Saint-Simon, duc de - littérature.
Publié le 06/12/2021
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Saint-Simon, duc de - littérature.
1
PRÉSENTATION
Saint-Simon, duc de (1675-1755), mémorialiste français dont les Mémoires (1691-1723) constituent un témoignage à la fois historique et humain sur la fin du règne de Louis XIV et sur la Régence.
2
CÔTÉ COUR
Né à Paris, fils unique du second mariage du duc Claude -- élevé en 1635 à la dignité de duc et pair par Louis XIII --, Louis de Rouvroy qui n'est encore que le vidame de Chartres est présenté à Louis XIV en 1691. Ami d'enfance du futur duc
d'Orléans, Louis, devenu duc de Saint-Simon à la mort de son père (1693), se passionne pour l'histoire tout en s'essayant au métier des armes (il participe aux dernières campagnes des guerres de la ligue d'Augsbourg), et, très tôt, à l'écriture (il
commence ses Mémoires à dix-neuf ans). En 1695, il épouse Marie-Gabrielle, fille du maréchal de Lorge : de cet heureux mariage naîtront une fille et deux fils, qui disparaîtront avant leur père.
Sa vie de courtisan à Versailles, Fontainebleau, Marly, où se succèdent les intrigues et événements mondains, lui donne matière à observer, à deviner les êtres. Épris d'ordre et de justice, amoureux de toute vérité, passionné du bien de l'État, SaintSimon, ancien disciple de Malebranche et lecteur de Bayle, est en même temps disciple de Rancé, le réformateur de la Trappe, où il fait régulièrement retraite. S'il ne joue aucun rôle officiel à la cour, il est cependant l'intime des ducs de Chevreuse et
de Beauvillier, mentors du duc de Bourgogne, petit-fils de Louis XIV en qui il place tous ses espoirs. Bien informé, à l'affût de tout et de tous, il dressera, dans ses Mémoires, la « carte « de cette cour qu'il ne quitte que pour de brefs séjours dans son
domaine de La Ferté-Vidame, dans le Perche.
Dès le début de la guerre de Succession d'Espagne, ses analyses comme ses sympathies jansénistes le conduisent peu à peu à un pessimisme lucide qui ne l'empêche pas de lutter contre l'abaissement de la noblesse, l'élévation scandaleuse des
bâtards de Louis XIV et les usurpations et abus de toutes sortes. En disgrâce à la fin de 1708, pour avoir osé parier que Lille tomberait aux mains de l'ennemi, Saint-Simon regagne la confiance du roi au début de 1710 en parvenant à provoquer la
rupture du duc d'Orléans et de sa maîtresse, puis en menant à bien le mariage de Mademoiselle, fille du futur régent, avec le duc de Berry, troisième petit-fils de Louis XIV. La mort de Monseigneur, Grand-Dauphin, en 1711, est une joie secrète qui ne
dure guère, car celles de la duchesse, puis du duc de Bourgogne, en 1712, sont, pour Saint-Simon, une tragédie personnelle et nationale. Celle du duc de Berry, en 1714, place la couronne, à la disparition du Grand Roi, en 1715, sur la tête d'un
enfant de cinq ans. Commence alors pour Saint-Simon une carrière d'homme d'État de l'ombre.
Nommé par Philippe d'Orléans au Conseil de régence (voir Régence), Saint-Simon tente, sans illusion, de mettre en place et de faire durer la polysynodie, mais surtout de faire profiter de son savoir, de son expérience et de ses vues un régent de plus
en plus « possédé « par l'abbé Dubois. Si le lit de justice d'août 1718, qui réduit les bâtards à leur rang de pairie, est un succès personnel, la banqueroute de Law, en qui il n'a jamais cru, prouve, en 1720, l'échec du rétablissement des finances tenté
par son ennemi personnel, le duc de Noailles ; l'enregistrement, la même année, par le parlement, de la bulle Unigenitus est, pour le gallican Saint-Simon, une catastrophe religieuse. Impuissant à contenir les désordres qu'il voit grandir, il part, en
1721, comme ambassadeur extraordinaire en Espagne, à l'occasion du double mariage de Louis XV et d'une fille de Philippe V, ainsi que d'une fille du Régent avec l'Infant. Son intelligence du pays, des hommes et de la cour d'Espagne fait merveille et
donne la mesure de ses capacités politiques. À son retour, la nomination de Dubois au poste de Premier ministre, malgré son avis, suivie de la mort du cardinal et du Régent un an plus tard, sonne le glas de ses ambitions, s'il en eut jamais d'autres
que d'être utile à son pays. Il a quarante-huit ans, sa vie publique est derrière lui, et il lui reste trente-deux ans à vivre.
