POESIE PURE
Publié le 18/05/2020
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«
POÉSIE
PURE.
L'expression «poésie
pure », due à Paul Valéry (Situation de
Baudelaire, 1924), devint l'enjeu contro
versé d'un débat lorsqu'elle fut reprise
par l'abbé Henri Bremond, dans une
conférence promise à un grand retentis
sement (24 octobre 1925), dans plu
sieurs articles des Nouvelles littéraires
réunis dans la Poésie pure ( 19 2 6), puis
dans des essais comme Prière et Poésie
(1926).
Tenant du romantisme contre le classi
cisme remis à l'honneur à cette époque,
Bremond soutient que la véritable poésie
n'a pas un fondement rationnel et que
le langage n'y est pas utilisé pour
« communiquer des idées » ou des sen
sations.
Ce dernier doit, au contraire,
s'épurer de tout contenu intellectuel et
utiliser les mots pour « faire passer en
nous un certain ébranlement », afin que
nous soyons «remués dans nos profon
deurs ».
Le poème a deux sens : l'un
immédiat, « l'impur» ; l'autre, « celui
de la prose n'apparaîtrait plus ».
Cette
querelle de la poésie pure, aujourd'hui
dépassée, fut un jalon important dans la
révolution à la fois théorique et pratique
de la poésie moderne.
qu'il
respire et qui seul est poésie le
pur ».
Dans cette lutte entre le pur et
l'impur, la poésie, comme l'extase rn ys ti
que, est tout entière dans le repli sur le
souffle intérieur, sur le silence.
L'abbé
Bremond voit dans le romantisme l'ini
tiateur de cette définition nouvelle de la
poésie, dans laquelle le langage n'est plus
utilisé dans sa fonction banale de
communication et se trouve radicale
ment distingué de la prose.
La vraie
poésie est prière, elle est expérience
individuelle : c'est d'ailleurs précisément
la raison pour laquelle Bakhtine ( Esthéti
que et théorie du roman) condamnera
la poésie (où le langage est donné au
poète « seulement de l'intérieur »), en
lui opposant le roman, fonne accomplie
du dialogue et de la multiplicité des
langages.
Le débat confus qui suivit la publica
tion des thèses de l'abbé Bremond porta
à la fois sur un point d'histoire (est-il
légitime d'attribuer la paternité de cette
révolution poétique au romantisme?) et
sur le fond (peut-on souscrire à une telle
analyse du fait poétique ?) .
La contro
verse sur l'origine du phénomène opposa
les partisans du romantisme et ceux qui
voyaient en Baudelaire, et surtout le
symbolisme, les véritables précurseurs
de la modernité.
Le second aspect, plus
important, suscita de nombreuses prises
de position, dont celle de Claudel (favora
ble à Bremond) et Valéry (plus nuancé).
Violemment attaqué par le critique du
journal le Temps, Paul Souday, qui
soutenait la thèse du caractère intellec
tualiste de toute poésie, Bremond,
s'appuyant sur des exemples variés
d'Hugo, Baudelaire ou Valéry, s'attacha
à montrer la valeur intrinsèque du
langage poétique, sa « magie » .
Valéry,
dont l'œuvre était ainsi sollicitée dans
le débat, devait apporter sa contribution
en présentant la poésie pure comme
« une recherche des effets résultant des
relations des mots, ou plutôt des rela
tions de résonances des mots entre
eux ».
Il suggérait ainsi « une explora
tion de tout ce domaine de la sensibilité
qui est gouverné par le langage », et la
donnait pour l'idéal, impossible à attein
dre, d'un univers où « rien de ce qui est.
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