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Quelle importance accordez-vous à l'histoire dans un roman ? Vous appuierez votre argumentation sur des exemples précis, tirés de lectures.

Publié le 17/01/2022

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histoire

 

Pour ce sujet très classique (qul revient souvent sous des formes diffé-rentes et peut se réduire à : qu'est-ce qui vous attire dans un roman, le récit, les personnages, l'atmosphère, l'évocation d'une époque, le style de l'auteur, etc. ?), on choisira avec soin ses exemples.

On partira du sujet, donc de l'importance de « l'histoire «, pour évoquer progressivement cies centres d'intérêt plus importants.

 

 

I. L'importance de « l'histoire « dans un roman :

- les charmes de l'aventure et de l'intrigue ;

- histoires en « séries « ;

- fabrique du « best-seller «.

II. Un roman n'est pas une simple « histoire « :

- tout a déjà été dit (et écrit) ;

- personnages, mythes et atmosphères ;

- sur des intrigues stéréotypées.

III. Un roman, c'est d'abord le « regard « d'un écrivain :

- mieux vaut être inimitable que de n'imiter personne ;

- le roman, c'est plus vrai que le vrai ;

- tout est affaire d'écriture.

 

histoire

« Grimm, il y a là une suite de trésors inépuisables et nous sommes suspendus aux lèvres de Schéhérazade.

Qui plusest, ces récits, dans la mesure où ils sont archétypiques, sont très forts, et vont bien au-delà de l'intérêtanecdotique.

L'Odyssée peut se lire aussi comme un récit poétique et initiatique et pas seulement comme un beau livre d'images et d'aventures en couleurs.

Quand Ulysse rentre chez les Cimmériens et rend visite aux défunts, il y abien autre chose qu'une « histoire » : une interrogation sur le monde, le sens de la vie, le destin, la mort.

Lescontes les plus anodins en apparence peuvent se lire ainsi, comme des récits mythiques qui en disent long (Blanche Neige ou Barbe Bleue) sur nous-mêmes, nos fantasmes, nos rêves, nos peurs : ce sont beaucoup plus que des « histoires » que nous racontent ces livres. Il en est ainsi des grands chefs-d'œuvre de la littérature : ils nous parlent de nous-mêmes.

Les grands romans nenous racontent pas seulement des histoires, des intrigues plus ou moins bien ficelées, même ceux qu'on appelle, àtort ou à raison, des récits d'aventures comme L'île au Trésor de Stevenson, Moby Dick d'Hermann Melville ou les romans de Joseph Conrad.

Au-delà de l'anecdote, c'est une peinture complète de la condition humaine qui nous estproposée : l'histoire du capitaine Achab poursuivant de son délire meurtrier la baleine blanche mythique, c'est lanôtre puisqu'en chacun de nous s'incarnent un rêve, un désir d'absolu plus fort que tout.

Même si le lecteur n'en estpas toujours conscient, c'est bien cela qu'il recherche : des personnages auxquels s'identifier.

Car, bien plus qu'unehistoire originale (il y en a si peu), ce sont des personnages que le lecteur aspire à rencontrer et en qui sereconnaître.

Que de romans dont nous serions incapables, quelques mois après leur lecture, de raconter l'histoire !De quoi cela parle-t-il ? demande-t-on à celui qui lit ; qu'est-ce que cela raconte ? Est-ce vraiment si important ?Un roman, n'est-ce que cela, une histoire qu'on pourrait raconter, résumer en quelques lignes ? Si ce n'est que cela,alors à quoi bon lire ? L'essentiel, justement, est ailleurs, dans ce qui reste quand on a tout oublié de l'intrigue : despersonnages, une atmosphère prenante, des mots.

Quand on a oublié l'histoire racontée par Les Trois Mousquetaires, il reste au moins d'Artagnan et Richelieu.

C'est bien là ce qui compte et demeure. En effet, tous les romans racontent plus ou moins la même histoire.

On peut s'amuser à résumer ainsi le romanarchétypique du xixe siècle français : c'est l'histoire d'un provincial qui monte à Paris dans l'espoir d'y réussir sa vie ;il y connaîtra soit le succès (par des moyens douteux, voire malhonnêtes), soit la désillusion, selon qu'il s'appelled'Artagnan justement, ou Rastignac, Lucien de Rubempré chez Balzac (Les Illusions perdues), Frédéric Moreau (Flaubert : L'Éducation sentimentale), Georges Duroy (Maupassant : Bel Ami) par exemple.

