Séquence 3 : La Peau de chagrin LL 11 – Vouloir, savoir, pouvoir (p.83)
Publié le 10/06/2024
Extrait du document
«
I.
2) Le plaisir dans le mystère :
L.
1-2 : reprise lexicale afin de mieux suggérer l’étonnement à travers
l’exclamative puis incise.
Début d’une proposition hypothétique qui inaugure aussi
cette sorte de tirade rhétorique du vieillard.
L’hypothèse a pour but de proposer une
éventualité, une condition (“essaieriez”), une hypothèse sous forme interrogative
ouverte.
Le vieillard pose une série de questions dont la réponse n’est pas attendue
et semble évidente.
Notons d’ailleurs la symétrie des deux dernières questions
“arrêter le cours de la vie” // “scinder la mort” = cette symétrie suggère l’antithèse
du parcours, la vie rimant avec création et la mort avec destruction.
L.
2-3 : le vieillard confronte Raphaël à ce qu’il avait prévu, en effet il était
résolu de se suicider mais quelque chose semble lui faire oublier ce dessein, notons
ici la construction binaire de la proposition qui suggère ce va et vient entre vie et
mort retardée.
L.
3-4 : “mais” accentué par la locution adverbiale “tout à coup” suggérant un
changement brutal d’attitude, le vieillard met en évidence ici qu’un simple “secret”
le détourne de son envie de mourir preuve qu’en réalité de nombreuses choses
peuvent le maintenir à la vie.
De là découle le long discours sur les bienfaits du
savoir car cette curiosité de Raphaël sur le talisman le maintien en vie, il veut
“savoir” ce qu’il en est.
Nous avons donc pu voir que le vieillard a une posture ambigüe, bien que son geste ait
pour but premier d’intriguer Raphaël pour le divertir, le détourner de son suicide initialement
prévu, toujours est-il que son attitude est ambivalente puisqu’il tente le personnage principal.
La suite du discours va donc constituer un éloge du savoir autant qu’un avertissement des
dangers du pouvoir et vouloir qu’illustre cette peau.
II.
Cause de mort contre cause de vie (l.
4 à 20) :
Le vieillard apparaît aussi en tant que détenteur de la sagesse, ainsi veut-il montrer
non seulement le secret de sa longévité mais aussi donner une raison à Raphaël de continuer
à vivre.
1) Un triangle verbal gage de vie ou de mort :
L.
4-5 : interpellation infantile, construction de la figure de l’homme ayant tout
vécu racontant son histoire à un “enfant” suivi de l’exclamative.
Nouvelle question
rhétorique visant à montrer l’aspect positif de la vie : une éternelle série d’énigmes
toujours plus intéressantes et enrichissantes.
Importance de l’impératif “Ecoutezmoi”, c’est l’instant narration, le vieillard espère détourner Raphaël de cette peau
comme s’il savait ce qu’il risquait tout en ne le sachant pas a priori = ambivalence
encore.
L.
5-7 : dépréciation de la vie du vieillard mettant en parallèle la richesse qu’il a
observée à la cour du roi, adjectif péjoratif “licencieuse”, et mise en avant de sa
misère, mais une misère partagée.
Puis renversement de la situation avec le
« néanmoins », mise en avant de la longévité, il est centenaire et il est devenu
« millionnaire » = jeu de mots sur la richesse, ici le vieillard parle de richesse
spirituelle et non matérielle.
Série d’associations antithétiques entre des situations
en apparence regrettables et une conséquence positive = le malheur donne la
fortune (une leçon de vie finalement), l’ignorance instruit.
L.
7-9 : figure du vieillard détenteur du savoir, sa longévité légitime son discours
sur un « grand mystère de la vie humaine ».
Suggestion du suspens à travers
l’évocation de deux actes humains car instinctifs qui « tarissent l’existence », qui la
corrompent et l’épuisent comme une source d’eau.
Retour de l’énergie à travers un
vocabulaire fluvial.
L.
9-11 : le vieillard résume ces deux instincts par deux verbes mortels que le
texte met en évidence par l’écriture en majuscule.
Vouloir fait écho au désir,
thématique centrale du roman et pouvoir fait écho à l’énergie mais aussi au désir, la
peau propose un pouvoir capable de réaliser les désirs.
Intervient alors la posture
du sage qui intercale un verbe entre ces deux arrêts de mort, un verbe des
« sages », or le sage est détenteur, selon l’étymologie du nom, du savoir.
Mise en
avant du savoir source de bonheur et de longévité.
L.
11-13 : déconstruction péjorative et avertissement des dangers de vouloir et
pouvoir = notion de destruction avec le verbe (lien avec le parcours) puis tournure
adversative afin de mettre en avant le savoir, synonyme d’ataraxie = paix de l’âme
et absence de souffrance.
