Ronsard a écrit en 1550 que « la mort guide nos pas » (odes II, 12). Pensez-vous que les poètes doivent en faire un sujet essentiel de leurs textes ?
Publié le 09/12/2021
Extrait du document
« Demain dès l'aube » où il traite de la perte douloureuse de sa fille Léopoldine 2) La vie comme déchéance Si la poésie évoque la vie, elle la présente souvent comme une déchéance inéluctable. La vie est donc présentée dans son rapport à la mort, en tant que chemin vers la mort. Le poète peut donc évoquer la vie dans ce qu'elle a de plus laid et de plus immonde, rappelant ainsi sa finalité ultime : la mort. La représentation poétique de la vie comme déchéance prend souvent la forme du pourrissement, de la putréfaction. Ex : · « La Ballade des pendus » de Villon et en particuliers ces vers présentant de façon très visuelle la décomposition des corps des pendus : Vous nous voyez attachés ici, cinq, six: Quant à notre chair, que nous avons trop nourrie, Elle est depuis longtemps dévorée et pourrie, Et nous, les os, devenons cendre et poussière. De notre malheur, que personne ne se moque, Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre! · « Une charogne » de Baudelaire : poème centré autour du thème de la décomposition et de la pourriture. 3) La fuite du temps : un thème poétique universel Le thème de la fuite du temps, témoignant de la brièveté de la vie et présentant la mort comme un but inéluctable est un thème courant de la poésie, en particulier de la poésie lyrique du Romantisme. Les Romantiques ont souvent pour sujet principal le Temps dans ce qu'il a de destructeur, ce sujet évoquant en creux l'ombre de la mort, planant sur les hommes et obsédant leurs pensées. Mais des poètes issus de divers courants et mouvements ont traité de cette fuite tragique et angoissante du temps. Ex : · Le poème « On vit, on parle » de Hugo, extrait des Contemplations, prend la forme d'un tableau universel de l'existence humaine, de l'enfance à la mort, présentant cette dernière comme le port ultime où s'arrête le voyage de la vie : On est flot dans la foule, âme dans la tempête; Tout vient et passe; on est en deuil, on est en fête; On arrive, on recule, on lutte avec effort.
«
Ronsard a écrit en 1550 que « la mort guide nos pas » (odes II, 12).
Pensez-vous que les poètes doivent en faire un sujet essentiel de leurs textes ?
Analyse du sujet et problématisation :Ronsard écrit que « la mort guide nos pas » dans une ode de 1550 proposant une réflexion sur la brièveté de la vie et plus particulièrement de la jeunesse. Par cette expression on peut entendre que la mort est conçue comme la finalité, comme le but ultime de toute vie.
Cette expression peut-être vécue comme angoissante si l'on considère que l'ombre de la mort plane sanscesse au dessus de nos vies et peut nous emporter à tout instant.
Mais elle peut être considérée comme apaisante,présentant la mort comme un « guide » qui peut nous enjoindre à profiter à chaque instant de cette vie si brève etqui peut aussi favoriser une réflexion sur l'après-vie. La mort comme finalité, comme menace, comme « guide » est envisagée ici en tant que thématique essentielle de la poésie.
Problématique : La poésie est-elle nécessairement une évocation tragique et morbide ?
I) La poésie, c'est avant tout la vie 1) Exaltation des sentiments, de la vie affective La poésie est souvent considérée en premier lieu comme l'expression par le poète de sentiments personnels. Le poète, à travers son poème, présente un tableau de sa vie affective, tableau qu'il cherche à partager avec seslecteurs, puisqu'il évoque souvent des sentiments universellement ressentis comme l'amour, l'amitié, le désir.
Lapoésie est aussi le lieu de l'évocation de moments clés de la vie du poète et de tout un chacun telle la rencontre,motif poétique récurrent. Ex :· La poésie d'élégant badinage de Clément Marot dans L'adolescence clémentine · Le poème « A une passante » de Baudelaire évoquant le thème de la rencontre amoureuse. · La préface des Contemplations de Victor Hugo et la fameuse phrase montrant l'ambition universelle de la poésie dans sa peinture de la vie affective : « Quand je parle de moi, je vous parle de vous ». 2) La fonction didactique et morale de la poésie La poésie peut jouer un rôle didactique et donc avoir un impact concret sur la façon dont les hommes conduisent leur vie.