3
CÔTÉ JARDIN
Les plants de ses terres ne lui offrant qu'une occupation relative, Saint-Simon passe les heures, comme il l'a toujours fait, à de vastes travaux d'écriture, en particulier, dès 1729, la rédaction de ses « Additions « au Journal de Dangeau, récit au jour
le jour des événements de la cour, dont il tirera, dix ans plus tard, le matériau des Mémoires. Son immense bibliothèque, sa puissance de travail lui permettent d'accumuler les pages de généalogies ou d'histoires des familles, des charges et des
dignités, en particulier les Notes sur les Duchés-Pairies : une part de ces recherches sera insérée dans le grand oeuvre, dont il entame la rédaction en 1739. Mais le matériau premier reste sa propre mémoire. L'immense manuscrit prend forme,
interrompu à la mort de sa femme, en janvier 1743, puis repris six mois plus tard par la rédaction du préambule, où il définit sa tâche d'historien et de chrétien. Une autre interruption le voit rédiger ce chef-d'oeuvre qu'est le Parallèle des trois
premiers rois bourbons (1746), et ce n'est qu'en 1749 qu'il achève le manuscrit de deux mille huit cent cinquante-quatre pages, reliées en onze portefeuilles à ses armes et destinées à une publication posthume. Il meurt le 2 mars 1755, quelques
mois après Montesquieu.
La première édition complète des Mémoires a lieu en 1829. Monument de ses passions et de ses haines, mais aussi de ses amitiés et de sa fidélité, le texte, d'une verve incomparable, révèle un don de la formule et du coup d'oeil qui séduit dès la
première lecture. Irremplaçable dès qu'il s'agit d'évoquer ou d'étudier le Grand Siècle, Saint-Simon est aussi cet écrivain qui ne se voulait pas auteur : nul académisme dans son style, comme nul archaïsme dans sa pensée, où prédomine un souci de
constance et de continuité associé à un respect farouche de la tradition et de ses formes d'expression, ainsi que, complémentaire de ses dons d'analyse des hommes et des faits, une totale sincérité. Qu'il ait été mauvaise langue ne gâte rien, le
préambule aux Mémoires s'en explique. En un mot, un aristocrate : dans son temps et le surplombant, dans sa vie et y jouissant du décalage de l'écriture, dans sa foi, dans ses convictions, dans sa singularité de duc et pair à l'écritoire.
Voir Mémoires (Saint-Simon).
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Saint-Simon, duc de - littérature.
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PRÉSENTATION
Saint-Simon, duc de (1675-1755), mémorialiste français dont les Mémoires (1691-1723) constituent un témoignage à la fois historique et humain sur la fin du règne de Louis XIV et sur la Régence.
2
CÔTÉ COUR
Né à Paris, fils unique du second mariage du duc Claude -- élevé en 1635 à la dignité de duc et pair par Louis XIII --, Louis de Rouvroy qui n'est encore que le vidame de Chartres est présenté à Louis XIV en 1691. Ami d'enfance du futur duc
d'Orléans, Louis, devenu duc de Saint-Simon à la mort de son père (1693), se passionne pour l'histoire tout en s'essayant au métier des armes (il participe aux dernières campagnes des guerres de la ligue d'Augsbourg), et, très tôt, à l'écriture (il
commence ses Mémoires à dix-neuf ans). En 1695, il épouse Marie-Gabrielle, fille du maréchal de Lorge : de cet heureux mariage naîtront une fille et deux fils, qui disparaîtront avant leur père.
Sa vie de courtisan à Versailles, Fontainebleau, Marly, où se succèdent les intrigues et événements mondains, lui donne matière à observer, à deviner les êtres. Épris d'ordre et de justice, amoureux de toute vérité, passionné du bien de l'État, SaintSimon, ancien disciple de Malebranche et lecteur de Bayle, est en même temps disciple de Rancé, le réformateur de la Trappe, où il fait régulièrement retraite. S'il ne joue aucun rôle officiel à la cour, il est cependant l'intime des ducs de Chevreuse et
de Beauvillier, mentors du duc de Bourgogne, petit-fils de Louis XIV en qui il place tous ses espoirs. Bien informé, à l'affût de tout et de tous, il dressera, dans ses Mémoires, la « carte « de cette cour qu'il ne quitte que pour de brefs séjours dans son
domaine de La Ferté-Vidame, dans le Perche.
