ROUBLEV
Publié le 17/05/2020
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«
ROUBLEV
vers 1360- vers 1430
ANDRÉ RouBLEV, dont le nom se prononce en ~usse Roubliov, est assurément le peintre
le plus illustre de l'école russe
du moyen âge.
Sa renommée était si grande que le Concile du
« Stoglav »·ou des Cent Chapitres qui siégea à Moscou en 1551 le recommanda comme modèle
à tous
les peintres d'icones.
D'après
les recherches biographiques les plus récentes, il serait né vers 1360 et mort vers
1430.
Il appartient donc à la même génération que Fra Angelico auquel il s'apparente par
sa vocation de moine.
Sa formation artistique nous échappe.
Peut-être fit-il un séjour à Byzance où il se serait fa
miliarisé avec
la Renaissance de l'époque des Paléologues.
Le plus probable est qu'il se forma
à Moscou sous
la direction de Théophane le Grec et de Danila Tchorny avec lesquels on le
voit collaborer de
1405 à 1425.
Les deux seules œuvres qui peuvent nous donner aujourd'hui la sensation encore vive
du génie de Roublev sont les fragments du Jugement dernier de Vladimir et l'icone de la Trinité.
La grande fresque du Jugement dernier qui décore la cathédrale Ouspensky, c'est-à-dirè
de
la Dormition de la Vierge, à Vladimir en Souzdalie, est datée exactement de 1408.
Les frag
ments conservés représentent le
Christ en Majesté, l'Hétimasie ou Préparation du trône, un
groupe d'anges soufflant dans des trompettes, la Terre et la Mer rendant leurs morts.
Il est plus difficile de
dater l'admirable icone de la Trinité, provenant du couvent de la
Trinité Saint-Serge, qui a été récemment transportée, après enlèvement de son revêtement en
métal estampé, au Musée historique de Moscou.
Tout ce qu'on peut dire, c'est que son exé
cution
se place entre 1408 et 1425.
Le sujet est traité conformément à la tradition de l'icono
graphie byzantine.
On n'y voit pas, comme dans l'art d'Occident, les trois Personnes de la Tri
nité, mais leur symbole de l'Ancien Testament, sous la forme des Trois Anges refUS à la table
d'Abraham.
Roublev écarte délibérément tous les personnages accessoires et ne retient que les
figures symboliques.
Les trois anges,
tenant un long sceptre entre leurs doigts fuselés, sont assis
autour d'une table basse, sur laquelle est posée une simple coupe.
Leur tête pensive est auréo
lée
d'un nimbe d'or; leurs yeux en amande ont une expression mystérieuse et leurs grandes
ailes repliées font songer à des oiseaux descendus sur
la terre avant de reprendre leur essor.
La simplicité monumentale de la composition, le rythme harmonieux de ces trois têtes
penchées, le
jet majestueux des draperies, révèlent l'œuvre d'un maître accoutumé aux amples
conceptions
de la décoration murale.
Mais ce qui en fait le charme le plus rare, c'est une déli
cate
spir!tualité.
Tout est calculé pour éveiller l'impression que les mystiques visiteurs n.e sont
point des créatures
de chair, mais des êtres supraterrestres et presque incorporels, de purs es
prits, des âmes en voyage.
Rien n'égale dans la peinture d'icones russe ce chef-d'œuvre d'un art profondément
idéaliste.
LOUIS RÉAU
Membre de l'Institut
Professeur lwnoraire à la Sorbonne
Paris
ROUBLEV « Saint Demllrios.
» lc4ne, détail.
(Eglise de la T rinili-Saint-Serge,
pris Moscou.).
»
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