engagement international.
Le refus du Parlement, par une
alliance de fait gauche/droite, d’acquérir deux avions de transport de troupes
pour des opérations de maintien de la paix à l’étranger en a été un symbole.
La croissance économique est restée morose : de – 0,1 % en 2003, elle n’est
remontée qu’à 1,7 % fin 2004 pour stagner autour de 1,5 % en 2005.
Une étude
officielle a stigmatisé le faible taux de productivité du travail.
Le Conseil fédéral a donné son accord pour le rachat de la compagnie aérienne
Swiss (ex-Swissair) par Lufthansa, en mars 2005.
Il tirait ainsi un trait sur le
milliard de francs suisses qu’il avait consenti en 2001-2002 pour sauver la.
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