Rousseau sur l'amour propre
Publié le 05/06/2024
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HLP Terminale – la recherche de soi : Rousseau - explications
HLP – Terminales.
La recherche de soi.
Rousseau et l’aliénation de l’amour-propre.
Remarques sur les textes.
Dans le premier texte Rousseau explique la genèse de l’amour-propre à partir de la
passion primitive qu’est l’amour de soi.
Comprendre cette genèse c’est comprendre le rôle de
cette différence pour saisir la condition humaine qui est essentiellement une condition sociale,
c'est-à-dire déterminée par le fait que les hommes vivent les uns avec les autres.
Que signifie
vivre selon l’amour de soi et en quoi l’amour-propre peut être considéré comme une
aliénation, comme une perte de soi ?
L’amour de soi est une passion primitive, c'est-à-dire naturelle qui permet aux
individus vivants de faire ce que la perpétuation de leur vie implique.
L’individu vivant ne
peut continuer de vivre que s’il agit pour trouver ce qui lui est utile et repousser ce qui lui
nuit.
Tant que ses actions sont déterminées par l’amour de soi, c'est-à-dire par un principe
naturel, l’individu a un principe sûr qui lui permet de distinguer ce qui est effectivement utile
et bon pour lui de ce qui ne l’est pas.
Une erreur est certes toujours possible, mais elle ne peut
être qu’accidentelle car le principe naturel assure la concordance des besoins de l’individu et
des biens de son environnement puisque, si ce n’était pas le cas, l’individu serait mort.
L’amour-propre est un tout autre rapport à ce qui est extérieur à l’individu car ce n’est
plus d’abord un rapport à des choses, mais à des intentions, et par là, aux désirs des autres.
L’amour-propre est une passion qui a son origine dans le fait que, lorsque ce qui nous est utile
nous est donné par quelqu’un, nous considérons ce don comme un acte intentionnel.
A partir
de là, notre besoin se transforme pour devenir le désir du désir manifesté dans les actions des
autres : nous voulons être aimé au lieu de simplement vouloir ce qui nous est
« objectivement » utile.
Nous passons d’un rapport instinctif au réel à un rapport désirant aux
êtres que nous considérons comme ayant des intentions à notre égard, c'est-à-dire capables de
décision et donc de désir (nous prêtons cette faculté aux hommes mais aussi à certains
animaux, notamment à ceux qui vivent avec nous).
Nous voulons être désiré, c'est-à-dire être
préféré intentionnellement : l’amour-propre est ainsi toujours comparatif puisqu’il semble y
avoir une composante exclusive dans le désir : vouloir être désiré c’est vouloir être distingué
des autres.
Rousseau montre l’impasse où conduit ce sentiment puisqu’il « exige aussi que les
autres nous préfèrent à eux, ce qui est impossible ».
La suite du texte et les textes suivants
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vont montrer en quoi cette substitution est funeste pour les hommes car elle les conduit au mal
et à l’incapacité de vivre selon la vérité qui leur permettrait d’avoir une satisfaction réelle.
Ce que montre les deux textes suivants et particulièrement le troisième, c’est que vivre
selon le principe de l’amour-propre c’est vivre avec les autres en étant soumis au principe de
l’opinion que les autres ont de nous car c’est par elle que nous avons aussi une opinion de
nous-même.
Il faut susciter le désir de l’autre pour obtenir de lui non seulement ce dont nous
avons besoin, ce qui nous est utile, mais pour obtenir aussi le signe de son désir, de son
amour.
L’amour-propre de l’individu se nourrit ou périt de l’amour qu’il suscite.
On aime
celui qui nous aime et on hait celui qui nous hait et on se connaît soi-même par ces amours ou
ces haines.
Le troisième texte veut montrer que l’organisation sociale qui est fondée sur le
principe de propriété aura pour effet le développement du malheur social.
La propriété devient
en effet le moyen par lequel on dispense les signes de l’amour ou de la haine et, de ce fait,
disposer de biens c’est avoir un pouvoir sur les autres, matériel et symbolique.
Cela met les
autres en position de devoir plaire à celui qui possède.
Personne ne peut plus « être », mais
tout le monde doit « paraître ».
La perte de l’indépendance est aussi la perte de la liberté
puisque nous sommes soumis à la nécessité des rapports de séduction pour obtenir des autres
notre subsistance, qu’elle soit matérielle ou affective.
Nous voyons donc que la critique que développe Rousseau consiste à montrer que les
hommes perdent leur vérité en étant pris dans la logique de l’amour-propre et qu’ils ne
peuvent vivre que de façon inauthentique puisqu’il se soumettent à l’approbation de l’opinion
des autres plutôt qu’à leur propre désir.
La société n’est alors qu’un ensemble de rapports
hypocrites où, comme le dit aussi Pascal avant Rousseau, « la vie humaine n’est qu’une
illusion perpétuelle ; on ne fait que s’entre-tromper et s’entre-flatter » (Pensées).
Néanmoins, il faut bien remarquer que l’apparition de l’amour-propre est aussi
l’apparition de la conscience de soi distincte de la vie animale naturelle.
Nous dépassons la
condition animale qui est déterminée par l’instinct de façon « machinale » (mécanique et
nécessaire), en accédant à la conscience des représentations et significations : des
« intentions ».
C’est ce qui nous permet de nous déterminer en fonction d’idées et plus
simplement d’être déterminé par un instinct.
Nous nous rapportons aux autres et à nous-même
selon des représentations qui constituent les opinions dont se composent l’amour-propre.
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Or, si nous sommes constitués par notre amour-propre en tant....
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