Le poète peut prendre la figure d'un maître à penser ou d'un directeur de conscience, donnantdes leçons de morale à ses lecteurs.
C'est le cas de La Fontaine utilisant la forme poétique dans ses Fables dans lesquelles le registre didactique est omniprésent.
La poésie ultra-contemporaine tend à retrouver cette fonctiondidactique : elle ne veut plus se faire donneuse de leçon et ne comporte aucune ambition morale, cependant ellevise à délivrer un enseignement au lecteur.
Cette nouvelle poésie incarnée par des poètes tels que ChristopheHanna ou Franck Leibovici s'appuie sur la forme du « document poétique » et œuvre à un retraitement del'information pour proposer au lecteur une autre compréhension du monde qui l'entoure et des informationsdivulguées par les médias.
La finalité n'est plus morale, mais la fonction de la poésie est cependant didactique etancrée dans la vie.
3) La poésie engagée : une poésie ancrée dans la vie La poésie dite « engagée » témoigne de l'ancrage véritable de la poésie dans la vie ; la poésie n'est pas guidée par la mort, ne doit pas traiter seulement des morts mais doit s'occuper avant tout des vivants et s'impliquerdans les débats socio-politiques.
Le poète met son art au service d'idées sur lesquelles il cherche à éclairer l'opinion(cf.
figure hugolienne du poète prophète ayant pour fonction d'éclairer les âmes égarées).
Plus qu'une dénonciation,la poésie, dans sa forme la plus engagée peut devenir un véritable appel à la lutte.
Elle peut avoir une vocation derassemblement autour d'un combat commun.
Elle se présente donc comme une véritable arme. Ex :· Les Châtiments de Victor Hugo, recueil de poèmes satirique témoignant de l'engagement politique de l'auteur ( critique de Napoléon III).
On peut étudier ici la composition très significative du recueil en 7livres ( les six premiers portant pour titres ironiques les principales déclarations et fiertés du régimeimpérial et le septième opérant à un renversement et témoignant d'une victoire du poète sur Napoléon,par la magie du Verbe) · Aubigné qui défend les protestants pendant les guerres de religion dans Les Tragiques · La poésie de la Résistance, représentée par des poètes tels qu'Aragon, René Char, Paul Eluard. TRANSITION : possibilité de citer Paul Eluard à « la poésie est dans la vie » mais cette vie n'est pas toujours belle et souvent présentée sous le signe de la déchéance : « la poésie s'accommode […] des chevelures décoiffées,.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Ronsard a écrit en 1550 que « la mort guide nos pas » (odes II, 12). Pensez-vous que les poètes doivent en faire un sujet essentiel de leurs textes ?
- L'écrivain contemporain, Claude Roy écrit dans Défense de le Littérature (1968) : Certains esprits refusent le roman. Ils y voient une amusette, un gaspillage de force. Ils trouvent la vie (ou l'Histoire) plus riche en histoire, la science plus excitante et que la philosophie donne mieux à penser. Vous direz, en vous appuyant sur les textes du corpus, sur les romans que vous avez étudiez et sur vos lectures personnelles ce que vous pensez de ce jugement sur les romans rapporté par Cla
- Pierre Magnan écrit au début de ses Mémoires : « Je vais descendre nu et cru dans la fosse aux hommes. Ils ne me feront pas quartier. [...] Mais c'est moi, d'abord, qui ne dois pas me faire quartier. » Dans quelle mesure ce propos peut-il définir l'entreprise autobiographique ? Vous en discuterez en vous appuyant sur les textes du corpus...
- Baudelaire a écrit en 1856, qu'une foule de gens se figurent que le but de la poésie est un enseignement quelconque, qu'elle doit tantôt fortifier la conscience, tantôt perfectionner les moeurs, tantôt enfin démontrer quoi que ce soit d'utile. Or, ajoute le poète, la poésie ne peut pas sous peine de mort ou de défaillance, s'assimiler à la science ou à la morale. Qu'en pensez-vous ?
- « Voilà le fond, dont on eût pu faire, avec un égal succès, une tragédie, une comédie, un drame, un opéra,etc. [...] Le genre d'une pièce, comme celui de toute autre action, dépend moins du fond des choses que des caractères qui les mettent en oeuvre » écrit Beaumarchais. En vous appuyant sur les textes du corpus ainsi que sur les pièces que vous connaissez, vous commenterez et apprécierez cette affirmation.