Poésie et engagement
Publié le 19/12/2021
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«
Héritier des philosophes des Lumières, le poète du XX esiècle se donne pour mission
de s’engager à changer la vie.
Une position qui est devenue à ses yeux une nécessité
existentielle et un rôle qui est autant social qu’humanitaire.
Il s’agit, en effet, de guider le
peuple dans sa marche vers l’avenir, Victor Hugo l’avait formulé ainsi: « Peuples, écoutez
le poète !» ( Les rayons et les
ombres ).
Ainsi on peut
s’interroger sur la nature des liens qui peuvent exister entre poésie et engagement
politique, social ou bien humain : dans ce qui peut apparaître comme une confusion des
genres, la poésie se révèle-t-elle à elle-même, ou ne risque-t-elle pas au contraire de se
perdre ?
I Le poète engagé : grandeur d’une écriture et répercussions
La préface de L’Honneur des poètes dévoile un contexte historique précis, celui de
la Seconde Guerre mondiale.
Et plus particulièrement celui de la France sous l’occupation
allemande, face à laquelle le mouvement de la Résistance va progressivement se dresser.
Durant cette période, la poésie n’est plus uniquement le miroir de l’expression des
sentiments, à savoir celle du lyrisme, mais davantage une arme pour se défendre contre
la barbarie et les horreurs infligées par la guerre.
Un extrait issu du recueil peut illustrer
ce mouvement de révolte, cette marche vers l’engagement : « Je hais.
Ne me demandez
pas ce que je hais/ (…) il y a le feu sanglant, la soif rageuse d’être libre » (Pierre Emmanuel,
L’honneur des poètes) .
Qui plus est L’honneur des poètes, titre de ce recueil collectif
(recueil paru le 14 juillet 1943 aux Éditions de Minuit, appellation symbolique d’une maison
clandestine), confère à la poésie une fonction éthique et traduit les émotions et les
interrogations que suscite la guerre.
C’est pourquoi, il convient de souligner que la poésie
moderne naît dans l’insatisfaction de la conscience humaine, devant la laideur ou tout
simplement la rudesse de l’existence (dans ce cas précis il s’agit de la
guerre).
L’expéri
ence poétique (de poiein qui signifie « faire ») s’impose comme une absolue nécessité et
s’articule à la difficulté d’affronter le monde.
Adhérer à ce monde qu’on ne comprend pas
et que l’on refuse tel est le projet fondamental de cette poésie dérivée de la douleur et du
sentiment d’une difficulté à vivre.
Paul Éluard, l’auteur de la préface, affirme à ce propos
« une fois de plus la poésie mise au défi se regroupe, retrouve un sens précis à sa violence
latente, crie, accuse, espère ».
De ce point de vue, la poésie en ressort grandit.
Cette conception se retrouve aux siècles précédents, notamment dans Les
châtiments de Victor Hugo, la plus représentative d’une poésie de combat contre un
pouvoir autoritaire ou encore dans Les Tragiques d’Agrippa d’Aubigné au XVI esiècle…
II La pluralité de l’écriture poétique : l’engagement l’un de ses moteurs
Le poète est reconnu pour sa capacité à appréhender poétiquement le monde, à
entrer en communion avec l’univers.
Il représente à la fois la figure d’un médiateur entre
les hommes et Dieu, d’un Prométhée « voleur de feu » et d’un éclaireur.
« Grand œil fixe,
ouvert sur le grand tout » le poète chez Hugo est beaucoup plus qu’un spectateur il est un
visionnaire, chargé d’une mission civilisatrice.
Or le fait que la parole poétique acquiert une
dimension oraculaire et dans la mesure où le sens profond de la poésie est plus
traditionnellement lié à la mythologie, n’attendons-nous pas de la lyrique qu’elle nous
peigne un sentiment plus intime tel que l’amour ? L’engagement politique parasite-t-il
l’ambition poétique pris dans son sens le plus stricte celui de la lyrique
courtoise ? Le courant lyrique est certainement celui que
l’on retrouve le plus tout au long de notre histoire littéraire.
Accueillant l’expression
personnelle des sentiments du poète il permet en effet d’utiliser le pronom personnel
« je ».
En outre, cette forme poétique est à la recherche de la musicalité.
Rappelons que
ce type de poésie doit son nom à la lyre, instrument dans l’Antiquité qui accompagnait les
chants.
Symbole d’unité et d’harmonie, l’objet prend dans le mythe d’Orphée une valeur
pacificatrice.
Capable de suspendre les supplices de l’Enfer, la lyre devient le modèle des
pouvoirs de la poésie et des liens étroits qui l’unissent à la destinée de la créature humaine.
Ainsi des troubadours (qui utiliseront la forme et le fond de la poésie lyrique pour chanter
l’amour), à Ronsard (qui élargira cet espace du lyrisme dans de nombreux recueils.
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