Importance du terme « perpétuel ».
2) Primauté du savoir :
L.
13-15 : supériorité de la pensée qui tue le désir/vouloir, mise en valeur
syntaxique de l’acte puis personnification du pouvoir définit par le « mouvement »,
le meurtre du désir a conduit le pouvoir à se soumettre.
L.
15-17 : mise en valeur du train de vie du vieillard à travers la négation
« non » : le désir met à mal le cœur et le brise, le pouvoir use les sens jusqu’à leur
disparition, notons le verbe « s’émoussent » qui crée un univers médiéval = l’épée.
Usage du « mais » qui représente la suprématie du cerveau, de la pensée, de
l’imagination finalement qui ne s’use pas et survit à tout : autrement dit c’est la
supériorité du spirituel, éternel, sur le matériel, éphémère.
L.
17-20 : le vouloir et le pouvoir sont désignés par l’excessivité, ainsi la négative
inversée « rien…ne » met en valeur l’absence totale de ce qui est nocif pour la vie
humaine.
Construction supérieure du vieillard face aux hommes « Ce que les
hommes appellent », il s’en dissocie.
Importance du mot « chagrins ».
La pensée est
décrite comme une puissance créatrice, le nocif, le mauvais, la tristesse est
transformée, transfigurée en rêverie, en évasion, en source de bonheur.
« Sentir »
qui est physique, terrestre s’oppose à l’expression, la traduction = objet de la
pensée.
Notons l’anaphore « au lieu de » qui peut même jouer sur la notion de lieu
= topos = lieu de l’imaginaire, de la pensée, c’est au lieu de la pensée dans le sens
dans ce domaine infini plutôt que la locution adverbiale.
« Dévorer » faisant écho au
désir, à ses vices, s’oppose ainsi à l’imaginaire qui dramatise (théâtral), qui
construit du romanesque + « vision intérieure » = celle de la pensée.
En un mot, le vieillard fait l’éloge de la pensée, de l’imagination, concept supérieur aux
préoccupations terrestres, matérielles et source de malheur et de tristesse.
Le discours du
vieillard se construit ainsi selon une argumentation manichéenne à travers l’usage de
tournures adversatives avec le « mais » et le « néanmoins ».
La suite du discours reprend le fil
de l’intrigue en faisant un retour sur la peau qui est à l’initiative de ce discours visant à
détourner Raphaël de ses deux actes « instinctifs ».
III.
La Peau contre la Sagesse :
A la manière d’un cycle, le vieillard maîtrise son discours et revient au sujet initial,
cette peau qui attise la curiosité et le désir de Raphaël.
Après avoir fait l’éloge général de la
pensée et de ses bienfaits, le vieillard va faire l’éloge de la pensée contre le talisman.
L.
20-21 : importance du démonstratif + de l’incise visant à illustrer l’insistance
du vieillard montrant la peau + présent de vérité générale avec l’usage du verbe
d’essence « être ».
La Peau est la somme de ce qu’il y a de plus mortel pour
l’homme : le vouloir et le pouvoir.
L.
21-22 : importance de l’adverbe “là” qui a une valeur déictique puis le retour
du présent de vérité générale amenant une série de juxtapositions qui permet une
accumulation de vices : le pouvoir et le vouloir sont des vices sociaux, ils sont le
fruit de la corruption humaine d’où cette stigmatisation qui fait office
d’avertissement.
La Peau résume les “idées sociales”, l’excessivité des désirs (sans
fin), les intempérances (importance du préfixe négatif, attitude contraire à la
mesure), paradoxe avec des joies meurtrières et “douleurs qui font vivre”.
La Peau
est un concentré diabolique des vices humains.
L.
22-23 : phrase ambigüe à travers la restrictive = le mal n’est qu’un violent
plaisir, autrement dit, l’énergie humaine porte naturellement vers le mal, la
transgression qui implique une forme de plaisir excessif.
Notons le modalisateur
“peut-être”.
========> La suite du discours montrera le vieillard reprenant sa posture d’homme de la
sagesse, plus précisément socratique, en procédant par des questions rhétoriques visant à
faire réfléchir.
Ainsi le vieillard construit sa première question à travers un chiasme = la
volupté devenant un mal et le mal qui est encore la volupté = forme d’impasse qui suggère
justement l’impasse des vices humains où chaque sentiment conduit au mal.
La deuxième
question est intéressante puisqu’elle va renverser les valeurs : opposition du Bien et du Mal
avec “lumières” et “ténèbres” tous deux qualifiés par des adjectifs “vives” et “douces”.
Le
renversement réside dans l’attrait pour la lumière qui caresse la vue là où les ténèbres
blessent “toujours” or....
»
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