Dès le début de la guerre de Succession d'Espagne, ses analyses comme ses sympathies jansénistes le conduisent peu à peu à un pessimisme lucide qui ne l'empêche pas de lutter contre l'abaissement de la noblesse, l'élévation scandaleuse des
bâtards de Louis XIV et les usurpations et abus de toutes sortes. En disgrâce à la fin de 1708, pour avoir osé parier que Lille tomberait aux mains de l'ennemi, Saint-Simon regagne la confiance du roi au début de 1710 en parvenant à provoquer la
rupture du duc d'Orléans et de sa maîtresse, puis en menant à bien le mariage de Mademoiselle, fille du futur régent, avec le duc de Berry, troisième petit-fils de Louis XIV. La mort de Monseigneur, Grand-Dauphin, en 1711, est une joie secrète qui ne
dure guère, car celles de la duchesse, puis du duc de Bourgogne, en 1712, sont, pour Saint-Simon, une tragédie personnelle et nationale. Celle du duc de Berry, en 1714, place la couronne, à la disparition du Grand Roi, en 1715, sur la tête d'un
enfant de cinq ans. Commence alors pour Saint-Simon une carrière d'homme d'État de l'ombre.
Nommé par Philippe d'Orléans au Conseil de régence (voir Régence), Saint-Simon tente, sans illusion, de mettre en place et de faire durer la polysynodie, mais surtout de faire profiter de son savoir, de son expérience et de ses vues un régent de plus
en plus « possédé « par l'abbé Dubois. Si le lit de justice d'août 1718, qui réduit les bâtards à leur rang de pairie, est un succès personnel, la banqueroute de Law, en qui il n'a jamais cru, prouve, en 1720, l'échec du rétablissement des finances tenté
par son ennemi personnel, le duc de Noailles ; l'enregistrement, la même année, par le parlement, de la bulle Unigenitus est, pour le gallican Saint-Simon, une catastrophe religieuse. Impuissant à contenir les désordres qu'il voit grandir, il part, en
1721, comme ambassadeur extraordinaire en Espagne, à l'occasion du double mariage de Louis XV et d'une fille de Philippe V, ainsi que d'une fille du Régent avec l'Infant. Son intelligence du pays, des hommes et de la cour d'Espagne fait merveille et
donne la mesure de ses capacités politiques. À son retour, la nomination de Dubois au poste de Premier ministre, malgré son avis, suivie de la mort du cardinal et du Régent un an plus tard, sonne le glas de ses ambitions, s'il en eut jamais d'autres
que d'être utile à son pays. Il a quarante-huit ans, sa vie publique est derrière lui, et il lui reste trente-deux ans à vivre.
3
CÔTÉ JARDIN
Les plants de ses terres ne lui offrant qu'une occupation relative, Saint-Simon passe les heures, comme il l'a toujours fait, à de vastes travaux d'écriture, en particulier, dès 1729, la rédaction de ses « Additions « au Journal de Dangeau, récit au jour
le jour des événements de la cour, dont il tirera, dix ans plus tard, le matériau des Mémoires. Son immense bibliothèque, sa puissance de travail lui permettent d'accumuler les pages de généalogies ou d'histoires des familles, des charges et des
dignités, en particulier les Notes sur les Duchés-Pairies : une part de ces recherches sera insérée dans le grand oeuvre, dont il entame la rédaction en 1739. Mais le matériau premier reste sa propre mémoire. L'immense manuscrit prend forme,
interrompu à la mort de sa femme, en janvier 1743, puis repris six mois plus tard par la rédaction du préambule, où il définit sa tâche d'historien et de chrétien. Une autre interruption le voit rédiger ce chef-d'oeuvre qu'est le Parallèle des trois
premiers rois bourbons (1746), et ce n'est qu'en 1749 qu'il achève le manuscrit de deux mille huit cent cinquante-quatre pages, reliées en onze portefeuilles à ses armes et destinées à une publication posthume. Il meurt le 2 mars 1755, quelques
mois après Montesquieu.
La première édition complète des Mémoires a lieu en 1829. Monument de ses passions et de ses haines, mais aussi de ses amitiés et de sa fidélité, le texte, d'une verve incomparable, révèle un don de la formule et du coup d'oeil qui séduit dès la
première lecture. Irremplaçable dès qu'il s'agit d'évoquer ou d'étudier le Grand Siècle, Saint-Simon est aussi cet écrivain qui ne se voulait pas auteur : nul académisme dans son style, comme nul archaïsme dans sa pensée, où prédomine un souci de
constance et de continuité associé à un respect farouche de la tradition et de ses formes d'expression, ainsi que, complémentaire de ses dons d'analyse des hommes et des faits, une totale sincérité. Qu'il ait été mauvaise langue ne gâte rien, le
préambule aux Mémoires s'en explique. En un mot, un aristocrate : dans son temps et le surplombant, dans sa vie et y jouissant du décalage de l'écriture, dans sa foi, dans ses convictions, dans sa singularité de duc et pair à l'écritoire.
Voir Mémoires (Saint-Simon).
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