L'arrivisme est partout présent, parfois l'échec.

C'est toujours l'occasion de montrer la société comme elle est.

Bien plus que l'intrigueinterchangeable, c'est cela qui compte : on peut ramener ce chef-d'œuvre étonnant de l'abbé Prévost, Manon Lescaut, à un « polar » de notre temps, avec une femme fatale aux désirs inépuisables (sexe et argent) qui entraîne un jeune niais dans son sillage vers une inéluctable déchéance.

Tout y est : les rues glauques de Paris, les tripotsoù l'on triche, les truands, les amitiés louches, les assassinats nocturnes, on vole, on plume les « pigeons », on sefait emprisonner, on se déguise pour s'évader, avec, au bout du voyage, dans le désert américain, la rédemption dela prostituée.

On pourrait parler de stéréotype et de caricature s'il n'y avait l'essentiel, le regard de l'écrivain surtout cela et qui transfigure l'intrigue criminelle en « tragédie grecque » et la petite Manon, petite fille sans moraliténi grande envergure, en héroïne mythique qui hante nos rêves. C'est, en effet, ce regard-là qui compte, bien plus que l'intrigue.

Il n'y a que les écrivains médiocres qui cherchentl'originalité à tout prix.

On peut bien raconter toujours les mêmes histoires, refaire, comme Cocteau la premièrepartie de la Chartreuse de Parme (dans Thomas l'Imposteur) ou comme Radiguet la Princesse de Clèves (le Bal du comte d'Orge°.

Déjà, Maupassant, dans Une vie, reprend Flaubert et Madame Bovary ; comme l'oeuvre de Proust développe, fût-ce à son corps défendant, celle de Balzac.

L'originalité n'est pas là.

Mieux vaut être inimitable que den'imiter personne.

Les grands romanciers se moquent bien de raconter toujours les mêmes histoires de passioninterdite, de réussite sociale ou de rêves avortés puisqu'ils savent bien que l'important n'est pas là.

Autant dire,sinon, que ce qui compte dans un tableau, c'est le « sujet » et que les vieilles godasses peintes par Van Goghvalent moins qu'une crucifixion de Rubens parce que le sujet est trivial.

Une œuvre ne révolutionne jamais sonépoque (ou presque : il ne faut jamais dire jamais !) par l'originalité du contenu, mais toujours par la nouveauté,l'aspect « inouï » de sa forme.

Qu'il s'agisse de roman, de peinture ou de musique.

Rien de plus banal que les sujetstraités par les impressionnistes, et pourtant, c'est par eux que le scandale arrive, ou l'histoire que nous racontentProust dans la Recherche du temps perdu ou Céline dans Voyage au bout de la nuit.

Ce qui choque les contemporains, c'est la forme, les sinuosités proustiennes, les invectives céliniennes, le reste appartient àl'anecdotique.

De même, rien d'original dans les thèmes de la poésie verlainienne ; elle n'en propose pas moins unnouvel art poétique. Le strict amateur d'histoire originale est condamné à l'ennui, ou aux démesures stéréotypées des récits pour jeuxvidéo ou autres massacres à la tronçonneuse.

Aussi devrait-il plutôt reporter son attention sur autre chose : lespersonnages, l'atmosphère.

Ce qui reste, en effet, d'un livre, c'est cela : Julien Sorel ou le père Goriot, bien au-delàdes anecdotes dans lesquelles sont insérés ces personnages devenus presque plus vivants que les gens de laréalité.

Raskolnikov, la créature de Dostoïevski, est bien plus présent, pour le lecteur de roman, que les criminelsdont il lit les exploits dans la rubrique faits divers des journaux.

Bien mieux encore, peut-être, ce qui reste, c'est unclimat diffus, une couleur particulière à chaque récit, la manière du romancier, sa présence à chaque page : quelrésumé des Misérables rendra compte du chef-d'oeuvre de Victor Hugo ? L'intrigue ramenée à une dizaine de lignes, quoi de plus mélodramatique, invraisemblable, inepte même.

Et pourtant, Jean Valjean, Cosette, les Thénardier ontune vie propre, bien à eux.

Ils sont à tout jamais inscrits dans la mémoire collective comme des héros beaucoupmieux connus de nous, beaucoup plus présents que bien des connaissances que nous nous faisons, que nombre denos prétendues relations amicales.

Ils sont toujours là car ils nous parlent de nous, de notre passé collectif, denotre misère, de nos espérances, de nos révoltes.

Tout cela, qui rend les romans si forts : personnages, peinture de. »

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