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Schopenhauer (1788-1860): LE VOULOIR-VIVRE

Publié le 18/06/2020

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« où nous détenons tous immédiatement le critère de mesure du vrai : la raison. Autant dire que chacun pourrait être cordonnier, parce que tout le monde a des pieds, critère de mesure de la chaussure ! Le sens commun est un « très bon » succédané de la philosophie, dit Hegel, de même que la chicorée est un « très bon » succédané de café. 2. Le savoir spéculatif A. L'entendement Une réalité se présente, extérieure à mon esprit : ma tâche est de la connaître, de la comprendre, de la penser. La nature de cette réalité englobe une plénitude de caractéristiques différentes : l'objet est concret. La concrétude d'un objet, en effet, c'est sa richesse ; l'abstraction d'un objet, c'est sa pauvreté. Le triangle tracé sur le sol est concret, il semble que sa description pourrait s'étendre sans fin (il a une épaisseur, une dimension, un lieu, une durée de vie, etc.) ; le triangle en idée de la géométrie, au contraire, estabstrait, il n'a qu'un nombre limité de caractéristiques, toutes géométriques. ? La première tâche de l'esprit face aux choses concrètes est l'analyse ; elle incombe à l'entendement. Il s'agit de faire entrer le coin de l'esprit dans la texture compacte de la chose, de séparer les caractéristiques, de classer les propriétés : l'entendement est une force destructrice qui dénoue la solidarité des déterminations de la chose,et dissout cette dernière en éléments indécomposables. L'entendement permet seul de comprendre ; mais c'est une force d'abstraction, c'est-à-dire de séparation et d'appauvrissement simultané des déterminations de la chose. ? L'entendement pense abstraitement : au lieu de s'en tenir à la nature complexe, à la fois une et diverse, de la chose - la pierre est blanche-ronde-dure-froide-lourde... -, il parle de qualités générales abstraites : blancheur, rondeur, dureté, froideur, lourdeur, etc. Où se tient la chose réelle, existante, derrière ces qualités séparées les unes des autres ? L'entendement nepense que par opposition : il oppose les déterminations de la chose les unes aux autres - blancheur et dureté, par exemple, sont comme des choses dans la chose. L'entendement ne détient pas la réalité des choses, mais la dénature : il est extérieur à la vérité, comme il est extérieur à la chose. B. La dialectique négative ? La pensée abstraite de l'entendement est unilatérale : elle ne pénètre ni n'exprime la totalité de la chose même, mais restitue un nombre indéterminé de points de vue sur elle. L'entendement ne peut aboutir qu'à des points de vue, c'est-à-dire à un savoir relatif,jamais à un savoir absolu. ...»

« Schopenhauer (178�-1860) LE V O U LO IR -V IV R E I mprégné de Platon et de l'-ant, Schopenlumer fut l!_rof ondé­ ment 11wrqué par la découverte ,lu bouddhisme.

« A dix-sept a11s, je fus saisi par ltt détresse de la vie, comme le fut Bouddha dans sa jeunesse.

» Athée, il cherche le salut dans l'abandon de tout désir, et l'accession au nirvana.

1.

Le pessimisme radical A.

Le voile de l'illusionti:l Schopenhauer reprend, à sa f a çon, la distinction kantienne entre le phénomène et la chose en soi.

Le monde se révèle de deux manières.

Connu à distance, comme un objet distinct de nous, à travers le prisme de l'intelligence, il est phénomène.

C'est le monde comme re-présentation.

111 Il apparaît alors régi par des principes : individuation (les êtres sont séparés les uns des autres par l'espace et le temps); causalité (ils sont liés par des relations de cause à effet) ; principe de raison suffisante (rien n'est sans raison).

Mais ces catégories ne sont qu'un voile, non le fond des choses ; la représentation n'est qu'apparence.

111 Car en deçà de ces catégories imposées par l'esprit, des relations que nous établissons entre les choses, en deçà du quadrillage que nous lui appliquons pour l'utiliser, le monde existe en soi.

Et, à la différence de Kant, Schopenhauer affirme que nous avons accès à cet en-soi.

Nous le saisissons tel qu'en lui-même par l'intuition immédiate, où nous ne faisons plus qu'un avec lui.

B.

La souffrance du vouloir-vivre 111 La nature de l'être en soi se révèle d'abord dans l'épreuve que nous f a isons de nous-mêmes: l'être est vouloir-vivre* - tension fondamen­ tale qui nous entraîne de désir en désir, sans que nous puissions l'arrêter.

Nous ne sommes pas maîtres de la volonté, c'est elle qui agit en nous, elle qui motive inconsciemment nos représentations, elle qui détennine nos désirs.

111 Cette tension est à l 'œuvre aussi dans les choses : tout l'univers est la manifestation du vouloir-vivre, principe unique, aveugle, anonyme, universel.

En lui, du minéral à l'animal, tout est un.

L'individualité (principe de la représentation) n'est qu'une apparence: par la racine de notre être, nous sommes en union avec tous les autres.

■ Manque perpétuel, le vouloir-vivre est essentiellement souffrance. Puissance sans intelligence, il est sans raison, il veut pour vouloir, ses objets sont secondaires.

La vie par conséquent n'a pas de sens, pas de but ultime ; et pour cesser de souffrir, il faudrait cesser de vouloir.. »

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