SIGNORELLI
Publié le 17/05/2020
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SIGNORELLI
1441? -1523
DIRE que l'~rt de Luca Signorelli, né de celui de Piero della Francesca et de Pollajolo, a don
né naissance, à son tour, à celui de Michel-Ange, c'est
un lieu commun' dont on abuse aujourd'hui.
Que Piero della Francesca ait été le maître de Signorelli, Luca Paciolo et Vasari le disaient
déjà.
Piero a appris tant de choses et à tant d'artistes, qu'il est vraisemblable que Signorelli ait
été
du nombre.
Que Pollajolo ait pu lui servir de maître, les critiques modernes s'accordent à
l'affirmer, mais le fait est déjà moins certain.
Qu'enfin, Michel-Ange ait admiré Signorelli,
Va
sari nous le dit, et c'est un fait admis sans discussion.
Il est vrai que, des toutes premières œuvres de Signorelli, j'entends celles de son adoles
cence, aucune ne nous est parvenue,
et que, de ce fait, nous n'en pouvons juger.
Mais dans ce
que nous possédons de ses œuvres de jeunesse, nous n'apercevons aucune de ces hésitations
qui trahissent l'élève.
Son style, dès l'abord, se reconnaît entre tous.
Son individualité est si co
hérente que, sans
qu'il lui soit jamais nécessaire d'éliminer tel ou tel reliquat d'apports étrangers,
il ne fera,
au cours des années, que devenir de plus en plus profondément lui-même.
Dès le début,
Luca fut capable de renoncer à toute forme d'imitation (la Flagellation à la Galerie Brera, Milan,
et fresques à Città di Castello et à Morra).
La Légende de la sainte Croix, que Piero della Francesca peignit dans les années 1454- 1466,
révéla
au jeune Signorelli, arrivé à Arezzo entre 1455 et 1460, l'existence d'une forme précise,
déterminée dans
ses contours et reliefs par des lignes et des volumes des plus sommaires et obéis
sant à une savante stéréométrie.
Mais il ne vit pas qu'une telle forme, grâce à la synthèse que
Piero réalisa avec des couleurs imprégnées de lumière, se matérialisait et devenait éthérée en con
servant cependant son volumè concret.
Il suffisait au jeune homme que Piero, créateur d'un
monde surhumain, lui confirmât l'existence d'une forme qu'il sentait· instinctivement nécessaire,
rigoureuse, indéfectible.
En outre, l'art qui apparaît dans les fresques de Piero impliquait une
conception statuaire du corps humain, le figeant dans une immobilité supra-humaine qui rappe
lait presque celle d'une idole d'ivoire.
Il accentuait de cette manière le caractère spirituel de
ses figures.
Signorelli, au contraire, ne discernait point qu'une forme qui devait devenir mouve
ment, geste, sentiment, humanité vivante, pouvait
se raidir ainsi sans perdre sa valeur de réalité.
Pour trouver quelque chose d'analogue à la conception de la forme qui fut toujours celle
de Signorelli, il faut remonter à la plastique archaïque des Grecs ; gestes et mouvements y
sont exprimés
par autant d'actes caractéristiques qui les représentent, et la forme y est cris
tallisée
en volumes stéréométriques et facettés.
Mais Signorelli ne connaissait pas les sculpteurs
de l'archaïsme hellénique; il était donc obligé de résoudre lui-même le contraste entre la
forme statuaire immobile et la mobilité propre à exprimer les états d'âme.
L'exemple de.Pollajolo l'aurait aidé à trouver la solution de ce problème, mais Luca ne
se servira pas
de ses leçons.
Pour Pollajolo, la forme vivante est toute en mouvement et en détente.
132 SIGNORELLI par lui-même, « Actes de l'Antéchrist», détail.
(Cathédrale d'Orvieto.)
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